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Dans le calme de la salle de bain fermée mais non verrouillée, l'eau tiède frappant doucement les parois du bac à douche et la peau collante de transpiration d'Izuku, un silence anormalement apaisé règne dans l'espace clos. 
Sous le jet à la température raisonnable, il inspire profondément avant de passer sa tête sous les gouttes, mouillant ses cheveux et son visage tout en passant ses mains entre ses mèches. 
Soufflant par le nez, il laisse le confort s'inviter le long de son dos, chatouillant un peu ses abdominaux et la peau chaude de ses bras. 

Les yeux fermés pour éviter que le calcaire ne lui brûle les paupières, il s'applique à respirer tranquillement quand l'eau s'aplatit sur les rougeurs de ses cuisses, réveillant la sensation d'inconfort et une douleur légère le long de ses jambes. 
Le contact le fait toujours grimacer quand, hors de ses crises, il reste suffisamment conscient pour ressentir les blessures et les cicatrices plantées dans sa chair. 
Certaines d'entre elles ne disparaitront pas, il les reconnait à la profondeur des lignes imprimées entre les rougeurs persistantes, mais il s'efforce de ne pas leur accorder trop d'importance. 
Il sait à quel point le moindre détail pourrait le faire basculer dans un de ces éclats de folie passagère, et il se doit de rester concentré. 

Alors, relevant le menton, il secoue son visage pour chasser un peu d'eau et ouvrir ses yeux, cherchant sur l'étagère un flacon de gel douche. 
Mesuré, il serre les dents en appliquant juste la quantité nécessaire dans la paume de sa main et, même si son cœur s'emballe un peu, il s'emploie férocement à ne pas dépasser les bornes. 
Ses pensées s'auto rassurent, répétant en boucle des appels à l'apaisement, et un murmure glisse entre ses lèvres quand il fait mousser sa peau sous ses doigts. 

_ Il n'y a rien, tout va bien. 

Se parler à lui même, si ça ne fonctionne pas à tout le coup, a malgré tout déjà fait ses preuves quelques fois, et les chuchotements qu'il se prononce parviennent à lui faire garder les pieds sur terre la plupart du temps. 
Un soulèvement dans sa poitrine fait vibrer ses côtes quand il contourne les plaies de ses cuisses, évitant de presser les blessures pour ne pas les raviver, et un tremblement incertain lui tord le ventre. 

Une angoisse qu'il connait souffle une menace près de ses tympans, ses épaules se contractent aussitôt, et son front s'abaisse un peu plus comme s'il cherchait à enfoncer son menton au dessus de son sternum. 
Il sait qu'il doit rester calme, il faut juste qu'il respire, et qu'il contrôle le geste de ses ongles qui cherchent à se planter dans sa peau. 
Sa gorge siffle à sa respiration instable, ses poumons vacillent et il les sent peiner à transporter l'oxygène à travers son corps, la panique barrant le passage à toutes ses bonnes intentions. 

Les mains pleines de mousses, il vient s'accrocher au mitigeur de la cabine, serrant le métal en luttant contre lui même. 
Près de sa nuque, les chimères menaçantes lui susurrent de faire grimper la température, juste un peu.
Un tour de poignet, quelques degrés ne le tueront pas, et il peut bien faire ça. 
Katsuki ne s'en rendra pas compte s'il fait un peu attention, et s'il se dépêche, il pourra même griffer son corps une fois ou deux sans éveiller de soupçons. 
Entre ses deux mâchoires crispées, ses dents grincent les unes contre les autres, et son souffle se bloque en même temps qu'il relève subitement la tête, cognant légèrement son crâne contre la paroi derrière lui. 

_ Aller ! s'encourage t-il lui même avant de lâcher le mitigeur pour rincer sa peau sans perdre le contrôle. 

L'eau restée tiède emporte la mousse de son corps sur son passage, la douleur insidieuse de ses jambes pulse toujours, mais la crispation de ses muscles semble parvenir à tenir le cap pour les quelques secondes qu'il reste, supportant de toutes ses forces les tentations mauvaises qui sifflent à son esprit. 
Puis, voyant qu'il ne lui reste plus aucun résidus de gel douche sur le corps, et une fois ses cheveux parfaitement propres à leur tour, il s'empresse de quitter ce lieu de torture en attrapant une serviette à la volée. 

Breαthe meOù les histoires vivent. Découvrez maintenant