Lumière Éphémère | 𝐬𝐚𝐬𝐮𝐬𝐚𝐤𝐮

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(je vous invite grandement à écouter les musiques que je mets en média pendant la lecture)

Un vent frais venait délicatement soulever les mèches rosées de la jeune fille alors que ses pieds laissaient les flots glacés de la rivière venir picoter sa peau. Ayant préféré se tenir à l'écart de l'effervescence qui régnait actuellement dans le village caché de la Feuille, la douce Sakura flanait dans un coin plus reculé et laissait ses jambes la guider où bon leur semblaient. Lorsque le mois de juillet s'achevait, les rues de Konoha s'animaient tandis que les villageois s'affairaient à orner leurs maisons de diverses décorations ainsi qu'à se parer des plus beaux accoutrements, ceux qui résidaient au fond de leur placard douze mois dans l'année pour n'être ressortis qu'en cette occasion spéciale. En ce frénétique mois d'été, tous mettaient du cœur à l'ouvrage quant aux préparatifs du festival Hanabi qui venait, quelques heures durant, illuminer le ciel et les prunelles des villageois de ses feux d'artifices ardents et colorés.

Bien que la jeune ninja s'était surmenée pour que le festival soit une réussite, se pliant aux sévères exigences du Cinquième Hokage tout en venant en aide à n'importe qui lui demandant, elle n'avait guère le cœur à la fête, et ce depuis trois années à présent. Même si la plupart des ninjas de son âge faisaient partis de ses proches amis, un gouffre les séparait étant donné l'absence de deux idiots à ses côtés face aux équipes parfaitement unies qu'elle côtoyait quotidiennement, et Sakura ne pouvait fermer les yeux sur le vide qu'elle ressentait dès que cette pensée lui effleurait l'esprit. Malgré le manque que lui causait le départ du rayon de soleil de Konoha, elle savait Naruto en sécurité auprès d'un des trois ninjas légendaire. Mais ce qui la rongeait était de savoir le dernier des Uchiha seul, se noyant continuellement dans un océan de haine et en proie à des idées funestes. Si elle s'efforçait constamment de le chasser de ses pensées moroses, voilà plus d'une semaine que la mélancolie ne la lâchait pas d'une semelle ; et pour cause, Sasuke avait fêté ses seizes années une semaine auparavant. Si la jeune fille était incapable d'oublier cette date, elle se demandait si le garçon en question avait ne serait-ce la moindre idée du jour qu'il était. À chacun des anniversaires du jeune homme, Sakura ne pouvait ressentir que le chagrin étouffer sa cage thoracique et les regrets obstruer ses pensées, en raison du poids des remords qui était particulièrement difficile à supporter en cette douce soirée d'été.

Pour couper court aux angoisses torturant son esprit, la jeune fille se pencha afin de plonger ses doigts fins dans l'eau et de recueillir une fleur qui glissait vers elle à toute vitesse, en raison du vif courant. En se redressant, avec la petite plante à présent logée entre ses délicates mains disposées en coupe, le regard de Sakura percuta celui de l'astre lunaire qui semblait bien proche ce soir là. Comme si la lune avait senti sa solitude, et souhaitait lui tenir compagnie une soirée durant.

Les nuits où elle ne pouvait trouver le sommeil, la fille au prénom fleuri repensait de manière automatique au soir où la personne qu'elle aimait était devenu un déserteur, et ce souvenir n'était bon qu'à comprimer le cœur déjà douloureux de la jeune fille, tandis que son estomac se nouait instinctivement. Le goût amer du regret se dispersait progressivement sur son palais, alors que la scène tournait en boucle dans sa tête. Lors de ce dernier échange, la fillette qu'elle était à l'époque avait été assaillie par un terrible préssentiment lui murmurant, du creux de ses oreilles au plus profond de son for intérieur, que ce serait l'ultime fois qu'elle verrait le garçon aux yeux charbonneux. Sentant la peur de perdre l'autre monter en elle, la jeune fille lui avait jeté à la figure tout l'amour qu'elle ressentait pour lui, tel une dernière tentative désespérée de garder son premier et unique amour auprès d'elle. Mais les mots, les gestes, et les larmes étaient insuffisants face à la sombre détermination qui déchirait les entrailles de Sasuke. Comme si il avait la tête sous l'eau, le jeune garçon ne percevait les voix de ses compagnons que de loin et, malgré les mains qui lui étaient tendues, les abysses de la vengeance l'attirait irrévocablement.

Toutefois, avant sa grande plongée en enfer, le dernier survivant des Uchiha s'était autorisé un dernier détour. Pour cela, avant même que les iris émeraudes de Sakura n'aient pu distinguer quoi que ce soit, Sasuke avait bondi derrière elle. En guise d'adieux à son ancienne vie, il avait repensé une ultime fois aux moments où, grâce à ses amis, un souffle d'espoir avait réussi à réchauffer son cœur mortifié, et pour clore définitivement ce chapitre de sa vie, le brun avait chuchoté à Sakura un dernier mot, réservé mais pourtant rempli de signification :

« Merci »

Ressassant de manière trop fréquente cette ultime conversation, la jeune ninja ne put s'empêcher de percevoir ce remerciement comme un espoir et non comme le symbole d'une page tournée. Si Sasuke ne voulait plus qu'elle ne fasse partie de sa vie et qu'elle reste dans le passé, la jeune femme croyait fort au fait que leurs chemins seraient emmenés à se recroiser à l'avenir. Pour ne pas laisser le fil rouge appartenant à l'homme qu'elle aimait se briser, Sakura reposa, dans une attention des plus symboliques, la fleur qu'elle avait recueilli au creux de ses mains sur la surface cristalline de l'eau. Les pétales reprirent leur course instantanément et, songeuse, la douce femme se mit à imaginer que le Uchiha se trouvait en aval de ce même cours d'eau, lui aussi avec la lune comme unique compagnie, et que la fleur de cerisier qu'elle avait déposé dans les flots passerait devant le regard obscur de l'être solitaire ayant quitté le village, lui apportant, pendant une poignée de secondes, un semblant de chaleur et de lumière.