VIII

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     De toute ma vie, je n'aurais jamais cru venir de mon plein gré à Marijoie.

     Pourtant, cachée sous une casquette de la Marine, une tonne de maquillage et quelques artifices, j'étais bel et bien là, le menton levé fièrement, mais le cœur battant à toute vitesse. Qui aurait cru qu'un jour, je regarderai un haut dignitaire de la Marine dans les yeux et que, après que je lui ai énoncé mon nom - faux, bien sûr - d'une voix ferme et sans crainte, il me laisserait pénétrer dans le lieu le mieux gardé du monde entier?

     La traversée de Red Port m'avait déjà donnée la nausée, en raison des regards des riches de ce monde qui ne semblaient pas apprécier la présence de vulgaires soldats, mais également parce que j'avais peur d'être démasquée à chaque instant. Le Cipher Pol n'était jamais très loin derrière-moi et, même en blonde avec des lentilles vertes, je pouvais être reconnue par les membres de l'organisation. Pourtant, et aussi étonnant que cela puisse paraître, Garp nous mena jusqu'au bondola sans accroche et, bien que les agents nous lancèrent des regards presque hostiles, on nous laissa passer sans histoire.

- Arrête de regarder partout autour de toi, conseilla Sabo à Chopper. Tu as l'air nerveux.

- Parce que je suis nerveux.

     En fait, nous l'étions tous. Même Garp, Koby et Hermep. Si nous étions démasqués, ils seraient dans de beaux draps. Et nous aussi. Mais nous avions pris beaucoup de dispositions pour changer d'apparence, et je voulais croire que notre opération allait être une réussite. Nous avions tous changé de couleur de cheveux et d'yeux. À vrai dire, cette étape avait été la plus simple de notre transformation. Et peut-être même la plus amusante : nous avions écrit des couleurs sur des petits papiers que nous avions placés dans un bol, et chacun en avait tiré un. Ainsi, Sabo s'était retrouvé avec des cheveux bleus clairs, Koala avait tiré le vert, Zoro le blanc et moi, j'avais hérité d'un blond-roux qui ne rendait pas très bien sur mes cheveux d'habitude sombres. Ensuite, nous avions pioché dans les lentilles que nous avions sous la main, mais les couleurs étaient plus classiques, noir et bleu pour les Révolutionnaires, vert pour moi, et bleu azur pour Zoro. Avec ses cheveux clairs et sa peau halée, c'était un vrai contraste avec ses nouveaux yeux couleur de ciel. Il était à tomber par terre, même comme ça. J'avais envie de lui arracher son foutu uniforme de la Marine pour voir si son corps entier allait avec ses nouvelles couleurs.

     Mais je m'égarais.

- Tu n'as rien à craindre, le rassura le Révolutionnaires.

- Un peu, quand même, intervint Hermep.

- On t'a pas sonné, toi, grogna Koby qui tremblait comme une feuille. 

- Ça suffit vous trois, leur dit Zoro. Chopper, si tu as peur, je te protégerai.

     Comme j'aurais aimé qu'il me dise la même chose!

- Et moi, tu me protégera, hein, Zoro? Demanda Koby en lui attrapant le bras.

- Tu rigoles? Un pirate qui protège un futur Amiral, c'est la honte.

     Mais Koby était bien trop effrayé pour prendre note du compliment. À la place, il se mit à sangloter comme un nouveau né et à secouer Zoro comme un prunier, le suppliant de le protéger. J'étais d'ailleurs à deux doigts de faire pareil, tant j'avais peur. Comme l'avais très justement souligné Sabo il y a quelques jours, les Dragons Célestes étaient d'un tout autre niveau que le gouvernement, que nous avions l'habitude d'affronter. Nous avions défié le CP-9, affronté des Amiraux et des Vice-Amiraux ainsi que des centaines de soldats, mais je n'avais jamais eu aussi peur qu'en ce jour. Là, nous entrions en plein cœur du territoire ennemi.

Pour le capitaineWhere stories live. Discover now