Chapitre 1

5.3K 204 196
                                    

Victoria

5 Via della Grande Stella.

Le petit bout de papier où y est noté l'adresse -le seul indice que j'ai pour le moment- se froisse et défroisse entre mes poings tremblants.

D'adrénaline, pas de peur.

Cette émotion m'a quitter depuis longtemps. Je ne redoute plus rien depuis l'incident. Parce que le pire des cas, serait de mourir. De quitter la terre dans l'insignifiance, et de finir par être oublier de tout le monde.

Or, la mort ne m'effraie pas. Plus. Au contraire, je l'attends avec impatience, pour pouvoir retrouver la personne que j'aime le plus au monde.

Reposant mon front contre le guidon brûlant de ma voiture, une vielle fiat 500 noire que mon meilleur ami m'avait vendu pour une centaine d'euros, je me demande si je ne ferais pas mieux de faire demi-tour pour retourner au bar dans lequel je travaille et faire quelques heures supplémentaires. Il me les fallait, ces quelques pourboires en plus. J'en avais plus besoin que je ne voulais l'admettre.

Non, pensé-je. Je n'as pas le droit de reculer, alors que je suis si près du but. Il aurait voulu que je lui rende justice. Et c'est ce que je comptais faire, quoi qu'il en coûte.

Prenant mon courage à deux mains, je vérifie une dernière fois dans le miroir du pare-soleil mon rouge à lèvre à la couleur de sang, avant de sortir de mon auto.

L'habituelle fine brise des soirs d'Italie fouette mes jambes et mes bras dénudés, alors que je me dirige d'un pas assuré vers l'immense grille de clôture aux extrémités pointues, de l'autre côté du trottoir.

Mes escarpins beiges Louboutin, l'une des seules paires que j'ai gardé et non vendue après l'accident, claquent sur le bitume propre de la rue.

Je pourrais finir sans domicile fixe, à cause du manque d'argent qui me guettait, pour rien au monde je ne me séparerai de ces chaussures.

Deux gardes armés, tout deux vêtus de costumes noirs impeccablement repassés sont postés de part et d'autres du portail en fer forgé, représentant la seule entrée possible d'accès à la somptueuse  résidence privée.

Qui est aussi blindé pour habiter dans une aussi grande propriété, nom de Dieu ?

- Buonasera, messieurs. J'aimerais parler au propriétaire de la demeure.

Aussitôt que j'ai finis ma phrase, les deux hommes à la carrure digne de bodybuilders braquent leur fusilles d'assault sur moi. Et merde.

- Vous êtes qui, vous ? me crache l'un d'eux, me toisant d'un regard méprisant de la tête au pieds.

La reine d'angleterre, espèce d'idiot.

Je serre les poings, me retenant de lui faire un geste obscène droit dans la figure.

- Ce doit être l'une des prostituées, spécule l'autre garde à son camarade, ses yeux suivants la courbe de ma poitrine compressée dans mon débardeur ridiculement fin, et de ma jupe trop courte, couvrant à peine la moitié de mes cuisses.

Il a raison : ma tenue de travail ressemblait à celle d'une salope.

Toutefois, je n'avais pas le luxe de décider de mon uniforme lorsque j'étais payée dix euros de l'heure pour servir de l'alcool et des faux sourires à de vieux pervers qui ne venaient au bar que pour mater le cul des serveuses.

𝐅𝐥𝐞𝐮𝐫𝐬 𝐝'𝐄𝐬𝐩𝐨𝐢𝐫Où les histoires vivent. Découvrez maintenant