Ma vie rêvée

Coachella

*Dans ce récit le festival de Coachella n'est pas financé par un mâle cisgenre dominant supremaciste blanc, homophobe, sexiste et problématique. C'est un festival certes capitaliste un brin élitiste, mais que voulez-vous, on reste en 2023. Et comme indiqué dans le disclaimer, je remanie des éléments de la réalité pour mon histoire, parce que ça m'arrange.*

J'espère sincèrement que cette histoire, ce récit vous plaira autant qu'il m'a plu de l'écrire. Je répondrais avec grand plaisir à toutes questions si vous en avez. En attendant soyez les bienvenus dans mon univers, en espérant que vous l'apprécierez.

Bonne lecture :)

***

Tia entend un grondement sourd. Son oreillette n'a pourtant pas commencé à lui envoyer le retour son, puisque la musique n'a pas encore démarré. Peut-être est-ce le vacarme de ses pensées qui s'agitent dans sa tête, et qui résonnent au fond de ses tympans. Ce n'est plus le moment de réfléchir. Elle connaît les paroles et la chorégraphie. Même si son cerveau cessait de fonctionner maintenant, son corps saurait exactement quel muscle activer, quel mouvement effectuer à la seconde près. Il faut qu'elle respire et se calme. Ce n'est pas la première fois qu'elle monte sur scène, entend cette clameur, et voit ces lumières. Tout va bien se passer, elle en est capable.

La musique démarre, et le monde cesse de tourner. Elle exécute la prestation, bouge chacun des membres de son corps dans ces mouvements tant répétés ; n'étant même plus sûre de les comprendre. La jeune idol enchaîne les pas, sa voix chante les notes, sa bouche articule les mots. La foule chante avec les Blackpink et scande leurs noms tour à tour. Comme à chaque fois qu'elle entend son nom crié par des milliers de voix, Tia a des frissons.

La chanson et la chorégraphie continuent. Puis viennent les dernières notes et la musique s'arrête. Après quelques millisecondes de silence, les cris et les applaudissements du public se mettent à résonner dans la nuit. Sa transe commence à s'estomper, la laissant doucement reprendre vie. Elle regarde ses amies souriantes et fières. Les cinq jeunes femmes se prennent dans les bras toutes ensemble, ne disant pas un mot, écoutant juste cet écho.

Tia, pourtant surentraînée, a du mal à reprendre son souffle. Alors que son corps devrait être habitué, cela fait un an qu'elle travaille presque tous les jours pour atteindre le niveau de ses amies. D'autant que ses débuts sont arrivés en même temps que son entraînement. Des scènes, elle en a déjà fait plein. Mais celle-ci est spéciale, il faut le reconnaître. C'est le meilleur moyen de donner à la Kpop la résonance internationale qu'elle mérite, les enjeux sont énormes.

Mais Tia doit vite se ressaisir, le plus dur reste à venir. Jusque-là, elle était accompagnée de ses amies, l'attention était répartie entre les cinq membres du groupe. Dans quelques instants, la jeune artiste va devoir performer seule sur sa chanson. Les regards seront tous braqués sur la cinquième membre, seule. La moindre erreur sera vue, analysée, décortiquée. Elle n'y a pas droit, se l'est toujours interdit, et aujourd'hui plus que jamais.

Elle part rapidement en coulisses, se change en un tour de main, et revêt la tenue prévue pour son prochain titre. Heureusement celle-ci est très simple, même si les talons sont affreusement hauts. Un pantalon gris qui se définit difficilement entre le pantalon à pinces et le jogging, un débardeur chair et des bottines à lacets. Elle ébouriffe volontairement ses cheveux gris cendrés, et la voilà prête. Pas d'extravagance, Tia se remémore les mots de la styliste «less is more». Ça lui convient très bien, ayant déjà bien assez à penser avec la nouvelle version de son titre qu'elle va devoir interpréter en concert pour la première fois. *Devant quarante mille personnes.* se rappelle-t-elle intérieurement.
Elle sort des loges et se dirige d'un pas décidé vers la scène, croisant en chemin ses danseurs. Ils lui disent quelques mots d'encouragement, rendus dans un hochement de tête entendu et un sourire crispé.