Chap 8 : pdv Aaron

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   Jamais je n'aurais souhaité qu'elle me voie dans cet état. Jamais, c'était insupportable de l'imaginer.

Dans ce centre qui était censé m'aider à aller mieux, je dépérissais complètement. Je n'avais pourtant pas l'énergie de réagir, de leur prouver que je pouvais aller mieux afin de quitter cet hôpital. 

Je savais que je devais me bouger, que je devais prendre ma vie en main, mais je n'avais plus la force de me battre. Je me laissais tomber dans un trou sans fond. Etait-il possible de tomber toujours plus bas ?

Je savais que je devenais comme mon grand-père. Maintenant, je prenais mes médicaments tous les jours, je voyais un psy plusieurs fois par semaine et donc je n'étais plus instable ni violent comme avant, mais j'avais réalisé que j'avais perdu ma fougue. Plus rien ne me faisait rire. J'en avais fait le deuil, j'étais devenu apathique.

Mes rêves s'étaient envolés sans que je ne les réalise vraiment.

J'étais devenu une larve. Je restais des heures dans ma chambre, immobile. Je lisais quelques pages puis je m'endormais sur mon livre, je regardais la télévision sans savoir me concentrer longtemps. Je ne faisais plus rien de concret, plus de sport, plus de projet pour mon avenir.

Quelles étaient mes passions ? Je l'ignorais. Qu'allais-je devenir ? Un assisté, un résident à long terme ?

Mes parents ne m'aidaient pas à aller mieux, ils essayaient plutôt d'oublier que leur fils unique avait mal tourné et était juste bon à enfermer. Je savais qu'ils étaient déçus et qu'ils ne mettaient plus d'espoir en moi. J'étais devenu un bon à rien à leurs yeux.

Je n'avais jamais avoué que cela me faisait mal, mais c'était le cas. Peut-être que leur confier mon ressenti m'aiderait. Oser leur avouer que je leur en voulais d'avoir caché ma maladie. Mais prononcer ces mots rendrait la situation concrète et labyrinthique. Je ne voulais pas accepter leur rejet ni leur déception.

Je n'étais pas prêt.

J'appréciais regarder le parc du centre depuis ma fenêtre. Voilà quel était le résumé de ma journée. J'observais les autres évoluer sans me mêler à eux. Je ne voulais plus de nouveaux amis, car j'avais perdu les seuls qui comptaient vraiment.

Ressemblais-je à madame Edwige lorsqu'elle était enfant ? Auréa m'avait parlé d'elle et de son évolution dans un foyer pour orphelins. Elle était toujours restée à part d'autres. Elle ne s'était jamais fait d'ami.

Personnellement, je ne voulais plus être déçu. Alors, autant rester seul.

Parfois, je téléphonais à mon meilleur pote Son Goku, car il était le seul avec qui je n'avais pas honte. Jamais je n'aurais osé appeler Auréa, Capucine ou Anaïs pour savoir ce qu'elles étaient devenues. J'avais trop de pudeur. J'espérais cacher ma déchéance.

Puis, Auréa devait me détester. Elle devait se rappeler de moi comme de son fou de voisin qui avait été emmené par des policiers, qui avait volé une canne à une dame âgée ou qui avait saccagé un magasin à l'aide d'un parapluie.

Elle ne m'avait sûrement jamais aimé. Pourtant, moi, je l'aimais.

Je le savais maintenant, mais il était trop tard. J'étais amoureux d'elle, mais c'était un amour impossible.

En résumé, j'étais amoureux d'un souvenir.

J'avais récemment demandé à mon ami comment allait Auréa. J'avais réalisé qu'il n'avait pas hésité une seule seconde. Il connaissait la réponse. Il était toujours ami avec elle. Ils étaient en contact et il savait me répondre spontanément. J'aurais tellement voulu être à sa place, mais je me tus. C'était trop douloureux.

Je lui avais demandé si elle était heureuse. Cette question était cruciale pour moi. Il m'avait répondu par la positive, sans hésiter un seul instant. Cela m'avait soulagé et à la fois consterné qu'elle soit épanouie sans moi. J'aurais tellement voulu compter pour elle, compter un tout petit peu.

Auréa me manquait et pourtant, je ne faisais rien pour reprendre contact avec elle.

J'aurais pu essayer, mais qu'avais-je à lui offrir ? Rien.

J'étais juste un jeune homme perdu qui fixait le parc depuis sa chambre déprimante.






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Plus jamais seuls (TOME 2)Where stories live. Discover now