Chapitre 4

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Vendredi arriva aussi rapidement qu'une traînée de poudre. Clara continuait de me présenter chaque jour de nouvelles personnes, bien qu'aucune ne m'ait réellement marquée.

Nous nous étions arrangés afin qu'elle puisse passer me prendre après mon service au restaurant, puis nous irions déposer mes affaires chez moi avant de partir pour la boîte. Tous les détails étaient réglés au millimètre près, si ce n'est le fait que je n'en avais toujours pas parlé à Sam. Je ne savais pas si je devais lui faire confiance pour accepter de suite ou lui mentir en prétendant un exposé à faire. Cela dit, mon frère était loin d'être naïf, contrairement à mes parents.

Je décidais donc de faire comme si de rien n'était. De toute façon, il travaillerait toute la nuit et ne remarquerait probablement pas mon absence.

J'arrivais donc au restaurant à dix-huit heures pile et à dix-huit heures trois, j'étais sorti des vestiaires, tablier enfilé et prête à en découdre avec un long service après une longue journée. Avant une longue soirée.

_ On est bien joyeuse aujourd'hui, me signala Todd.

Je haussais les épaules en allumant la caisse. Ce soir, nous étions deux de service. Je ne portais pas particulièrement Todd dans mon coeur, c'était un adolescent avec une face de geek et un humour sexiste un peu limite qui trahissait son pucelage encore présent. Mais il n'était pas foncièrement méchant.

_ C'est le week-end. Que dire de plus ?

_ On a une tonne de réservation ce soir. Ça va être un gros service. Et on n'est que deux.

_ Prems ! Je m'occupe de la caisse. Je te laisse les tables.

Il soupira.

_ Tu me fais le coup tous les soirs, Charlie.

_ La prochaine fois, tu seras plus rapide.

Il leva les yeux au ciel et marmonna quelque chose comme "les femmes, je vous jure" avant de s'avancer vers deux clients qui venaient d'arriver. En jetant un coup d'œil à l'horloge, je remarquais qu'il me restait encore au moins trois heures de service. Dans la poche de mon tablier, je sentis mon téléphone vibrer. Je m'attendais à un message transpirant d'impatience de la part de Clara, mais ce n'était que Sam.

"Je t'ai laissé une assiette de pâte au frigo ce soir. Je rentrerai vers trois heures."

Je ne pris pas la peine de répondre. Mais je notais intérieurement de bourrer mon lit d'oreiller au cas où sur un malentendu, Sam aurait l'envie de venir vérifier ma présence en rentrant du boulot.

Je ressentais une pointe de culpabilité à l'idée de faire le mur, mais s'il m'avait dit non, il aurait été sur ses gardes et je n'aurais jamais pu quitter ma chambre. Et Dieu savait que je n'en pouvais plus de cette chambre. Tout ce que je voulais, c'était me changer les idées avec mes nouveaux amis.

_ Charlie arrête de rêvasser, va donner ça en cuisine pour te rendre utile, il n'y a personne pour le moment à la caisse.

Soupirant, je saisis le papier de commande de mon collègue et l'apportai au chef cuisiner (un gros lard suant qui ne respectait pas vraiment les normes hygiéniques). Il grogna en signe de remerciement et je ne me fis pas prier pour sortir.

Les clients arrivèrent bien plus vite que prévu et je n'eus pas une seule pause à moi de la soirée. Plusieurs fois, je sentis mon téléphone vibrait, mais je n'eus pas le temps de regarder mes notifications. Un client particulièrement agaçant m'avait d'abord fait une scène à cause de son addition et une histoire de monnaie, puis une vieille dame m'avait fait la morale après que j'aie renversé son verre de tequila, non sur elle, mais bien sur moi, sans parler de Todd qui n'avait cessé de me lancer ses fameuses piques agaçantes que je lui aurais bien renvoyées à la figure s'il n'y avait pas autant de clients autour de nous.

Une vie comme les autresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant