Épilogue

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Yuno se réveilla en sursaut. En fait, elle ne s'était pas encore endormie. Le Sommeil s'efforçait de l'amadouer de ses caresses incessantes, mais une toute nouvelle énergie animait le corps de la jeune femme.

Soleil était passé derrière l'horizon. Une portion du cercle parfait de son œil avait disparu, comme masqué par la ligne lointaine du sol. Comme si une paupière se fermait sur l'Œil de Soleil.
Comme si Soleil se servait de l'horizon comme d'une couverture pour se coucher.

Sans doute aussi fatigué que Yuno de son trajet éternel, Soleil se couchait. Mais cela n'était pas tout.

Sa lumière éclairait les nuages, comme d'habitude, mais cela n'était pas comme d'habitude. Une touche irréelle flottait par dessus le tableau, le rendant plus... vivant, plus vif.

Yuno se frotta les yeux. Elle ne croyait pas ce qu'elle voyait, mais ne savait pas bien ce qu'elle voyait non plus. C'était pourtant simple à décrire : Soleil se couchait, et ses rayons illuminaient le Haut-Ciel à l'horizon. Mais quelque chose n'allait pas, ou plutôt allait trop bien.

Il n'y avait pas que ce qu'elle voyait. Sa vue semblait lui offrir d'autres émotions, comme si elle pouvait voir... du bonheur, ou de la colère ?
Étaient-ce... ?

Elle se releva, prenant appui sur le mur qu'était le crâne gelé d'Alithea. Cela ne pouvait être... ?

Le coucher de Soleil. Évidemment. Soleil avait dépassé l'horizon, alors il ne pouvait en être autrement.
Lorsque l'horizon sera atteint, les Couleurs Promises jailliront. C'était ça, la promesse. Et elle était tenue.

Yuno observa la scène, ne pouvant réfréner un fou rire. C'était évident ! Depuis le début ! Une vague de bonheur submergea son corps martyrisé, effaçant chacune des douleurs causées par le Froid. Les Couleurs !

Elle hurla sur place. Les Couleurs ! Ce pourquoi l'Exode tout entier marchait ! Elle les avait trouvées ! Elle était peut-être la première marcheuse à assister à un tel spectacle. Les Couleurs, bon sang !

Le ciel... elle n'aurait pu le décrire tant les mots lui manquaient. Le ciel n'était pas Froid : il était radieux, piquant. Des teintes brutales s'étalaient sur des notes délicates, habillées d'une joie acide et épicée.
Le ciel n'était pas Blanc. Le ciel n'était pas blanc.

Yuno, un sourire béat au visage, se tourna vers l'effraie qui, patiente, attendait encore son heure. Sa dernière heure.
La paria jeta un dernier regard vers le coucher de Soleil, qui lui semblait de plus en plus resplendissant au fur et à mesure que l'Œil se cachait derrière l'horizon. De nouvelles nuances naissaient chaque seconde, se mêlant aux autres, s'éteignant à petit feu.

Quand Soleil disparut pour de bon, et après que le dernier rayon ne se soit éteint, Yuno se rassit. Elle laissa le Sommeil l'enrouler pour de bon, et se blottit contre son agréable Solitude. Puis elle hocha la tête à l'effraie.

L'oiseau de proie déploya ses ailes, s'envola d'un lourd battement, et embrassa de ses plumes la marcheuse.

FIN

L'Exode BlancOù les histoires vivent. Découvrez maintenant