Chapitre 8 - Philadelphie, Pennsylvanie

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Je hurle. Je hurle à en perdre la voix. Mes cordes vocales sont en feux. Cramponnée sur la chaise où je suis attachée depuis des heures, je hurle. Des larmes salées dévalent mon visage, venant s'échouer lamentablement dans le creux de ma nuque. Quelques mèches de cheveux, trempées de sueurs, restent collées à mes joues. Je n'ai plus mes chaussures et mes pieds nus s'agitent alors qu'il appuie encore et encore sur la plaie de mon bras.

Lui ?

Je ne connais pas son identité. Caché dans un coin de la pièce, il m'est tombé dessus moins d'une seconde après mon arrivée. Il est grand, bien plus grand que moi. Il m'a été impossible de rivaliser avec sa carrure. Pourtant, je me suis débattue comme une lionne, les traces de griffures sur ses bras et dans son cou peuvent en témoigner.

En réalité, il ne m'a pas fait mal. Il m'a certes, brusqué, et demain des dizaines de bleus viendront colorer ma peau mais, il ne m'a pas touché. Du moins pas plus que la plaie que ce gringo m'a infligée il y a quelques semaines et dont, ce nouveau, prend un malin plaisir à appuyer dessus. Je sais qu'ils cherchent à me faire peur et je dois dire, qu'ils ont réussi. Alors qu'il me levait mes chaussures et me ficelait autour de cette chaise, de vraies larmes se sont échappées de mes yeux. Pendant un instant, j'ai vu ma vie défiler et les atrocités commises à l'Atelier me sont revenues en pleine figure. J'allais subir les mêmes choses.

Visiblement j'avais tort, la torture ne fait pas partie des plans de ce connard. Lui, ce qu'il préfère c'est la torture mentale. Et me laisser seule avec un homme, masqué, dont je ne peux apercevoir que ses yeux marron, semble être une excellente idée. En revanche, ce qu'il ne sait pas, c'est que je suis capable de jouer n'importe quel rôle. Ce n'est pas pour rien qu'au collège, on me donnait toujours celui principal dans les pièces de théâtre. Alors, imiter une jeune femme, kidnappée et apeurée est un jeu d'enfant.

Je renifle fortement, alors que je sens un liquide chaud couler de ma narine. Je suis prête à tout mais, par dignité, je les ferai payer. Tous autant qu'ils sont.

_Essuie lui le nez.

Dans l'embrasure de la porte, la silhouette de ce gringo se découpe. Immobile, il me fixe, alors que je me laisse me faire moucher. Oh ma putain de dignité.

_Laisse nous.

L'homme s'efface, nous laissant seul.

_C'est ce que tu entendais par se faire confiance ? Je grimace alors que la douleur dans mon bras se réveille.

Silencieusement, il attrape une chaise et s'installe à califourchon dessus, au plus près de moi. Son parfum m'enveloppe et je me retiens de le humer à plein poumon.

_Pourquoi tu as fait ça ? Je gémis.

Il ne répond rien, se contentant de me regarder, menton posé sur ses poings.

_Pourquoi ?

Un hoquet m'échappe et pour le coup, je ne sais plus s'il est réel ou non. Mon corps semble m'abandonner, comme relaxé auprès de cet homme. Sa présence me rassure autant qu'elle me fait peur. Je suis persuadée qu'il est beaucoup moins imprévisible qu'Amor. Dur et intransigeant oui. Psychopathe. Non. Pourtant, je ne connais rien de lui et m'avancer sur des suppositions ne m'emmèneront nulle part, si ce n'est à ma perte. Je ne peux pas le risquer. Surtout qu'il ne sait pas d'où je viens et pourquoi je suis là. Et le jour où il le découvrira, peut-être, que sa colère sera telle, qu'il emploiera des moyens beaucoup plus sanglant.

Sa main se tend et je me fige, rejetant mon buste en arrière. Délicatement, ses doigts viennent effleurer ma joue, déplaçant mes cheveux collés. Ce geste, à l'opposé de sa personnalité, me fait flancher et je ne peux empêcher les remous dans mon ventre.

Los Encantadores [Terminé]Where stories live. Discover now