Chapitre 2

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Raphaël

Être adulte, ça craint.

J’ai eu la vie dure et l’habitude de tout prendre sur moi, d’être fort et de ne jamais me plaindre s’est installé. Pour mon père, je ne suis qu’un moins-que-rien et un faible de bas étage. Je n’ai jamais eu l’occasion de lui prouver qu’il se trompait lourdement sur mon compte. Au final, je sais mieux que quiconque qu’une famille n’est qu’une bande d’hypocrites, pompant tout ce qu’ils peuvent amasser sans le moindre scrupule. Ils me dégoûtent, tout autant qu’ils sont.

J’ai commencé à me battre à l'âge de cinq ans, mon père cherchait à tout prix une sorte de guerrier et Rose, ma mère, n’a jamais imposé l’arrêt de toute cette folie. Que ce soit parce qu’elle ne m’aime pas ou qu’elle se fout de ce qui peut m’arriver, une partie de moi ne cesse de la haïr. J’ai été relégué à devoir protéger mon petit frère au péril de ma vie, sans la moindre considération de sa part, sauf un regard méprisant. Mon père, malgré sa maladresse, m’a poussé à devenir plus fort.

Puis, les années ont passé et le désir de vouloir la paix est devenu mon principal objectif. C’était une bonne raison pour arrêter tout ça, à présent, il m’arrive de me demander si ce n’est pas fait exprès.

Tout me tombe sur la gueule.

Pour commencer, mon meilleur ami est porté disparu. Tom, ce petit gringalet de vingt-trois ans, incapable de faire du mal à une mouche, a été enlevé il y a trois semaines. Je l’ai rencontré dans un restaurant, il bredouillait des excuses à la serveuse, car il n’avait pas de quoi payer l’entièreté de ce qu’il avait consommé. En bon prince, je n'avais pas hésité à régler la note et, en sortant de l'établissement, une nouvelle amitié avait vu le jour.

Je ne pensais pas que ma situation puisse s’aggraver, cependant, un appel venant de ma mère bouleverse tout.
Mon père est mort et je dois rentrer à la maison. Si m’éloigner de Clearwater avait été une bénédiction, revenir dans cet endroit deviens une putain de malédiction. Le message a eu du mal à être digéré. Je suis resté plusieurs minutes l’esprit vide, incapable de parler, de ni penser. La situation est ironique. Je me suis souvenu de la promesse faite à mon père il y a des années de ça, comme un flash et je ne sais pas si je dois rire ou pleurer.
Je dois donc abandonner les recherches, laissant Tom derrière moi. Je suis anxieux à mourir, incapable d’ignorer cette boule au fond de mes tripes qui me hurle de continuer les investigations.

C’est donc l’esprit voilé de pensées négatives que j’ai pris le premier vol pour la Colombie-Britannique. Au début, j’ai pensé pouvoir gérer la pression. C’est un stress que je connais depuis longtemps et je suis conscient que les gens meurent tous les jours. Il a fallu que je m’en fasse une raison. Ce n’est pourtant pas la même chose lorsque ça touche quelqu’un de son entourage.

J’en suis là maintenant.

Debout dans cette chambre miteuse, à quelques kilomètres de la ville, j’y jette un regard circulaire. Elle est banale, composée d’une couchette, d’un bureau et d’une étagère. C’était suffisant pour cette nuit, ça m’a permis de reprendre des forces après le long voyage parcouru. Je passe une main lasse dans mes cheveux et en détournant le regard, je fais attention aux messages qui s'affichent sur mon téléphone portable.

Rose - c’est aujourd’hui pour midi dépêche-toi

Ignorant le message, je range mon téléphone d’un geste distrait dans ma poche arrière et m’étire. Il ne m’a fallu que cinq minutes pour quitter ce motel, mes sacs me cillant la peau, accentuant ma carrure déjà imposante. Longeant la grande route reliant Kamloop à Clearwater, j’inspire l’air frais et boisé si commune de la région. Ça n’a rien à voir avec la Californie, j’habite à Santa Monica et le cadre est totalement opposé à ma ville natale. Ça me fait bizarre de revenir. Après sept ans, ça n’a pas bougé.

RED EYES - La malédiction du chasseur - TOME 1 [PUBLIÉ AMAZON]حيث تعيش القصص. اكتشف الآن