𝓒𝓱𝓪𝓹𝓲𝓽𝓻𝓮 𝓼𝓲𝔁

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M I Z U K I  N A K A N O

Chapitre six.

— Mais tu es la pire de toutes les slimes ! On ne peut pas additionner un chiffre avec un x et un chiffre sans x, c'est la base ! Tu peux les multiplier, mais les additionner, c'est interdit.

— Pourquoi c'est interdit ? Imagine que le trois x soit amoureux du deux sans x, pourquoi ils n'auraient pas le droit d'être ensemble ? Moi, je veux les réunir.

— Arrête de dire des bêtises et fais ce que je te dis !

Mizuki rigole, elle aime bien l'embêter. Elle aurait bien voulu aider le trois x dans son histoire d'amour avec le deux sans x, mais puisque ce sont les règles et que Miya prend du temps pour lui expliquer correctement tout ce qu'elle a manqué depuis le début de l'année, elle veut bien faire un effort et laisser l'équation telle quelle sans unir les deux derniers chiffres.

Mizuki ne pensait pas que Miya mettrait sa proposition à exécution. Il lui a dit qu'il allait l'aider pour les cours, mais elle pensait que c'était juste des paroles en l'air parce qu'il voulait être gentil. Elle a donc été surprise en le voyant l'attendre à la sortie de la classe quelques jours plus tard. Il lui a dit qu'ils allaient chez lui pour réviser. Elle a été tellement surprise qu'elle en a lâché la grue qu'elle était en train de faire.

Sur le chemin, elle a appris qu'en skate, il est le représentant du Japon. Elle savait qu'il faisait du skate — il fallait être aveugle pour ne pas remarquer la planche à roulette qu'il tient sous le coude tous les matins — mais elle n'imaginait pas qu'il était aussi doué.

Il semblait d'ailleurs fier de lui montrer un aperçu de ses capacités. Tandis qu'ils descendaient une rue, il s'est penché en avant pour prendre de la vitesse. C'était dangereux, parce qu'au bout, il y avait des escaliers qui descendaient. Elle a voulu lui crier de s'arrêter, mais alors qu'elle ouvrait la bouche, il a sauté avec son skate pour descendre sur la rambarde. Mizuki l'a applaudi, et Miya a souri.

— Fais voir ton exercice.

Avec un peu d'appréhension, Mizuki lui tend son cahier. Il a fallu tourner plusieurs pages pour trouver un espace vierge du moindre dessin.

Assis par terre dans le salon de Miya, ils travaillent sur la table basse. La mère de Miya leur a apporté des collations, l'air ravie de voir son fils avec une amie. Alors tandis que Miya fronce les sourcils en lisant son exercice — ce qui est loin d'être bon signe — Mizuki attrape la tasse de thé vert qui lui est attribuée et souffle un peu dessus avant d'en boire une gorgée.

— Tu n'es même plus une slime à ce niveau-là, t'es carrément un caillou.

Coup dur pour Mizuki qui manque de s'étouffer avec son thé.

— Y a rien de bon, recommence. T'as juste à appliquer ce qu'il y a marqué dans mes notes, c'est pas très compliqué !

— Ça l'est pour quelqu'un qui passe ses heures de maths à faire des nénuphars en origami !

— La faute à qui idiote ?!

Elle se reçoit un coup de cahier sur la tête et recommence bien malgré elle l'exercice de maths.

Ça ne fait qu'un heure qu'ils sont là, mais elle a déjà l'impression de progresser. Un peu. Mizuki n'est pas quelqu'un qui apprend des leçons, mais qui apprend de ses erreurs. Elle a besoin d'échouer pour comprendre comment réussir. Alors elle se concentre pour repérer ce qui ne va pas en comparant ses réponses avec les notes de Miya, et corrige petit à petit.

— C'est mieux ? demande-t-elle en tendant son cahier à Miya.

Elle lui est reconnaissante de prendre son temps après les cours pour travailler avec la slime qu'elle est. Elle sait que ce n'est pas bien, ce qu'elle fait en classe. Que les notes sont importantes, les cours aussi. Mais quand elle ne s'amuse pas, elle a du mal à rester concentrée. C'est peut-être pour ça qu'elle fait autant d'efforts maintenant, assise sur le plancher du salon de Miya.

Parce que c'est amusant d'apprendre les maths avec lui.

— C'est même largement mieux, la félicite-il, et Mizuki sourit parce qu'elle est contente de progresser grâce à ses conseils. Maintenant, recopie le reste de mes notes, on verra les exercices plus tard.

Mizuki déchante vite en tournant les pages de son cahier sans voir le bout de ses leçons. Elle est fatiguée rien qu'à l'idée de devoir tout réécrire. Mais elle sait qu'elle n'a pas le choix, alors elle s'exécute de bonne grâce. Miya a fini ses propres exercices, alors il lui demande s'il lui reste des carrés de papier colorés.

— Oui, j'en prends toujours beaucoup pour ne pas me retrouver en panne. Il doit m'en rester une vingtaine, pourquoi ?

— Puisque tu recopies mes notes, je me suis dit que je pourrais t'avancer dans la création des mille grues. Si ça ne t'embête pas que les grues ressemblent à des bouts de chiffons.

Mizuki rigole, et sort les papiers de son sac.

— T'inquiète, tes bouts de chiffons sont les plus beaux ! s'exclame-t-elle en lui tendant les feuilles multicolore.

Miya rougit, et gonfle les joues. Elle lui sourit et retourne à sa prise de notes.

La mère de Miya les observe discrètement depuis la cuisine, elle a l'air contente de les voir s'amuser. Tandis que Mizuki s'applique pour recopier à la lettre toutes les leçons de Miya dans son cahier, il achève sa première grue de couleur rose — elle est déjà beaucoup mieux que celle qu'il avait faite en classe avec Mizuki — et pioche un deuxième carré de papier.

— J'ai fini ! soupire Mizuki.

Elle est à bout et elle a mal au poignet, mais au moins, elle a réussi à rattraper les cours de maths. Miya a réalisé une petite dizaine de grues, et quand Mizuki le découvre, elle a des étoiles dans les yeux.

— T'as fait tout ça ?! Merci, ça m'avance beaucoup !

Miya hoche la tête et finit de plier la queue de la grue de couleur jaune. Mizuki sort son téléphone de sa poche, et écarquille les yeux en regardant l'heure.

— Il est super tard ! Mes parents doivent déjà être à la maison !

Elle se lève précipitamment et manque de tomber. Elle remet la veste de son uniforme et range son cahier dans son sac avant d'embarquer les grues de Miya. Il la suit jusqu'à l'entrée et elle est surprise en le voyant enfiler ses chaussures. Il lui dit qu'il va la raccompagner, elle sent son cœur se réchauffer et elle sourit.

La légende des mille gruesWhere stories live. Discover now