Mondialisation culturelle : les nouvelles stratégies du studio Ghibli

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j'ai tenté une analyse des nouvelles stratégies du studio, mais j'ai dû me soumettre aux consignes (quelque peu caricaturales) de mon professeur de mondialisation culturelle. Ce serait à modifier et à creuser, mais je le laisse ici, pour l'instant...

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Le 1er novembre 2022, dans le parc d'expositions d'Aichi à Nagakute (Japon), a eu lieu l'inauguration du « Ghibli Park », basé sur le studio créé par Hayao Miyazaki et Isao Takahata. Plus grande attraction Ghibli jamais construite, il signe un renouvellement du studio et sa mondialisation.

Fondé en 1985 par d'anciens de la major Toei, le studio Ghibli s'était donné pour but de faire souffler « un vent nouveau » sur l'animation japonaise. Quelques temps plus tard, le studio était reconnu dans le monde entier, et ses diverses incarnations – noiraudes de Mon Voisin Totoro, Calcifer du Château Ambulant... – devenues des symboles de pop culture, au même titre que les héros Marvel ou les princesses Disney. Devant désormais faire face à la retraite (sans cesse repoussée) d'Hayao Miyazaki, ainsi qu'au décès d'Isao Takahata en 2018, le studio a depuis quelques années mis en place une politique d'ouverture à la convergence ; qui n'est pas sans rentrer en conflit avec les premiers objectifs du studio, attaché à son indépendance. Ainsi, la mondialisation du studio Ghibli donne lieu à des négociations entre culture occidentale et japon ; marchandisation et indépendance.

Dans quelle mesure la mondialisation du studio Ghibli est-elle le lieu d'une négociation permanente avec les standards de l'industrie ?

Dans un premier temps, nous montrerons comment le studio, riche d'inspirations occidentales, s'est fait connaître dans le monde, puis s'est ouvert à la convergence. Puis nous montrerons que cette mondialisation est à l'origine de conflits et d'un certain choc des cultures ; avant de décrire comment le studio a, depuis ses débuts, mis en place des logiques glocales.

Bien que le studio Ghibli soit fondamentalement japonais (son siège social est à Koganei, dans la préfecture de Tokyô), il s'est en partie construit à partir de références occidentales. Dans son organisation, d'abord : Ghibli a la particularité, dans un pays qui produit principalement des séries animées ou des OAV (miniséries produites pour la vidéo), de se concentrer sur le long-métrage. Par ailleurs, il refuse le principe de l'animation limitée, norme technique mise en place depuis les années 1960, et qui permet de produire du dessin animé à moindre coût, en réduisant le nombre d'images par exemple : Ghibli préfère en effet une animation plus poussée, réalisée par des animateurs salariés, et non en free-lance, comme c'est plus souvent le cas dans l'industrie japonaise. Ces stratégies héritent en partie de l'animation d'auteur européenne ; de même que le studio a de nombreuses inspirations occidentales. Ainsi, Isao Takahata, passionné de Jacques Prévert et de son film réalisé avec Paul Grimault Le Roi et l'Oiseau (1953), a suivi un cursus en littérature française. Quant à Hayao Miyazaki, ses goûts sont cosmopolites : parmi ses films et livres préférés, on retrouve le film d'animation russe La Reine des Neiges (Lev Atamanov, 1957) aussi bien que le blockbuster Les dents de la mer de Steven Spielberg (1975), Alice au pays des merveilles (Lewis Caroll, 1865), Le Petit Prince (Antoine de Saint-Exupéry, 1943), ou encore Le Sorcier de Terremer (Ursula K. le Guin, 1968). Ainsi, le studio Ghibli a régulièrement adapté des œuvres occidentales ou représenté l'Europe dans ses films. On citera par exemple les films de Hayao Miyazaki Kiki la petite sorcière (1989), Le Château Ambulant (2005) ; mais aussi le film de Hiromasa Yonebayashi Arietty, le petit monde des chapardeurs (2010, adapté de The Borrowers de Marie Norton), ou encore Aya et la sorcière (2020) de Gorô Miyazaki, adapté, comme Le Château Ambulant, d'un roman de Diana Wynne Jones.

Cette inspiration occidentale a permis au studio de se faire rapidement reconnaître à l'étranger. D'abord en France, sous l'impulsion de Moebius et quelques autres (Cédric Littardi, Ilan Nguyen...), les œuvres de Miyazaki et Takahata ont reçu une certaine reconnaissance de la part de cercles cinéphiles. Le film d'Hayao Miyazaki Porco Rosso (1992) fut le premier film du studio à connaître une distribution à l'étranger, et il reçut le Cristal du Long-métrage au festival d'Annecy en 1993. Mais le succès du studio, au Japon, est bien plus manifeste, et au tournant des années 2000, le studio conquiert définitivement le monde. D'abord avec Princesse Mononoké (H. Miyazaki, 1997) : film au budget important de 2,35 milliards de yens (environ 16 millions d'euros), il a connu un succès inattendu, rapportant 17,76 milliards de yens (122 millions d'euros) de bénéfices. Quelques années plus tard, Le Voyage de Chihiro (H. Miyazaki, 2001) rapporte presque 30 milliards de yens (200 millions d'euros) de recettes, devenant le film le plus célèbre du cinéma japonais. Il remporte, entre autres prix prestigieux, l'Oscar du meilleur film d'animation en 2003. Celui-ci montre comment le studio Ghibli a su se frayer un chemin de reconnaissance dans la culture populaire, au point d'être récompensé par une institution qui favorise énormément le cinéma étasunien.

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