Chapitre 7 : La Cavalcade

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La rivière s'asséchait, laissant derrière elle un mince filet d'eau serpentant entre les roches. Ils devaient la suivre, remonter son cours. Combien de temps encore devraient-ils continuer ? Combien de temps pourraient-ils continuer ? À ses côtés se tenait quelqu'un. Mais qui ? Lui... non, pas lui. Peut-être celui-ci alors ? Non plus, peut-être était-ce l'autre. Qu'importe, quelqu'un était là, à ses côtés, lorsque la rivière se tarissait. Un soleil éclatant brûlait sa peau pâle, si fragile. L'herbe sous ses pieds se desséchait et les arbres pleuraient leurs feuilles. Une odeur de mort emplissait l'air. Les algues agonisaient sur les galets brûlants qui jonchaient autrefois le lit de la rivière. Les pierres polies reflétaient une lumière éblouissante, obligeant Gwenn à fermer les yeux pour mieux les rouvrir.

Ses paupières, lourdes comme du plomb, se soulevèrent péniblement, dissipant les derniers échos du rêve. Elle se réveilla lentement, prenant conscience de son propre corps. La sécheresse accablait sa bouche, abreuvée d'un goût de sang. Une douleur lancinante irradiant son dos, ses bras, ses jambes la tourmentait. Les cahots familiers du tout-terrain de son père secouaient ses muscles endoloris. À en juger par l'odeur, elle devait se trouver à l'arrière du véhicule. Des voix masculines résonnaient dans l'habitacle, chuchotant et se disputant. Elle avait dû subir une sévère correction, car elle ne reconnaissait ni la voix de son père ni celle de son frère. D'ailleurs, elle ne se souvenait plus non plus de ce qu'ils faisaient tous ici. L'obscurité ambiante ne lui apportait aucun éclaircissement. Elle tendit l'oreille, espérant percer le mystère qui l'entourait. Une voix grave et exaspérée, s'exprimant dans la langue suave de l'Empire, commenta :

"C'est pas bon, petit... Pas bon du tout. On arrive bientôt à court de carburant. On n'a pas beaucoup d'avance sur eux. S'ils ont trouvé un nouveau véhicule, il ne faudra pas longtemps avant qu'on se retrouve dans la merde jusqu'au cou ! Si seulement tu me laissais larguer le poids mort..."

"C'est hors de question, vieux coucou ! Elle m'a sauvé la vie... je ne vais pas te refaire tout le couplet !", l'interrompit une voix plus jeune, et familière.

"Tu veux mon avis ? C'est surtout la sienne qu'elle a sauvée. Regarde-la ! Un transport tout frais payé. Des gardes du corps. Rien que ça. Tu vois, il y en a qui paieraient une somme rondelette pour se déplacer à travers la Zone avec un ancien mercenaire et son jeune valet. Mais non ! Il semblerait que dorénavant, on fasse dans le caritatif. C'est parti, messieurs, mesdames, à notre bon cœur. Putain, quoi... Tu ne trouves pas ça étrange ? Je veux dire, tu te fais enlever par des barjots – après que je t'ai laissé à peine trois petites heures – puis, libéré par la gamine de ces mêmes barjots, tu t'échappes dans leur voiture, avec les clés qu'elle t'a elle-même fournies..."

"Écoute ..." tempera le timbre connu.

"Et maintenant il faudrait l'emmener en ville !?" continua l'autre, sans s'interrompre. "Et si c'était une ruse, un coup monté pour infiltrer nos défenses. T'as pensé à ça ? Qu'est-ce qu'on fera quand Julius viendra nous voir ? Qu'es qu'on dira pour justifier d'avoir été de parfaits abrutis ? Parce que ça sera nous les responsables !", s'exclama-t-il.

"Qu'on avait pas le choix ! Que j'ai donné ma parole..." répondit le jeune.

"Ta parole, ta parole ! Tu penses que le conseil va en avoir quelque chose à foutre de ta parole ? On a déjà failli être bannis, je te rappelle ! Ce trou paumé, ça devait être notre pénitence, une manière de nous racheter, pas de créer plus de problèmes !", dit le vieux avec frustration

"Je sais bien, pas besoin de me le rappeler", marmonna le jeunot. "De toute façon, ça ne sert à rien d'en discuter. Il n'y aura peut-être plus de ville, ni de conseil quand on arrivera."

Échos de la ZoneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant