☠Prologue☠

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Sicile,

4 février 2017,

Bercé dans la violence, je deviens l'ombre de mes cauchemars.

Bercé dans la violence, je deviens l'ombre de mes peurs.

Bercé par la méchanceté, je deviens ce que je fuis.

Je hais l'état auquel je suis réduit. La perversion et la déviance sexuelle ne faisaient pas partie de moi. Bien que je sois un homme, je déteste utiliser le corps de la femme dans ce simple but, pourtant, il m'a contraint à l'apprivoiser. L'ironie dans cette situation, c'est que j'ai fini par aimer ça. J'ai appris à donner mon être et mon attribut masculin dans le seul intérêt d'assouvir le plaisir des autres.

J'aurais été prêt à tout pour les sauver. J'aurais donné ma vie en échange de la leur. Je ne suis pas croyant, cependant, je pourrais passer des heures à me confesser, à exprimer toute ma peine et mon mal-être. Je passe des journées entières à les supplier de me pardonner pour ce qui leur est arrivé. Je devais les protéger, elles ne devaient pas vivre ça. C'est une honte qu'il leur ait imposé. Pour ça, je le maudis du plus profond de mon âme.

Je veux me repentir.

Je veux être lavé de mes péchés.

Cela dit, depuis que je suis entré dans ce monde obscur, j'ai amèrement appris à y prendre goût. De toute manière, je n'ai plus rien à perdre. Je les ai perdues. J'ai tout à y gagner, désormais.

C'est la gorge nouée et la boule au ventre que je me dirige vers ce lieu vide. Le vent me fouette le visage humide et fait bourdonner mes oreilles. Les mains moites et enfoncées dans mes poches, j'arpente le cimetière sinistre et morbide. Il ne me faut pas longtemps pour arriver sur leurs pierres tombales. J'esquisse un petit sourire quand leurs traits m'accueillent et, comme à chaque fois que je viens, une larme se verse sur le marbre qui les abrite de cet enfer qu'est mon existence.

Je pince ma lèvre pour réfréner mes pleurs. Je ne veux pas craquer, car je sais qu'elles sont à mes côtés et qu'elles m'observent. C'est trop dur de garder la face quand je me retrouve devant mes échecs.

Ces deux femmes étaient les prunelles de mes yeux et aujourd'hui, elles ont disparu à tout jamais. Il m'est impossible de revenir en arrière pour empêcher le drame de frapper. Je peux encore moins les ramener auprès de moi. Alors, depuis près de trois ans, je viens tous les jours déposer toute l'affection qu'il me reste. Je veux qu'elles sachent à quel point je les aime. Je m'abandonne sur leur dalle, j'y laisse des morceaux de mon âme tourmentée, afin qu'elles puissent reposer en paix.

À genoux sur la terre froide et mouillée, j'implore pour la énième fois leur pardon.

Pardon d'avoir été un fils lâche, qui n'a pas su sauver sa mère des griffes de son mari.

Pardon d'avoir été un piètre frère, qui n'a pas réussi à épargner sa petite sœur de ce monde malsain.

Pardon d'avoir été un gamin sans défense et dépourvu de toute solution pour les sortir des abysses qui les engloutissaient au fil des jours.

Pardon d'avoir échoué dans mon rôle d'homme.

Six pieds sous terre, alors que je me traîne ce fardeau sur les épaules. Je tente de survivre avec cette tragédie qui me brise un peu plus chaque seconde. C'est une honte de vivre avec ce malheur sur la conscience. Alors pour l'accepter, ou plutôt pour l'oublier, je m'enfonce dans les profondeurs des limbes. Je fais ce pour quoi il a mis au monde des gosses. Je m'acquitte des dus qu'il a accumulés, en ayant pour obligation de les régler en nature.

Bientôt, je serai libre. Je n'aurai plus besoin de me vendre pour racheter sa noirceur.

D'ici quelques mois, j'atteindrai ma majorité et je n'aurai plus de compte à rendre.

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