Liberté

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Un mois... Un mois que je vis une vie normale... C'est tellement irréaliste... Tellement différent... Et toi, que fais-tu ? Où es-tu ? Me cherches-tu ? J'espère que tu ne me retrouveras pas... Désolé Julian de me sentir si bien ici...

La brise me caressant la peau, les voitures roulant dans le bourg d'une petite ville, la cloche de l'église qui sonne, les gens buvant un coup dans un bar, la vieille dame sortant de la petite boulangerie. Tout m'émerveille, tout me procure une chaleur, cette sensation nouvelle, m'allégeant le cœur, le corps, l'esprit.

La Liberté.

C'est la première fois que je me promène vraiment... Première fois que je suis libre... Lui aussi l'est toujours... Il m'a détruite.... Je m'en remets tout juste... Et encore, je suis plus que l'ombre de moi-même...

— Tu rêvasses encore ma belle ? remarque Sarah, rayonnante.

— Ouais... dis-je en souriant. Depuis toute petite, je pense que ça m'a sauvée.

Sarah paraît étonnée, c'est la première fois que je parle de mon passé d'un ton léger. Je travaille depuis deux semaines sur ma peur de sortir, ma timidité maladive. Je sens que je m'améliore, mon esprit s'ouvre peu à peu. Dorénavant j'arrive à me promener aux côtés de celle que je considère comme ma grande sœur.

— Ça t'a sauvé de... risque Sarah.

— De beaucoup de choses... J'étais désespérée, dans le monde où je vivais, j'étais rien, j'avais rien.

Le regard de Sarah m'ébranle tellement, pas de jugement, pas d'étonnement. Il n'y a que de la compréhension. D'un autre point de vue, des inconnus pourraient juste nous voir discutailler, en réalité, ils assisteraient à une thérapie mutuelle. Je sais que Sarah n'a pas eu un joli passé, comme moi, qu'elle ne s'en est pas totalement remise, je le vois clairement, elle m'aide aussi pour comprendre comment s'en sortir.

— J'en ai marre qu'on parle toujours de moi. affirmé-je, gênée. Tu pourrais pas me parler un peu de toi et Naël ?

— Y a que Näel qui t'intéresse avoue ! s'écrie Sarah en empoignant mes joues, je me sens rougir.

— Non c'est pas ça. ma voix prend un ton plus sérieux. C'est ton regard, je sais que tu me comprends.

Encore un mystérieux sourire, factice ?

— T'es pas encore prête à écouter ça ma belle, affirme Sarah, gênée. J'ai pas envie de te mettre mal à l'aise, tu comprends ?

Elle est pas encore prête, comme moi.

— Tu m'en parleras le moment venu. dis-je d'une voix que je veux décontractée.

— On devrait rentrer non ? affirme Sarah, se retournant soudainement. Il va bientôt être midi.

— C'est vrai que je commence à avoir faim... remarqué-je.

Maintenant, je peux manger à ma faim, sortir quand je veux, m'habiller comme je le souhaite, j'ai vraiment du mal à m'y habituer. J'ai l'impression de ne pas le mériter, c'est tellement bizarre de pouvoir choisir ce qu'on peut faire, c'est comme ça que vivent tous les humains ? Dans quel monde j'étais alors ?

J'ouvre la porte de notre maison, une douce odeur traverse mon nez, sans doute Jeanne qui fait à manger. Sarah et moi enlevons nos chaussures avant de les ranger. On se dirige vers le salon où Naël, concentré, lit un livre. J'entends le bruit d'une tondeuse dehors, George est en train de tondre la pelouse, j'aperçois Aiden, fumant une clope sur le transat de la terrasse. 

Décidément, ils fument tous.

— Alors Eileen, ta promenade s'est bien passée ? demande gentiment Jeanne, souriante comme à son habitude.

N'y pense plusWhere stories live. Discover now