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Ses poumons étreignent la flaque pourpre qui goutte à sa bouche, et, entre deux respirations étouffées de gémissements, avalent les effluves atrabilaires qui annihilent son cœur.

Deux paires de bottes salies rient entre ses côtes, il est ridicule, terré sous l'asphalte, brûlé par les larmes et les cris.

On crache sur un triel de voyelles frêles, on emmêle de belles ailes dans un ciel mortel. C'est la mélancolie irréelle qui élogie le sommeil éternel, car des lèvres délavent dans la ruelle :
— SOCRATE est elle ?

Tailler son passage dans la peau d'un homme et s'en aller, fringuant du sang qui cire les chaussures et léchant les égratignures sur les poings ; deux bourreaux de premières, deux simplets qui aimeraient être quelqu'un.

SOCRATE voudrait n'être personne, ou un peu plus qu'un corps en pierre, sculpté de péchés et brisé de vices ; il est encore gamin pourtant, dix-sept ans et c'est peut-être la cruauté des enfants qui le blesse.

Parfois, il n'y que les regards caustiques qui font frissonner, par lesquels on entend « la pluie des enfers ne prend rien d'autre que les âmes bousillées, esquintées des oublis de prière », et d'autre fois on lui casse la gueule, en espérant que la mort vienne le tirer par les pieds.

SOCRATE ne se rappelle plus qu'il a un dieu, il ne sait que tracer l'élégie de ses songes en pensant être un intellectuel. Il fait ses messes seul avec ses livres et ses écrits, et oublie de joindre ses mains pour mutiler son athéisme.

Il nage souvent dans les ivraies, aux coups de seize à dix-huit heures, à se lester des roses en pleurant des amarantes, amoureux des champs torturés de sa peine. SOCRATE ne fait rien d'autre qu'attendre la tendresse d'entre la vulgarité, il rêve de douceur.

À dix heure, c'est plutôt la ville, son crâne fracassé contre les plaques d'égout et la semelle collée aux dents ; puis la solitude le frappe aussi. C'est moins romantique que le salut des cieux, et moins poétique de regarder les propagandes déchirées du mur d'en face en espérant qu'Éros se dessine (au moins mieux que Laïus).

Mais rien, jamais une ombre un peu plus claire que ses idées. SOCRATE n'est qu'un idiot qui aurait déjà dû se laisser charmer par ses vertiges, et embrasser la seule femme de sa vie.

brûler la paixWhere stories live. Discover now