16 - Chez les Evans

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Août 1971 - suite.


« ... Oui, mes filles sont à l'école privée. J'accorde beaucoup d'importance au niveau scolaire. Et le vôtre ?

— Je ne le scolarise pas. J'attendais son entrée à Poudlard. »

Eileen jeta un coup d'œil vers son fils. Droite comme un piquet dans son fauteuil en cuir légèrement usé, elle semblait plus à l'aise que Severus. Le garçon était intimidé par le salon des Evans, confortable dans un style chic et sobre, et probablement la pièce la mieux entretenue dans laquelle il ait jamais mis les pieds. Madame Evans se tenait juste à côté de sa mère, dans un fauteuil semblable, face à son mari. Pétunia s'était assise avec eux mais Lily avait très vite traîné son ami du côté de la cuisine, d'où il entendait pourtant les conversations.

« Mais il sait lire ? demanda avec curiosité Mme Evans. Comment l'as-tu éduqué ?

— Je m'en suis occupée seule quand il était petit. Maintenant, il lit par lui-même... Il faut dire qu'il est assez brillant, » se rengorgea Eileen.

A côté, dans la cuisine, Lily leva la tête. Severus la baissa.

« Vous ne voulez pas aller jouer, les enfants ? lança Mme Evans. Lily, va montrer ta chambre et tes jouets à Severus ! »

Il serra les dents. Il détestait qu'on l'appelle enfant. Il avait déjà onze ans après tout, et serait même plus âgé que la majorité des élèves qui entreraient à Poudlard.

Lily plissa les yeux, agacée, mais elle obtempéra.

« Sev, tu viens ?

— J'arrive. »

Ils montèrent un escalier de bois clair. Même l'escalier était beau chez les Evans.

Lily arriva devant une petite porte qu'elle ouvrit, et ils entrèrent dans une jolie chambre au papiers peints rose pâle et blancs.

Elle avait affiché au mur des photos de ses amis d'école. Evidemment, Severus ne figurait sur aucune d'entre elles. En revanche, sa joie d'être une sorcière transparaissait un peu partout : sa baguette posée bien en évidence sur le bureau, sa robe pliée en deux sur le dossier de la chaise, les gros livres de sortilèges à moitié ouverts.

« J'aime bien ta maison, décida d'avouer le garçon.

— Merci. Mais j'espère que je serai encore plus heureuse à Poudlard. Comme ça on sera tous les deux chez nous. A Serpentard, hein ? Comme tu as dit. »

Severus sourit.

« Serpentard, oui. Les sorciers les plus puissants.

— Mais tu ne m'as jamais dit les qualités exactes des autres maisons.

— Tu veux que je te les dise ? »

Severus adorait jouer ainsi au petit professeur. Il s'y sentait un certain pouvoir sur l'esprit de Lily.

Elle s'assit sur le dessus de lit à motifs en l'invitant à faire de même.

« Oui, je veux tout savoir.

— Alors déjà, il y a Poufsouffle. Ils ne sont pas très puissants, je crois, mais leur qualité c'est censé être la gentillesse. (Le ton de Severus était entre l'indifférence et le mépris.) Théoriquement, c'est la maison de ceux qui ont le cœur pur.

— Tu crois que j'ai le cœur pur. »

Elle avait posé cette question avec l'air inquiet le plus candide qui soit.

« Oui, j'en suis certain.

— Alors toi aussi, sûrement. »

Severus ne répondit pas. Il savait déjà qu'il avait le cœur noir. Parfois méchant.

« Et ensuite il y a quoi ? reprit Lily.

— Serdaigle. La maison des plus intelligents. Je ne sais pas si de grands sorciers en sont sortis, mais après Serpentard, c'est la meilleure maison. Les élèves sont tous très forts en classe.

— Je pourrais aller à Serdaigle. A l'école, on me dit toujours que je suis très intelligente. Et après, il y a Gryffondor, c'est ça ? Tu m'en avais déjà parlé.

— Eux, ce sont les pires, répliqua Severus. Même si Poufsouffle est encore plus médiocre, les Gryffondor se prennent pour des génies et des héros. Ils sont vantards et bêtes. Ils disent que leur qualité est le courage, mais c'est l'arrogance. C'est pour ça qu'eux et les Serpentard se détestent.

— Je n'irai pas à Gryffondor, décida Lily. Je ne suis pas une vantarde.

— Tu as raison, approuva Severus. Nous irons à Serpentard ensemble, comme on se l'était dit. »

Et en regardant Lily, Severus pensa sincèrement qu'elle aurait sa place à Serpentard. Pas un instant il ne songea qu'elle avait du sang moldu dans les veines.

« Tu vas commencer à travailler pour la rentrée ? demanda Lily.

— Oui, un peu je pense.

— Moi j'ai envie de tout lire mais je pense que je vais être trop paresseuse... C'est normal tu crois ?

— Je suppose que oui ! »

A dire vrai, Severus n'avait jamais eu la paresse de lire un livre... Mais contrairement à Lily, sa vraie vie à lui n'était pas passionnante.

« Tu vas commencer par quoi ?

— La potion, répondit-il sans hésiter.

— Oui, c'est bien les potions, approuva Lily. J'ai vu qu'on pouvait en faire toutes les sortes. Des potions de haine et des potions d'amour, tu imagines ? »

Elle regarda le mur d'en face d'un air rêveur.

« Je rencontrerai peut-être mon futur mari, à Poudlard. »

Ce sera moi, pensa aussitôt Severus. Et c'est à cet instant qu'il mit les mots : il était comme les personnages de livre. Amoureux. Et il détestait ça.

SEVERUS ROGUE : Le sens d'une vie (ENFANCE)Onde histórias criam vida. Descubra agora