18 - Travestie

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Lorsque je rentre ce soir-là, Roméo est dans le canapé, sur son portable, l'air absorbé. Je me débarrasse de mes chaussures.

Son absence de réaction m'intrigue.

Qu'est-ce que tu fais ?

Roméo ne lève pas les yeux.

Je suis sur une application que m'a conseillé un client de la box.

Il n'en dit pas plus, et je tique.

Quel genre d'application ?

Pour faire des rencontres.

Il dit ça d'un air nonchalant, mais à l'intérieur de moi, mes entrailles tremblent.

Des rencontres ?

Finalement il lève la tête et a un soupir.

Ça fait plus d'un an que je n'ai pas été en couple.

Et Chris Hemsworth ?

Il m'adresse un léger sourire.

Il n'a malheureusement toujours pas sonné à ma porte.

Je me mords la lèvre.

Ça te manque ?

Ma question est idiote. En réalité ce que j'ai envie de dire c'est plutôt : je ne te suffis pas ?

Oui, admet-il. Les flirts en boîte ou dans les bars, ça ne donne rien de concret, ça ne me convient pas.

Le sujet est sensible. Sans doute autant pour lui que pour moi. Je suis en train d'avancer sur un terrain inconnu et glissant.

Tu sais, les sites de rencontre, ça n'est pas très fiable, tu ne sais pas sur qui tu tombes, un fou ou un malade. Il y a 65% de chance pour que ce soit un psychopathe ou quelqu'un de mal intentionné.

C'est un chiffre que je viens d'inventer.

Roméo s'en amuse.

Ce n'est pas un énième site de rencontre. En fait ce sont des rencontres en groupe, auxquelles on s'inscrit en fonction d'un thème ou d'une ambiance, ou d'une activité... C'est beaucoup moins formel qu'un tête-à-tête avec un inconnu ou tu cibles tes questions pour savoir si ça peut matcher rapidement. Je trouve que c'est plus naturel.

Plus naturel... après tout qu'est-ce que j'en sais ? Est-ce que je suis vraiment bien placée pour décréter ce qui est naturel ou pas ?

Ça reste artificiel.

J'ai quand même envie de tenter. Au moins une fois.

Je joue la carte de l'émotion.

— Je ne suis pas rassurée pour toi.

C'est juste une soirée dans un bar réservé, avec karaoké. On peut difficilement moins faire dangereux.

Tu n'as jamais entendu parler de Kang Ho-soon, qui choisissait ses victimes dans des bars de karaoké.

Qui ?

Kang Ho-soon. C'était un fait divers qui s'est passé en Corée du Sud.

Il secoue la tête l'air visiblement toujours amusé de me voir jouer les filles protectrices.

Ne t'inquiète pas pour moi, Ali. En cas de problème j'ai ton numéro, tu pourras voler à mon secours.

Je ne dis plus rien pour le restant de la soirée. C'est affreux.

Le syndrome RoméoOù les histoires vivent. Découvrez maintenant