Chapitre 7 : Maé : Sortie

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Depuis cette nuit-là, les relations avec Camille étaient devenues... Je ne trouve pas de mot, intense peut-être ?

Quand on se croisait, on bredouillait, se souriait bêtement ou encore rigoler ensemble. Enfin bref, trop bizarre. Je crois bien que je lui plais. Peut-être que s'est aussi le cas pour moi, mais je ne peux pas me permettre de faire d'autres victimes. J'en ai déjà trop fais.

Mes parents venaient me voir tous les samedis et mercredis. Cela allait faire deux semaines que j'étais ici, mais je ne savais pas jusqu'à quand encore.

Cam est quand même un garçon très secret qui se livre rarement.

Je ne sais même pas pourquoi il est là. C'est juste que quand l'un à besoin de l'autre, on est toujours là. Je vous avais dit que c'était bizarre ! J'aimerais bien lui parler, enfin une vraie conversation quoi. Parce qu'entre les rendez-vous, les visites et nos sorties habituelles, on ne se voit pas souvent ou du moins, pas très longtemps.

J'essayerai demain, si je ne me dégonfle pas, mais ce sera sûrement le cas, comme à chaque fois en fait. Je me réveille, ce vendredi sept juin avec un horrible mal de tête. Mais bon, je m'en fiche. Aujourd'hui, c'est le bon jour. Je suis déterminée, je reste donc comme ça, à fixer le mur blanc de notre chambre. Tout est calme, tant mieux, cela me permet d'échafauder mon plan d'attaque. Quand je me redresse enfin, il n'est pas là, je me lève, vais regarder dans le couloir.

Personne, à part quelques dizaines de personnes, dont la famille, médecins ou infirmiers. Et c'est là que je l'aperçois dehors, assit sur un banc, regardant son portable. Je m'habille hyper vite, genre cinq minutes un truc comme ça. Une première en dix-sept ans d'existence.

Je cours dans le couloir. Je suis dans la halle quand je le vois se lever et partir dans la direction opposée de l'hôpital. Je le suis en mode furtif. Je ne sais pas si je suis discret ou au contraire, ridicule. Sûrement un peu des deux.
- Bon autant m'accompagner là non ? Lança-t-il, je ne vais pas te mentir, mais la discrétion, ce n'est pas ton truc.
Bon ba au moins, je suis fixé.
- Oui, bon, c'est bon, pas la peine de m'enfoncer.
Il s'esclaffa. Nous continuons de marcher pendant un quart d'heure environ avant que ma tête commence à devenir lourde. Remarquant ce léger malaise, il m'informa que l'on était bientôt arrivé et se décala légèrement derrière moi.

Ce geste me fit sourire. Nous passons devant plusieurs beaux parcs, mais il préféra s'arrêter devant un skate-parc.

Il ne comptait quand même pas... Pourtant, il entra. C'est vrai avec une perfusion dans son sac à doc, faire du skate, quelle bonne idée oui vraiment pourquoi n'y avais-je pas penser plus tôt.
- Rassure moi, tu n'oserais quand même pas montre sur une de ces planches à roulettes par hasard ? Réfléchi bien à cette question, même si tu ne me répondais pas l'affirmative, sache que je t'en empêcherai.
- Bien sûr que non, je n'ai pas de pulsion suicidaire qu'est ce que tu crois ?
Mes genoux flanchèrent de soulagement, mais heureusement qu'il me rattrapa par le coude sinon, j'aurai déjeuné de les fesses par terre. Il me sourit et lança :
- Je pense que l'on ferait mieux de s'asseoir.
Ces pas furent les plus lourds et compliqués de toute ma vie.
- Est ce que je peux te poser une question ? Demandai-je
Il acquiesça avec un haussement de sourcils. Je respirai un grand coup. Déterminée Maé, déterminée.
- Pourquoi es-tu là ?
- Oh ça, j'aime bien regarder les gamins joués. Chacun ses passions écoute.
- Non, je veux dire pourquoi, enfin, tu as quoi. Comme maladie, je veux dire ?
- Ah ça, cancer du poumon.
Il avait dit ça avec le plus d'aisance possible, comme si c'était logique ou normal.
- Et, tu vas guérir ?, Demandai-je
Il haussa les épaules et je sus que je venais de gâcher l'ambiance. Il se retourna vers moi.
- Ce n'est pas de la pitié que je vois sur ton visage-là non ? Me demanda-t-il
- Arrête de changer de sujet.
- Alors ?
- Mais non. Enfin en réalité si, un peu.
Il me fixa un instant avant de reprendre.
- Les antibiotiques n'ont pas l'air de beaucoup marcher sur moi. Je suis déjà à la phase trois. Le cancer va bientôt attendre un ganglion lymphatique et grossir pour au final faire de plus de 5 cm. Maintenant, à moi de te dire quelque chose.
- Hum... Dis toujours.
- Tu sais très bien ce que je vais te dire.
- Je... je ne peux pas, dis-je avec des trémolos dans la voix.
- Alors là, il va me falloir plus que ça, tu t'en doutes bien.
- Toute ma vie, j'ai essayé de m'attacher le moins possible à des gens, de peur de leur briser le cœur par la suite.
- Moi, ma question, c'est pourquoi ? Demanda-t-il avec insistance
- Par ce qu'après, je déménagerai et je... »
Il éclata de rire. Pendant longtemps à vrai dire. Trop longtemps. Il aurait battu le record du monde à coup sûr.

Je lui lançai un regard noir et me lavai. Il me rattrapa par la manche.
- Ok, c'est bon, j'arrête de me moquer promis. Mais c'est juste, déménager sérieusement ?, dit-il, hilare, je pensais genre : je suis maudite, c'est pour ça que je ne peux peu pas avoir de copain sinon tu vas te transformer en hamster. Et même, ça tue le look de hamster, j'aurai fait sensation à la fête déguisée.
- Je suis sérieuse.
- Ah, mais moi aussi !
- C'est juste que quand je vais devoir partir à l'autre bout du monde, je vais te briser le cœur.
- Techniquement parlant, tu ne peux pas me briser le cœur deux fois d'affilée, ça, c'est impossible.
- Ah, ah, ah, hilarant, répliquai-je avec un sourire en coin.
- Tu parles de déménagement quand je te parle de cancer. Tu sais la maladie qui va te faire mourir en quelques mois. »
Le mince sourire s'effaça. Nous nous regardâmes en silence.
-Je viens de plomber l'ambiance-là non ? Demanda-t-il après quelques minutes.
- Oui très clairement.
Je le pris dans mes bras. C'était la seule chose que je pouvais faire actuellement.
- Mais bon t'inquiète, je serai mort en voyant une des plus belles choses du mon... »
Je posai mes lèvres sur les siennes pour le faire taire car à force de parler, ma tête allait exploser. Nous restâmes de longues minutes comme ça. Ces quelques minutes les plus longues et cools de toute ma vie. Quand nous nous réparâmes enfin, on se regarda et je rigolai, ce qui le sortit de sa transe. Des heures, voilà combien de temps ce baiser avait duré pour moi.
- Nous ferions bien de rentrer, lançai-je, en lui prenant la main pour le réveiller complètement
Il acquiesça d'un signe de tête. Sur le chemin du retour, je me dis que si ça était des heures, je voulais l'éternité.

Jour pour jourHikayelerin yaşadığı yer. Şimdi keşfedin