Chapitre 1

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Le 21 Mai 2022

Broc : Route de Larret

Mon réveil sonnait déjà dans le noir de la pièce. J'entrouvris douloureusement les yeux, en couinant bruyamment. Mes paupières étaient aussi lourdes que du plomb. Mes muscles étaient encore tous endoloris par cette nuit agitée. J'aurais aimé que le monde me laisse un peu plus de répit. Une ou deux heures de plus ? C'était déjà trop demandé. J'aurais volontiers débranché cette machine qui siclait. Je me loverais un instant encore au fond de mon lit. Le résidu sec de mes rêves s'était évaporé. Je me trouvais tremblante sous mon duvet, le corps maculé de sueurs froides. Aaron accourait déjà à ma porte. Il avait lui aussi entendu les cris stridents de cet instrument que l'on haït tous. C'est vrai ! C'est toujours lui qui vous arrache à vos rêves idéalistes aux airs paradisiaques pour revenir à la dure réalité, retourner dans ce monde empli de cruauté et de besoins vengeurs. Rouge. Sang.

Vous entendez sûrement de nombreuses personnes affirmer : « Le moustique est le plus grand meurtrier sur terre. » Êtes-vous sûrs que l'être humain a été pris en compte dans ce classement ? À priori, j'avais déjà un avis sur la question. J'étais bien consciente que de nombreuses personnes se laissaient envahir par leurs pulsions. Leurs actions étaient portées par la vengeance qui trouve son assouvissement dans le meurtre et dans le sang déversé. Cela est répugnant, vous me diriez, ce n'est pas tout ! Pensez à tous ces animaux que l'Homme maltraite et tue par plaisir. Il s'exécute enthousiaste, puisant sa satisfaction dans sa position supérieure. Il se croit meilleur et cela lui plaît. Il est portant le pire de tous ! Le plus cruel ! Le plus monstrueux du monde bestial ! Je ne suis peut-être pas une défenseuse des animaux ou de l'environnement ni une végétarienne militante, mais j'étais policière. Mon métier m'avait jeté ce questionnement en pleine figure. Il m'avait forcé à me pencher sur la question. J'avais dû revoir ma conception de l'humain fondamentalement bon que l'on m'avait vendu ! Il m'arrivait, parfois, par malheur, de tomber sur l'une de ses œuvres d'art morbide. Elles défiaient toutes les bonnes et douces paroles des optimistes. Elles laissaient une saveur amère sur la langue. C'était une partie même de la noirceur humaine que je pouvais contempler. Rien que d'y songer, mon corps frissonne et mon cœur se soulève.

Devant ce genre de scène de crime atroce, je n'avais jamais réellement le temps de philosopher. Toutefois, j'avais tout le loisir de faire le procès du genre humain hors de mes heures de travail. Mes nuits de sommeil en faisaient les frais. C'était dans ces moments de terreur que ces pensées me travaillaient le plus. Je courais alors comme une hystérique jusqu'à la chambre de mon fils pour le serrer dans mes bras. Je devais m'assurer que mon fils de cinq ans n'avait rien. Il me fallait être sûre qu'Aaron, jamais, ne serait victime de l'une de ses horreurs. Je voulais être certaine qu'il allait bien. Peut-être que je vous apparais paranoïaque ? Vous avez raison. Je crois, cependant, pouvoir me justifier. Je ne vous en veux pas. Vous ne savez pas encore tout de moi...

La porte s'ouvrit, laissant la lumière artificielle du couloir inonder ma chambre. Il « était trop tard à présent. Mon destin était scellé. Je ne pouvais plus faire machine arrière. J'étais condamnée à me lever. Je serais secouée de bonne heure par un hyperactif presser de croquer sa vie à pleine dent. Une petite silhouette se glissa à l'intérieur de la chambre, telle une ombre. Il était discret. Il progressait sur la pointe des pieds. On entendait à peine ses pieds frôler le parquet. Je ne tentai aucun mouvement, guettant la progression du garçon. Je m'amusais de le voir à l'œuvre. J'attendais, sans un mouvement, de voir ce qu'Aaron projetait. Soudain, le garnement bondit et attaqua, toutes dents dehors. Il arriva lourdement sur mon ventre. Il grogna comme un animal sauvage au-dessus de sa prise. Je poussai un cri que j'étouffai aussitôt en rire nerveux. Cette boule d'énergie fit dessiner sur ma figure un large sourire. Je le repoussai avec toute la délicatesse que mon expérience avait épargnée.

Quand la vérité éclateWhere stories live. Discover now