Prologue

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Paris, Jeudi 22:30

On dit souvent que la nature est mère. Une mère ressent les choses, très souvent avant qu'elles n'arrivent. N'est-ce pas cela, quelque part, que le commun des mortels a appelé le sixième sens ?

Ce soir-là, le ciel avait revêtu son sombre manteau, et tandis que des éclairs le parcouraient, les gouttelettes d'eau sur les toits donnaient le ton. Écouter avec attention, on aurait dit une symphonie, une funeste symphonie.

L'horloge de la chambre d'hôpital 101 affichait 22:30.

♬ bip bip bip bip ...

Le moniteur s'affola et les infirmières également.

- Docteur, venez vite, on est en train de la perdre.

Un jeune homme, vêtu d'une blouse blanche, entra en trombe dans la chambre. L'agitation et l'inquiétude se lisaient sur son visage.

Semblait-il qu'il n'y ait maintenant plus d'espoir pour cette petite ? Était-ce son tour ?

- Préparez le défibrillateur et chargez à 200, ordonna-t-il en essayant de garder un semblant de calme.

« Est-ce donc la fin ? »

Il y avait ces flashs. Oui, des flashs de ma petite famille, ma seule amie et cette vie que j'avais vécue jusque-là. Les premières et, au regard des circonstances, les dernières fois. Les sentiments et les craintes. Un tout...

« C'est bien la fin ! Que faire si ce n'est de l'accepter. Pourtant, j'aurais aimé... tant aimé... un dernier Adieu. Maman ! Maman, je t'aime tellement.

J'aurais tant voulu... te dire que je ne t'en veux pas. Je ne t'en veux plus. »

« J'ai fait de mon... mieux. N'est-ce pas ? »

Sur cette dernière réflexion que la brise glaciale de cette nuit d'automne aurait pu emporter avec elle, le son du moniteur se fit plus continu, et une ligne fine se dessina à l'écran. Le silence qui se fit doucement dans cette chambre semblait pesant car tous petit à petit se pétrifiaient, tous à l'exception d'un seul.

- Non ! non, pas toi.

Le jeune docteur continuait... et continuait de faire un massage cardiaque. Comme un damné, il ne se résolut pas à arrêter...

- C'est... c'est trop tard docteur, réagit une infirmière.

- Faites-lui une injection de vasopressine et qu'est-ce que vous attendez pour recharger ce foutu défibrillateur ? Il ordonna encore une fois, mais personne n'osa bouger.

- Docteur, s'il vous plaît, reprit l'infirmière qui jusqu'alors tentait de le raisonner. Elle le tint par les épaules.

- Non, je t'en prie.

- Reprenez-vous, il le faut...

Il finit tristement par réaliser et lâcha prise. Lorsqu'il s'écroula contre un mur, le regard vide et les yeux embués, un sanglot lui serra la gorge. En relevant la tête, il fixa le corps sans vie de cette jeune femme qui, pensait-il, avait tant à vivre. L'infirmière s'agenouillant face à lui, lui fit ainsi donner le triste verdict final de tous médecins.

- Heure... heure du décès : 22:41. S'il vous plaît... sa mère, il articula avec peine la voix pleine de trémolos en se tenant à son bras.

La mort, comme dans tous les hôpitaux, longeait les couloirs. Alors, pourquoi celle-ci avait-elle intensément ému ? Pourquoi...?

Et lorsque le téléphone sonna, des pleurs perçaient le sombre ciel parisien. Les pleurs d'une mère inconsolable.Dehors, le temps virait à l'orage. La nature l'avait compris. Il y avait en tout cas dans l'air un sentiment de tristesse.

La pluie commença à tomber avec une intensité renouvelée, accompagnant le chagrin de cette nuit . Les rues de Paris, d'habitude si animées, semblaient désertes, plongées dans une tristesse muette, comme si elles partageaient le deuil de la jeune femme partie trop tôt.

Le jeune médecin, encore sous le choc de cette tragédie, se tenait immobile devant la fenêtre de l'hôpital, observant les gouttes de pluie glisser le long des vitres. Ses pensées étaient encombrées de questions sans réponses, de regrets et de doutes sur ses capacités à sauver des vies.

Pendant ce temps, dans une petite maison non loin de là, une mère pleurait le départ de sa fille bien-aimée. Elle était effondrée, les larmes inondant son visage ridé, et elle priait silencieusement pour que ce ne soit qu'un mauvais rêve. Mais hélas, la réalité était là, implacable.

Des souvenirs d'enfance remontèrent à la surface de ses pensées. Les moments passés ensemble, les rires partagés, les câlins réconfortants. Tout cela lui manquait déjà, et elle ne pouvait s'empêcher de se demander si elle aurait pu faire quelque chose de plus pour éviter cette tragédie.

Le jeune médecin avait décidé de se rendre à la maison de la mère pour lui présenter ses condoléances. Il se sentait responsable de cette perte et voulait être là pour elle dans ce moment douloureux. C'était la première fois qu'il était si profondément affecté par la perte d'un patient.

Lorsqu'il arriva, il fut accueilli par les sanglots de la mère qui ouvrit la porte. Leurs regards se croisèrent, et il vit dans les yeux de cette femme la douleur incommensurable d'avoir perdu un être cher.

- Madame, je suis désolé, je...

Mais les mots lui manquaient. Comment pouvait-il exprimer sa peine, sa culpabilité et son impuissance face à cette tragédie ?

La mère, malgré sa douleur, le comprit. Elle posa une main réconfortante sur son épaule.

- Ce n'est pas votre faute, docteur, dit-elle d'une voix douce et épuisée. Vous avez tout fait pour la sauver, mais son heure était venue.

Le médecin baissa les yeux, submergé par l'émotion. Il se sentait soulagé d'entendre ces mots de pardon, mais le poids de la perte restait présent.

La mère lui demanda de s'asseoir, et ils partagèrent des souvenirs de la jeune femme partie trop tôt. Elle lui raconta à quel point sa fille avait été aimante, pleine de vie et d'espoir, mais aussi sensible et profondément connectée aux autres.

- Elle avait quelque chose de spécial, murmura le médecin. Ses yeux... Ils reflétaient l'essence même de la vie.

- Oui, c'était une âme bienveillante, répondit la mère en essuyant ses larmes. Et vous avez été là pour elle jusqu'à la fin.

Dans cette maison emplie de tristesse, la mère et le médecin trouvèrent une force nouvelle, une compréhension mutuelle qui les aiderait à traverser cette épreuve. Car la vie, aussi douloureuse soit-elle parfois, continuait son chemin, telle une symphonie qui mêlait les notes joyeuses et tragiques, dans un éternel ballet d'émotions et de destinées.

SOUS LES GOUTTES DE PARISOù les histoires vivent. Découvrez maintenant