Chapitre 05

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Péniblement, j'ouvris les yeux et fus un instant désorientée. La pièce était sombre mais pas comme s'il faisait nuit. Je tournais la tête et vis que le rideau était tiré et qu'à travers, le jour était levé ; cependant je ne me souvenais pas l'avoir fermé quand je m'étais couchée. Mais à quel moment m'étais-je couchée ? Une puissante douleur enserrait mon crâne et je me redressais. A ce moment quelque chose tomba sur la couverture devant moi que je pris par réflexe. Lorsque je constatais qu'il s'agissait d'un linge imbibé de sang, je me souvins d'un coup des évènements survenus durant la nuit. Je levais une main hésitante vers mon cou et posais mes doigts sur ma peau. Ce simple geste me tira une grimace de douleur, toucher cette petite zone me faisait mal. Je sentis les deux points où les dents avaient mordu ma chair et le sang qui avait séché.

Je sortis du lit et allais tirer le rideau, plissant les yeux sous la lumière qui m'aveugla. Lorsque je fus habituée, je jetais un œil dehors et devinais que la matinée était bien avancée. Sur le bureau il y avait de nouveau un plateau avec ce qui semblait être une part de tourte et des fruits des bois. Après un coup d'œil derrière le paravent, je constatais que la baignoire était remplie, mais l'eau était refroidie. Des gens étaient venus lorsque je dormais pour préparer tout cela, mais je devais être tellement vidée de mon énergie que je n'avais rien entendu. Je décidais de commencer par manger, histoire de ne pas m'évanouir, puis de me laver.

Je portais toujours les mêmes vêtements que lorsque j'étais partie de chez moi, ces derniers étaient dans un état déplorable. Mes bottes m'avaient déjà été enlevées, laissées non loin de la porte. Je laissais ma tunique et mon pantalon au sol, puis je tentais d'observer mon reflet dans l'eau. Une tâche sombre recouvrait mon épaule, mes cheveux étaient emmêlés et dans un piteux état, et mes yeux verts me fixaient avec épuisement. J'ignorais le froid de l'eau en entrant dans la baignoire, j'avais de toute évidence vraiment besoin de me laver de la sueur et du sang qui couvraient ma peau. Au moins, il y avait du savon et même une serviette posée à côté du bac. Je frottais intégralement ma peau mais du serrer les dents au moment de passer sur mon cou, finissant par me contenter d'enlever les traces de sang sans trop insister. Je pris le temps de laver mes cheveux et restais quelques secondes entièrement immergée. En remontant ma tête hors de l'eau, je grelottais et décidais d'écourter ma baignade.

En sortant enveloppée dans la serviette, je me trouvais face à un souci : je n'avais pas d'autres vêtements. Est-ce que je devais remettre ceux que j'avais laissé au sol malgré leur état ? Puis je me souvins qu'on m'avait parlé de m'apporter des tenues et sans trop y croire, j'allais vers l'armoire. Qui se trouva remplie cette fois. Je pris un vêtement et grimaçais en constatant qu'il s'agissait d'une longue robe blanche. Il y en avait plusieurs en fait et d'autres de couleur noire. En cherchant encore, je fus soulagée de trouver quelques tuniques courtes et des pantalons simples. Et au moins ces vêtements-là n'étaient pas noirs... Une fois changée, j'allais m'asseoir au bureau, mes coudes posés sur le meuble et mes mains jointes sur mon front.

Je repensais à la nuit dernière, à ce qu'on m'avait infligé. J'avais l'impression de sentir encore les dents de la ghoul s'enfoncer dans mon cou. L'officiant avait volontairement détourné ses phrases pour me cacher la vérité. Au fond, j'étais persuadée maintenant que personne ne m'attendait dans la forêt, qu'il avait inventé cela pour me faire prendre plus facilement une décision et me maintenir ici. Je songeais à l'autre porte au fond du couloir, une ghoul était sortie de l'une d'elle. Et si je n'étais pas la seule ? D'autres personnes servaient-elles de repas pour les démons ? Avaient-elles été piégées comme moi ?

Imaginer que j'allais devoir revivre ça plusieurs fois fit ressortir un sentiment d'angoisse mais aussi de colère. J'avais voulu échapper à la mort, mais pas pour me retrouver piégée à devoir donner mon sang pour des monstres ! Et s'il venait tous les jours ? J'allais finir par ne pas survivre. Je poussais un grognement de rage et me levais, mettant un coup de pied dans la chaise qui se renversa. Puis je pris le plateau dorénavant vide et le balançais contre la porte, jurant en traitant le vieil homme de tous les noms.

Fall for DarknessOù les histoires vivent. Découvrez maintenant