Trouver la paix (Français)

1 0 0
                                    

Le soleil se couche, il tapisse le monde visible de ses rayons d'or encore chauds. Les lumières orange donnent un aspect accueillant à la ville en contre-bas, ville souvent trop rapide, trop active. Les gens se croisent, se pressent et s'oppressent, sans prendre le temps d'être à l'heure pour eux-mêmes. Ressemblant trop souvent à des zombies, les yeux cernés de noirs, les yeux humides de fatigue ou d'alcool, dépendamment de l'heure.

Du haut de sa colline, son perchoir, une personne regarde le soleil se coucher, ses lunettes de soleil cachent son regard hagard et ses yeux nostalgiques. Yeux enfermant une tristesse sans fin qui ne laisse paraître qu'une rancœur contre le magnifique poison qu'est cette ville. Cet endroit qui lui a pris sa vie, qui lui avait permis de la trouver en premier lieu. Elle a repris le bonheur qui lui avait été offert, qui l'oblige à affronter bien plus qu'une armée de démons et de dragons.

Un an déjà que tout lui avait été enlevé, sans un mot, sans signes avant-coureurs, la mort qui était venue faucher les âmes de son monde. Et si ce fut sans un mot, ce fut avec beaucoup de bruit, elle dû faire le deuil, alors que l'on parlait de sa famille dans tous les médias, affichant leurs photos partout. Sa famille, qui devient célèbre, parce qu'en fonçant dans leur voiture, les tuants rapidement, un tueur en série fût attrapé. Tout était décrit avec précision : ses deux enfants avaient pris le premier coup, le parechoc du meurtrier avait défoncé l'aile droite de la voiture. Puis, ne pouvant pas freiner sa course, le tueur a trainé la voiture sur plusieurs mètres, à pleine vitesse, jusque dans un mur. Sa femme mourût à son tour, sans même avoir eu le temps de comprendre ce qui lui arrivait. La ville avait parlé, pendant des mois de cet incident tragique qui lui avait pris ce qui lui restait d'humanité. Toute la ville rappelant que le tueur avait pris trois vies de plus et était sorti de cet accident indemne, avec une simple coupure sur le front.

Plusieurs personnes avaient compati, certaines savaient que l'égratignure de cet homme n'était rien face à l'hémorragie qu'avait Sam à la place du cœur. Ils savaient, oh combien certains savaient, que cette situation injuste ne l'était que plus quant au jugement, le juge avait donné seulement 25 ans de prison dont une remise de peine possible. Alors qu'elle, elle venait d'être condamné à vie à la place d'un autre. Elle n'avait rien fait mais l'enfermement, elle le vivrait pour toujours.

D'autre médias, eux ne faisaient que l'éloge de l'arrestation du tueur en série qui traumatisait la ville depuis des années. Faisant fît de l'accident et taisant le drame qui avait provoqué cette même arrestation.

Après cet évènement, le psy assigné par la police lui avait donné ce qui devint son meilleur ami, sans lui poser de question, sans la rassurer, puis il l'avait laissé partir, clamant bien fort que sa femme venait d'accoucher. Sans un seul brin de compassion pour cette personne qui venait d'identifier ses deux jeunes enfants ainsi que sa femme quelques minutes plutôt. Face à ses larmes, le flic resté avec elle lui avait jeté un regard désolé, lui serrant l'épaule d'une main rude pour lui transmettre un peu de courage.

Cette nuit-là, elle ne dormit pas, ses yeux fixaient le plafond sans vraiment le voir, les larmes ne coulaient plus, la douleur était si grande que les pleurs semblaient être un luxe utopique. Dès la première heure le lendemain, Sam prit l'ordonnance laissée par le psy, du Xanax, un anxiolytique tranquillisant, et du Seroplex, un antidépresseur puissant, servant à augmenter le taux de sérotonine dans le corps, qu'elle devrait prendre à haute dose matin et soir. L'ordonnance en main, elle alla chercher ce qui deviendra plus tard l'ami de ses nuits, le mélange de sa survie. Elle mit les boîtes sur la table de sa cuisine, épuisée de cette balade qui n'avait été rythmée que par l'esquive d'un passant et la tentative d'oublier que sa famille faisait la première page de tous les journaux. Son mental ne pouvait pas suivre les hauts et les bas que son propre cerveau créait. La boîte resta immobile, un jour, puis deux. Sam arrêta également de bouger, allant parfois se faire un café, l'énergie procurée par la caféine ne la fît pas sortir pour autant, abandonnant son travail, et ne mangeait presque plus. Éventuellement, elle commença à avoir des hallucinations, parfois, elle voyait la chevelure blonde cendrée des enfants, le sourire de sa femme au-dessus d'elle alors qu'elle fixe le plafond, allongée sur son lit. S'accrochant à ces illusions comme à une bouée de sauvetage, elle ne put empêcher le temps d'effacer le son des rires, les sensations de leurs peaux sur la sienne lui échappait, et d'eux, il ne resta bientôt plus que les vidéos, les messages et les reliques qu'elle n'osait plus toucher.

Quand l'entièreté des illusions se fût échappée, le combo de Xanax et Seroplex rejailli dans son esprit. Plusieurs semaines s'étaient écoulées, elle avait maigri, son cerveau ne lui apportait plus les signes vitaux nécessaires à sa survie. Elle prit le premier médicament, il tempéra son humeur, arrêtant les irrégularités hormonales que son cerveau ne parvenait pas à réguler. Cette petite combinaison de comprimés lui faisait temporairement oublier le foutoir qu'elle et sa vie était devenu.

Dès que les effets s'atténuaient, elle en reprenait un, faisant sa journée autour de ce comprimé. Bientôt, elle reprit le travail, mais ne serait plus jamais la même boule de bonne humeur qui ensoleillait les journées de ses collègues. Elle faisait son travail, sans plus, ne se forçant à rien d'autre. Mangeant un peu de pain chaque jour.

Tout ça pendant un an. Aujourd'hui, les médias rappellent l'arrestation du meurtrier avec joie, mais Sam, elle pleure ses amours perdus face au soleil au goût de bonheur et d'amour qui illumine son visage. Les yeux dans le vague, et avec nostalgie, les souvenirs se rejouaient devant ses yeux habituellement sans vie, un film translucide à moitié visible sur ce paysage extraordinaire. Et le sang sec qu'était son cœur battait doucement alors que le vide abyssal face à elle l'attendait.  

You've reached the end of published parts.

⏰ Last updated: Jun 27, 2023 ⏰

Add this story to your Library to get notified about new parts!

One shot that pop up in my mind Where stories live. Discover now