Chapitre 2

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Pour ce chapitre, je vous conseille d'écouter Where we come alive de Ruelle.
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  La sonnerie aiguë de mon réveil m'oblige à émerger. Je rouspète fiévreusement en me recroquevillant un peu plus dans mon lit.

  Je n'ai presque rien dormi de la nuit. Si ce n'est pas. Je manque de faire tomber mon ordinateur au sol en bougeant, mais le rattrape de justesse. Il est toujours ouvert sur la page que j'ai ouverte dans la nuit, à savoir Prime Vidéo, à la différence que la lecture du dernier film que j'ai regardé s'est interrompue.

  Regardez à nouveau Rouge Rubis.

  Malheureusement pour moi, même mon confort movie n'a pas pu m'apaiser, cette nuit.

  Le cauchemar n'a cessé de tourner en boucle dans ma tête, comme une bande son interminable. Un peu comme les chansons des cafétérias du Crous à la fac. On les entend tous les jours et on finit par ne plus pouvoir en écouter la première note. On est forcés d'attendre désespérément la fin de la musique avant qu'une autre s'ensuive.

  Moi, j'attends de me réveiller. Je voudrais sortir de cet état second que mes insomnies répétées engendrent. Sans parler de ma paranoïa. Cette impression que quelqu'un m'observe en permanence... elle me dévore et envahit continuellement mon esprit.

  J'avais bien tenté de me rendormir, mais il m'était impossible de fermer ne serait-ce que dix secondes les yeux sans revoir l'homme sans visage. Je revivais la scène une énième fois, et l'effroi qui m'avait submergé un peu plus tôt reprenait le contrôle de mon corps. J'étais prisonnière de mon esprit, et je luttais en vain contre le flux de pensées qui l'assaillaient.

  Épuisée, je laisse mon alarme sonner à plusieurs reprises avant d'arriver à me sortir du lit. Malgré un système ingénieux de réveils fixés à quinze minutes d'intervalle, je n'ai jamais été du genre matinale. La plupart du temps, je me contente juste de les éteindre consécutivement, sans prendre garde aux minutes qui s'égrainent. Je n'ai plus la force de me motiver comme avant, de me forcer à me lever rapidement pour avoir le temps de me préparer. Le manque de sommeil me rend nettement plus fainéante.

  Rechignant, j'appuie machinalement sur l'écran de mon téléphone, et la luminosité blanchâtre de ce dernier me vaut un clignement d'œil, le temps de m'adapter à l'éclat qui en jaillit et qui m'aveugle de bon matin.

  Il est déjà 7h15.
  Génial, je vais être en retard.

  Je me précipite en bas, en direction de la cuisine, et me dépêche d'avaler un verre de jus de pomme, espérant qu'il me donnera assez de courage pour affronter une autre journée de cours rythmée par les allers-retours entre les amphithéâtres délavés de la fac et le bruissement agité des feuilles sur les bureaux dont la largeur égale la taille de mon coude.

  Et non, la fac, ce n'est pas ce que j'aurais aimé faire. La psychologie n'est pas mon choix. Ce n'est autre que celui de ma mère, qui a insisté pour que je choisisse cette voie. Soi-disant plus intellectuelle, plus utile que celle à laquelle j'aspirais. Je rêvais d'intégrer des études liées à la physique et l'astronomie, sujets qui me passionnent depuis petite, et qui lui font horreur pour une raison que j'ignore.

  « Avoir la tête en l'air, ce n'est pas un métier Jody. Tu gâcherais ton potentiel. Hors de question que tu passes ton temps à observer les étoiles. »

  En parlant du loup, ma mère est déjà partie. Elle travaille dans une école privée en tant que conseillère d'orientation depuis maintenant plus de six ans. Ironique, n'est-ce pas ? Elle incarne le rôle de celle qui est censée être à l'écoute des préférences et vœux de chacun, afin de les orienter en conséquence. Or, visiblement, les principes qui régissent sa vocation s'appliquent à tous, sauf à moi.

Buried in liesWhere stories live. Discover now