Chapitre 3

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   Quelques jours après la rencontre de ma famille d'accueil, je pus aller emménager avec eux. Je restais silencieux et timide, n'osant intervenir dans leur conversation sur le trajet pour aller chez eux. Ou plutôt... Chez nous. La complicité qu'ils avaient me rappelait la mienne, avec ma mère, et avec mon père, quand il était encore là pour nous réconforter. Je ne sais pas combien de temps nous avons roulé, ma tête étant remplie de questions. Allais-je aimer ma nouvelle maison ? Comment va maman ? Quand est-ce que je pourrais la revoir ? Et Emma ? Me passera-t-elle le bonjour, parfois ? Vais-je retourner à l'école ?

Des milliers de questions bourdonnaient dans mon esprit d'enfant, bien trop mûr pour mon âge. En seulement quelques temps et péripéties, mon intelligence s'était fortement développé, et je suis anormalement mature pour mon jeune âge. Je prenais plus vite conscience des choses, et avais un autre regard sur ce que nous apprenions. Je n'étais pas comme tous ces enfants qui pensent que leurs parents sont immortels, que leurs amis resteront à jamais à leurs côtés, et que leur bonheur durera éternellement. J'avais une vision beaucoup plus réaliste, et restais en retrait. Je n'ai jamais eu véritablement d'attirance sociable, je n'ai jamais eu le besoin d'avoir quelqu'un à mes côtés, hormis mes parents. Mais quand mon père est... décédé, j'ai refusé pendant longtemps de m'attacher à quelqu'un, car je connaissais déjà la douleur que cela nous produit quand on perd les personnes qui nous sont chers. J'ai connu la mort trop tôt. C'est pour ces raisons que j'étais souvent seul, à l'école, dans mon coin. J'ai développé une grande timidité, et on pourrait m'étiqueter comme « insociable ». Pour moi, ça n'est pas réellement le fait d'être insociable. Non... C'est simplement que je suis prudent et égoïste. Je ne voulais pas me rapprocher des autres pour souffrir encore. Mais cet éloignement me valut la réputation de « l'intello insociable ». Je n'y prêtais pas attention, mais cela me touchait contre mon gré. Ca n'est pas parce que quelqu'un s'assure un avenir en travaillant qu'il faut le viser et le mépriser, et ça n'est pas parce que quelqu'un ne va pas de lui-même vers les autres qu'il faut le discriminer et le dénigrer.

C'est dans mes pensées que la voiture s'arrêta, et que Lucy, ma « mère adoptive », ouvrit ma portière et m'aida à descendre. Sasha, ma « grande sœur », me prit délicatement la main et on se dirigea ensemble vers la porte d'entrée. C'était une maison de taille moyenne, jolie et agréable de l'extérieur. Il y avait beaucoup de fleurs aux fenêtres, et la porte donnait directement sur la rue. La maison était situé non loin de l'école primaire, où je me rendrais quelques jours plus tard. Il y avait ensuite le collège, où Sasha faisait sa dernière année, en troisième. James, mon « père », enfonça les clefs dans le serrure, et je pus enfin voir l'intérieur. Il emmena ma petite valise à l'intérieur, dans une belle entrée claire et lumineuse. C'était très moderne et contrastait beaucoup avec l'extérieur, mais tout aussi agréable. Je rentrai, hésitant, serrant un peu plus fort la main de Sasha au creux de la mienne. Elle dût le sentir car elle m'adressa un sourire rassurant. Puis Lucy déclara :

« Voilà ta nouvelle maison, Nolan ! J'espère que tu vas t'y plaire, mon petit. »

Elle accompagna ces paroles d'une caresse sur ma joue. James prit la parole :

« Sasha, tu lui fais visiter la maison ? Je vais préparer le repas en attendant, il est déjà 20H00. »

Son interlocutrice acquiesça et me guida à l'étage, jusqu'une pièce qui me servira désormais de chambre. Elle referma la porte derrière elle, et on s'assit sur le lit. Je n'osai pas bouger, prendre la parole, alors je me suis contenté d'observer la pièce. Elle était simple, blanche, avec des meubles, blancs également. Il y avait tout le nécessaire, sauf des couleurs. Je me cru de nouveau dans un hôpital. Je commençais à avoir peur quand ma sœur m'expliqua :

« Au début, les parents voulaient la décorer et en faire une chambre de « petit garçon », comme ils disent. Sauf que je m'y suis opposée. Je me suis dit que même si tu étais jeune, tu avais le droit de choisir, et de mettre ce qu'il te plaît dans cette pièce. C'est la tienne, fais-en ce que tu veux, je ne vois pas pourquoi tu devrais être dans une chambre qui ressemble à ceci, si toi tu aimes cela. »

J'ai le droit aussiWhere stories live. Discover now