Juste un collègue...

Faire ses preuves

Nous restons tous les trois suspendus comme des idiots tant la situation est gênante ou, pour Tiphanie, scandaleuse...

Finalement, Carolina, hésitante, brise ce silence pesant :

«...Euh, oui, Damian, chez moi, oui...
- Ben justement, comment peux-tu encore le laisser entrer dans ta vie ?! Tu ne te souviens pas à quel point tu as souffert à cause de lui?
-... je suis toujours là, en fait.» Je tente, en secouant la main pour me montrer. Puisqu'elles se parlent comme si je n'étais pas là, alors que je suis juste allé déposer le sac de bouffe à trois pas d'ici, sur la petite table de l'entrée.

« On ne t'as pas sonné, toi. » Tiphanie rétorque, décidément convaincue que je suis le diable en personne.

« Tif, il faut que tu arrêtes de lui parler comme ça, vraiment.

Tu imagines bien que s'il est là, avec moi, c'est que j'ai décidé de lui pardonner.

C'est ma vie, et ce sont mes choix. Je sais que tu veux me protéger, et merci, mais nous avons eu l'occasion de longuement discuter, Damian et moi, du passé.
Et, justement, c'est du passé.

Nous nous sommes retrouvés après toutes ces années et... Tif, nous sommes heureux ensemble, comme nous l'avions été.

Enfin, mis à part ses écarts malencontreux.
Écoute, il m'a promis qu'il ne me trahirait plus jamais... et je le crois. Je veux lui laisser une chance.
J'en ai envie...
- Je ne comprends pas que tu retombes dans les mêmes trous... C'est dingue ! Après dix ans, tu te fais avoir de la même façon alors qu'il t'a détruite ! Tu devrais le fuir comme la peste !! »

J'en ai marre de me faire pourrir, là. Alors j'interviens.
« Je n'ai plus rien à voir avec le gars dont tu parles. Il s'est passé dix ans justement, Tiphanie. Tu ne penses pas que les gens évoluent ?

Tu ne penses pas que je m'en suis voulu pendant toutes ces années, de l'avoir perdue ?

Oui, j'ai fait des conneries et je le regrette amèrement encore aujourd'hui, mais je ne suis plus un gamin.

Ça n'a pas été si facile de la reconquérir, rassure-toi. Et c'est elle qui détient mon sort entre ses mains, cette fois.

Je ne représente plus aucun mystère, elle sait tout. Tout le monde dans mon entourage sait qui elle est et connaît son importance pour moi.
Elle a tous les moyens de me pister si elle le souhaite, elle peut accéder à toutes les infos qu'elle veut de moi...
- Et ce n'est même pas la peine, puisque je ne m'en sert pas.
Damian, finalement, je n'ai jamais cherché à te « fliquer », te localiser ou à regarder dans ton téléphone. Ça ne m'intéresse pas.
Je n'aime pas faire ça.

Non, j'ai décidé de te donner ma confiance, à nouveau, totalement. Je préfère agir de cette manière plutôt que de vivre dans la crainte.
Si je dois tomber, je tomberai, de toute façon. Mais je préfère t'offrir cette vraie seconde chance, entièrement.

Ça ne sert à rien de te fuir... ça ne sert à rien de me mentir...

Je t'aime.

Je t'ai toujours aimé, et je t'aimerai toujours.

Tu n'es pas là parce que tu m'as supplié. Tu es là parce que je l'ai voulu.

Tu es là parce que j'ai besoin de toi dans ma vie, et parce que tu es le seul qui me fait vivre l'amour, le vrai... celui qui donne la chair de poule et les papillons dans le ventre... celui qui peut me détruire, oui, mais qui peut aussi me donner des ailes...

Et je suis convaincue qu'aujourd'hui, tu n'as que pour ambition... de me voir voler... »

Carolina retient ses sanglots. Et je ne peux contenir mon envie d'accourir pour la prendre dans mes bras. J'en n'ai plus rien à foutre de la présence de sa sœur. Tout ce que je veux, c'est la serrer pendant qu'elle se laisse pleurer, trop émue par ses propres confessions.