Nos âmes ensoleillées

2 - Something like shoot

(Prêt à rencontrer le grand Colebee ? )

13 septembre 2022.

Colebee.

    Je monte dans ma bagnole avec une motivation comprise entre zéro et moins un. J'ai un tournage, mais pourtant je n'arrive pas à m'en enchanter. D'habitude c'est le seul endroit où j'arrive à me sentir bien, mais là, les choses sont assez étranges.

    Ce n'est pas le genre de contrat que je signe généralement. J'ai l'habitude des studios, des lourds éclairages et de tous les matos de photographie, mais ce projet là, bien qu'il me rapporte plus que d'habitude, me met vraiment à nu... Pas entièrement au sens propre même si je vais me retrouver à poser en maillot de bain, mais disons que mes insécurités vont aujourd'hui être révélées à la vue de tous. Quelque part, ça m'inquiète. J'ai une image jusqu'alors non négligée et des fans qui apprécient ce que je fais, mais alors risque-je de les décevoir lorsqu'ils me verront de cette façon ?

    J'arrive sur la bais où nous allons tourner et me gare sur le parking improvisé. Aussitôt à l'extérieur de la voiture, mon agent accourt et me détaille du regard avant de me faire passer aux équipes de coiffures et maquillages dans une tente installée exprès pour la journée.

    J'ai beau adorer être le centre de l'attention collective et celui que l'on chouchoute, ce genre de choses me met mal à l'aise. Avant, je n'avais aucun problème, bien au contraire, mais récemment, j'ai eu la terrible impression d'être un objet que l'on passe d'une main à l'autre...

    Je m'installe sur la chaise et revêt mon image de mannequin. Grand sourire charmeur, ton aussi blagueur que séducteur. Me voilà de retour dans mon personnage. Je retrouve aussitôt confiance et me mets à papoter avec les femmes pendant qu'elles me préparent. L'une d'elles commence par laver mes cheveux et applique différents soins pour les rendre plus soyeux et brillants.

    Elle me raconte sa vie - qui ne m'intéresse pas le moins du monde - tout le long de son travail, mais je fais mine de m'y intéresser. J'ai tout intérêt à ce que les gens qui s'occupent des tournages avec moi m'apprécient.

    La femme me remercie et laisse place à une autre. Je n'ai jamais compris cette manie, en fait, c'est moi qui devrait les remercier, pourquoi me dire merci alors qu'elles ne font que leur travail ?

    La femme retouche mon teint armé de ses différents pinceaux et tubes. Tout doit être parfait à la caméra, aucune imperfection qui peut être modifiée doit rester. Je l'ai vite appris à mes dépends. Je me souviens que la première année de mannequinat que j'ai faite, je devais avoir cinq ans. A cet âge, comme n'importe quel enfant, je perdais mes dents de lait. On m'avait fait reproduire mes deux dents tombées pour apparaître parfait sur la couverture. C'était la première fois que je posais pour une marque de luxe et déjà à cet âge, j'ai compris que lorsque je serais sur le plateau, j'aurais une image totalement différente de celle de la réalité.

    Elle termine son maquillage par une touche de bronzer et s'éloigne le sourire aux lèvres. En général, ce sont plutôt les équipes de costumes que je redoute. Elles ne sont franchement pas aimables.

    En parlant du loup... Christophe, mon agent réapparaît. Il porte son habituel carnet dans la main et jette un rapide coup d'œil à ses notes avant de me demander de le suivre. Je m'exécute sans réfléchir et nous sortons sur le sable pour gagner une seconde tente.

    A l'intérieur se trouve sur des portants les produits de la marque. Des maillots de toutes les couleurs et de divers motifs se trouvent dans tout l'habitacle. Une femme s'approche de moi en me détaillant comme elle le ferait avec un morceau de viande dans son assiette.