Chapitre 8

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Je passai par la porte entrouverte de la chambre numéro 13 et vis les deux filles, qui, comme d'habitude, parlaient entre elles. Fanny partit dans la salle de bain donc j'en profitai pour engager la conversation avec Carla :
« Vous avez fait quoi ? »

Carla me regarda de haut en bas, puis de bas en haut et leva les yeux au ciel avant de me tourner le dos et de suivre Fanny dans la salle de bain. Je les entendis chuchoter, puis éclater de rire et Fanny se pencha pour attraper la poignée de la porte et la fermer.

Je ne savais plus quoi faire. Est-ce que je devais réagir ? Est-ce que je devais en parler aux animateurs ? Est-ce que je ne devais rien faire ? Chaque décision n'allait de toute façon pas être la bonne et quoi que je fasse ça allait me retomber dessus ; que je le veuille ou non.

« Le temps met tout le monde à sa place : chaque roi sur son trône et chaque clown dans son cirque. »
Cette citation sur laquelle j'étais tombée un mois plus tôt m'était revenue à l'esprit. Je la trouvais plutôt motivante. En fait, j'ai toujours été une grande fan des citations. Leur précision était inspirante et ça a toujours été pour moi un exemple à suivre. Sauf que je n'étais pas une reine. Même pas le niveau en dessous. Je n'étais rien. Elles ? Elles étaient peut-être les clowns de cette citation. Je ne savais pas ce que c'était censé représenter mais non, elles n'étaient pas les plus sympathiques ; de là à les considérer comme des clowns ? Je n'en suis pas si sûre. Une fois le séjour terminé, quand ça ne sera plus moi, ça sera les autres. Pestes un jour, pestes toujours, ce n'est pas comme ça qu'on dit ? En tout cas, moi, je n'étais pas prête d'aller bien loin. J'avais peur de tout. J'avais peur des autres, j'avais peur de l'erreur, j'avais peur du changement. J'avais l'impression que, malgré le fait que je donne le meilleur de moi-même pour réussir et que je fasse des d'efforts, je n'allais en fait pas si loin. Ils ne servaient à rien. Ne menaient à rien. C'était des efforts en vain.

L'après-midi passa,
La soirée passa,
Le temps était bien trop long.

Je mangeai dans mon coin, puis me levai en direction de la chambre. Croyez-moi, je n'allais pas tenir les deux semaines à ce rythme.

Avant d'ouvrir la porte pour sortir du self, j'entendis une voix d'animateur m'appeler. Je me retournai et vis que c'était le même qui m'avait défendu tout à l'heure. Pas Alexandre, l'autre. Il n'avait jamais évoqué son nom auparavant, donc ça restera pour moi "Lanimateurquimadéfendueetquinestpasalexandre". Simple et efficace.

-Oui ? répondis-je.
Il s'approcha de moi en me tendant une feuille. Je la pris et découvris ce qu'il y avait marqué dessus. Il y était griffonné quelques mots comme : "vitres", "sol du couloir", "self" et "cuisine". Je compris très vite ce que ça signifiait.

-Voilà ce que tu dois faire ce soir, m'expliqua-t-il. Tout le reste de l'équipe est désolé, on se doute tous que tu n'as juste vraiment rien entendu, mais Clotilde ne veut rien savoir. En tout cas, on est de ton côté.
-Merci, déclarai-je, mais j'ai une question.
-Je t'en prie.
-Pourquoi personne ne m'a réveillée ce matin ? Je ne comprends pas. Personne n'a remarqué mon absence ?
-On a toqué à toutes les portes, tu devais être dans un sommeil trop profond et Fanny est venue nous ouvrir. On pensait qu'elle se chargerait de te réveiller. Apparemment non... Et effectivement, nous n'avions pas remarqué ton absence directement. L'appel a été effectué et quelqu'un a dû répondre à ta place. Puis, nous sommes passés dans les rangées du bus et avons vu qu'il nous restait un sandwich en trop. Par conséquent, il manquait quelqu'un. Nous avons alors refait un appel en demandant de lever la main pour qu'on repère la personne appelée à chaque nom, et cette fois, tu n'y étais plus. On a donc dû rentrer au plus vite pour te revoir et Arthur s'est chargé de leur faire une petite leçon de morale dans le bus.

Je compris par là qu'Arthur devait être le troisième animateur avec qui je n'avais jamais parlé.

-D'accord je comprends mieux, merci, avais-je conclu avant de repartir à l'étage.

La soirée prit fin, l'heure de nettoyage pour moi approchait. Aux alentours de 21 heures, je partis dans ma tournée du soir. D'abord au self, où il restait Aurélie et "Lanimateurquimadéfendueetquinestpasalexandre" qui parlaient. Quand ils me virent arriver, ils se turent aussitôt.

-Euh, vous voulez que je repasse plus tard ? bégayai-je, confuse.
-Non, non, c'est bon, rigola nerveusement Aurélie. On y allait de toute façon.

C'était faux, quand j'étais arrivée ils n'avaient pas du tout l'air sur le point de quitter le self. Mais que voulez-vous ? Ça m'importait peu, tant que je pouvais avoir accès au self sans problème.

Après avoir nettoyé tout ce qu'il y avait sur la liste, j'ouvris la porte de ma chambre : la numéro 13. Elle donnait une vue directe sur mon lit et je compris directement. Il y avait mes vêtements, mes robes, mes affaires de toilette, mon livre, mes chaussures, mes serviettes, mon maillot-de-bain et toutes les bricoles qui m'appartenaient étalées dessus. Carnage.

-Je, c'est quoi tout ça ?
Carla arriva en premier, suivie de Fanny.
-Tes affaires, dit l'une.
-Tu prenais trop de place dans le placard, dit l'autre.
-Bonne nuit, surtout.

Bonjour !
Je m'excuse d'avance, il n'y avait pas Dylan dans ce chapitre. Mais tenez-vous prêts et prêtes car il arrive dès le prochain !

Bonne lecture !

Cet espace entre nous - Dylan O'BrienOù les histoires vivent. Découvrez maintenant