★ LA BOUCLE TEMPORELLE DES ÂMES SŒURS

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NDA ; bonne lecture!

CHAPITRE 19
La boucle temporelle des âmes sœurs.

Je suis sûr que oui.

LU GUANG n'a sans doute pas mesuré, en disant ces mots, à quel point ils sont importants pour Cheng Xiaoshi. Pour lui, qui n'a cessé de redouter que le jeune homme aux cheveux blancs qui lui sert d'âme sœur ne change d'avis, cette promesse qui ne se présente pas comme telle vaut tout l'or du monde.

Encore plus peut-être qu'un baiser qu'ils n'ont finalement toujours pas échangé ― Cheng Xiaoshi a pu se retenir, tant bien que mal, de demander au jeune homme aux cheveux blancs ce baiser qui lui fait pourtant tant envie.

Il aime le chemin que prend doucement leur relation.

Il aime se réveiller en ne se sentant non pas dépité de voir cette journée qu'il déteste se répéter encore et encore, mais plutôt enthousiaste à l'idée de revoir Lu Guang et d'apprendre encore, et encore, et encore à le connaître, tant que le jeune homme ne pourra pas le fuir de nouveau en se cachant derrière son scepticisme des âmes sœurs.

Il aime connaître de mieux en mieux son interlocuteur, et sentir de plus en plus son cœur fondre à son écoute.

Si Lu Guang veut encore une preuve que leur relation peut réellement exister, qu'ils peuvent nourrir l'un pour l'autre des sentiments même en étant forcés par le destin, Cheng Xiaoshi veut bien lui donner sa propre expérience. Parce que plus le temps passe, plus il sent qu'il tombe amoureux de son âme sœur avec une intensité qui n'a rien de faux. Et plus le temps passe, plus la profondeur de ces sentiments grandit ― et il ne doute d'ailleurs pas qu'une fois la boucle brisée, s'ils parviennent bel et bien à continuer de se voir, ses sentiments ne feront que s'accroître.

Ce jour-là, c'est avec un esprit particulièrement léger qu'il aborde cette énième répétition de la journée, sans passer plus de temps que cela à songer au fait que la boucle ne s'est toujours pas brisée.

Il ne pense qu'à retrouver Lu Guang, et à passer encore davantage de temps avec lui.

Il est réellement mordu.

Se sortir de son lit et se motiver à aller travailler lui prend toute son énergie ― il hésite bien sûr longuement à tout simplement rater encore une fois le travail, mais Lu Guang et lui ont convenu de se revoir ce soir pour éviter de trop mettre en péril leur travail en séchant allègrement sans savoir si le jour s'effacera ou non des mémoires collectives. Il parvient ainsi à s'y résoudre en pensant à ce qui l'attend cette soirée-là, au fait qu'il pourra bientôt à nouveau retrouver son âme sœur et continuer de passer du temps avec elle, en espérant que les sentiments qui émergent de son côté alors qu'il passe tout son temps avec Lu Guang connaissent la même évolution de l'autre côté.

Il se dirige vers son lieu de travail en traînant des pieds ― il a encore raté le bus bien sûr, mais ne fait plus aucun effort pour l'attraper, puisqu'il sait qu'il est condamné à arriver en retard. L'avantage d'être coincé dans une interminable boucle temporelle, s'il y en a un, est de savoir que quoi qu'on fasse, le destin reprendra toujours ses droits sur certains aspects. Il a beau essayer d'arriver à l'heure, tant qu'il est coincé de la sorte, il se passera toujours quelque chose qui lui fera rater le bus. Tout comme il est condamné à ne jamais pouvoir attraper le voleur. Et tout comme Lu Guang doit forcément recevoir ce fichu bouquet de coquelicots.

Les journées s'enchaînent, mais ne représentent finalement qu'un seul jour, sans qu'il puisse se reposer plus d'un instant, puisque le week-end et ses congés semblent rendus inatteignables. Et sans qu'il puisse échapper au regard noir de son supérieur, qui le lui adresse toujours quand il arrive en retard ― et parce que cela fait dix jours que Cheng Xiaoshi est en retard dans son univers, il a l'impression d'être constamment en train d'ennuyer Qian Jin, qui lui adresse toujours un regard noir, mais sans faire la moindre remarque dans cette boucle temporelle...

« Cheng Xiaoshi, tu oublies que tu as un travail ces jours-ci ? »

En tout cas, c'est ce que le jeune homme aux cheveux noirs a naïvement pensé jusque-là.

C'est bien la première fois que son patron émet une critique sur son retard dans la boucle temporelle.

Tout comme c'est la première fois que Qiao Ling l'attend à leur endroit habituel dès le début de la journée au lieu de le rejoindre plus tard.

« Tu essayes de rendre fou Qian Jin ou quoi ? » Une fois de plus, Cheng Xiaoshi est pris de court ― c'est la première fois que Qiao Ling lui adresse ces quelques mots depuis le début de la boucle. Y a-t-il quelque chose de fondamental qui a changé, à l'instar de la fois où Lu Guang est venu sur son lieu de travail ?

« Pas plus que d'habitude. » répond-il le plus naturellement possible, sans trop savoir à quoi s'attendre par la suite. Lui qui pensait que le destin essaie toujours de revenir à son point de départ...

« T'es sûr ? Parce que sécher le travail une journée entière et arriver en retard le lendemain, tu n'avais pas encore essayé. Tu dis toujours qu'il va te le prendre sur ton salaire si tu fais ça. »

Cheng Xiaoshi fronce les sourcils en essayant de comprendre ce qu'elle lui dit. Sécher le travail une journée entière ? Ce n'est pas dans ses habitudes ― pour préserver son salaire ― et ce n'est surtout pas ce qu'il a fait ce mercredi-là. Les propos de Qiao Ling ne font aucun sens, sauf si...

Une graine de doute germe dans son esprit.

« Qiao Ling, on est quel jour ? » Sa petite sœur le dévisage comme s'il était devenu fou.

« Comment ça, on est quel jour ? T'es encore endormi ou quoi ? »

Voyant qu'il ne semble pas plaisanter, elle hausse les épaules et prononce, sur le ton d'une évidence, les mots que Cheng Xiaoshi veut et ne veut pas vraiment entendre.

« On est le 25 octobre. »

Le 25 octobre.

« Vendredi. »

Le temps a recommencé à avancer. 

JUSQU'À CE QUE FANENT LES COQUELICOTS - 𝗹𝗶𝗻𝗸 𝗰𝗹𝗶𝗰𝗸Where stories live. Discover now