Chapitre 11 : Réveil difficile

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Emma

Et voilà que je me réveille ici. D'ailleurs, je suis où ? Mon matelas est bien plus confortable. Et les odeurs nauséabondes ont disparues. Il fait excessivement chaud. C'est étouffant. Ai-je changé de pays ? Est-ce déjà trop tard ? Ma vie m'appartient-elle toujours ? Suis-je maintenant la propriété d'un homme complètement fou ? Toutes ces questions me torturent l'esprit.

J'essaie de me relever pour observer mon environnement. Très vite, je plaque l'intérieur de mon coude contre mes yeux. En me redressant, j'ai l'impression d'avoir pris un violent coup dans la tête. La douleur irradie dans mon cerveau. L'éclairage de la pièce m'agresse. J'inspire et expire longuement. Peu à peu, les pulsations désagréables s'estompent. Encore légèrement sensible, je me tourne sur le côté du lit par précaution. Je fais glisser mes jambes et laisse mes pieds toucher le sol. Avec une lenteur calculée, je me redresse. Lorsque je suis bien stable sur mes appuis et que la luminosité ne me paraît plus être violente, j'ouvre les yeux. C'est certain, j'ai changé d'endroit. Cette pièce est vilaine. La personne qui l'a décorée a des goûts douteux. Les couleurs, trop nombreuses, ne sont pas accordées et trop criardes. Les meubles sont dépareillés. Il n'y a ni objet ni tableau. Heureusement. Cela n'aurait fait qu'ajouter de la surcharge à cette chambre sans aucun charme.

J'ai un problème mental, c'est sûr ! Je ne reconnais pas l'endroit où je me trouve, je ne sais pas ce qui m'attend. Et je fais quoi ? Je m'appesantis sur la déco... Maintenant c'est certain, le type qui m'a assommée m'a laissé un pète au casque.

D'ailleurs, il y a plus urgent que mon aversion pour la vilaine peinture jaune qui recouvre les murs. J'empeste l'urine. Je n'ai pas l'impression que ce soit la mienne. Malgré ma répugnance à me soulager devant tout le monde et dans des conditions qui manquaient cruellement d'hygiène, j'ai marqué un point d'honneur à ne pas me souiller. Mes agresseurs auraient pris trop de plaisir à me voir me dégrader moi-même. Jamais de la vie ! Je n'autoriserai personne à détruire ma volonté. Mais alors... Ça signifie que je porte les odeurs d'excréments d'autres personnes. Cette idée va me faire dégueuler. Il faut que je trouve une solution pour me rafraichir.

Je tends l'oreille. Je n'entends aucun bruit. Je ne sais pas si je peux me fier à mes perceptions. La porte me paraît énorme. Massive. Son épaisseur ne doit pas laisser filtrer le moindre écho. Malgré tout, je suis lucide. S'il doit m'arriver quelque chose, ça arrivera. Que je sois consciente ou pas. Rien ne me sert de faire semblant de dormir encore. Autant que je me débarrasse de ma crasse.

Il faut que je passe à l'action. Mon cœur bat comme un fou à l'idée d'explorer la pièce. Je me demande si je ne risque pas de provoquer la colère de mon « hôte » si je me permets de visiter les lieux. Mes mains sont moites. J'ai la boule au ventre. Le stress recommence à me submerger. Mon mental travaille trop. Il faut que je le fasse taire sinon je vais perdre mes moyens. Surtout, depuis quand je laisse quelqu'un m'imposer ce que j'ai le droit de faire ou pas ? Je suis plus forte que ça.

— Allez ma grande ! Bouge-toi !

Je me parle toute seule. Non seulement ça m'encourage, mais ça évite aussi que je sombre dans l'hystérie.

La chambre est immense. Il y a deux portes. L'une que j'imagine être la sortie étant donné la grosseur des gonds. Et l'autre, par déduction, doit être celle des sanitaires. À moins que ce ne soit un dressing ? Pitié... J'ai besoin de me faire une toilette. J'espère que la première option est la bonne. Faites que cette ouverture débouche sur un point d'eau. Avant de penser à me changer, il faut d'abord que je me lave. Tout en maintenant un degré de vigilance élevé, je me déplace vers ce que je souhaite être une salle de bain. Je pose ma main sur la poignée et mon cœur s'affole encore davantage. J'ai peur de découvrir ce qui se cache derrière la cloison. Je souffle un bon coup et appui sur le mécanisme d'ouverture. Alléluia ! Je vais pouvoir me séparer de cette puanteur.

De ce côté, c'est l'opposé. L'espace est harmonieux, épuré. Il n'y a pas de mobilier superflu. Le gris des murs contraste avec le bois clair des meubles. La baignoire, dans l'angle de la pièce, me fait de l'œil. J'ai très envie de me prélasser dans l'eau chaude. Je n'oublie pas ma triste réalité. Je ne parviendrai pas à me détendre Alors j'opte pour une douche rapide. J'enlève ma robe qui est irrécupérable tellement elle ne ressemble plus à rien. Et je me glisse sous le jet. Je frotte mon cuir chevelu et ma peau aussi fort que je le peux. Pour faire disparaître toutes les traces de ce mauvais souvenir. Malheureusement, la douleur que je ressens lorsque je me nettoie le visage me rappelle que j'ai pris un coup. La marque mettra plusieurs jours à s'estomper. Les effluves du gel douche sont agréables. Douces. Fruitées. Cela me permet de me calmer et de me recentrer sur l'instant présent. Pour le moment, tout va bien, personne ne me maltraite. Il faut absolument que je reste positive. Salomée va bientôt venir à mon secours. Je dois garder cette idée en tête. Malheureusement, mon esprit critique prend le dessus. Et si tous les accessoires de toilette mis à ma disposition n'étaient qu'une façon détournée pour que je me rende moi-même présentable avant d'être livrée au fou furieux que mes deux agresseurs ont mentionné ? Qu'ont-ils dit déjà ? Ah oui ! Ils avaient pour ordre de ne pas me toucher. Mon angoisse monte en flèche. Elle est à son paroxysme lorsque je me rends compte que les armoires de ma chambre sont vides. Il n'y a aucun vêtement. Le message est clair. Je dois rester nue. Oh non ! Non ! Tout, mais pas ça ! Je ne m'abaisserais jamais à ça. Je ne veux pas être exposée comme une vulgaire marchandise ! Au risque d'être battue pour m'être opposée à la volonté de.... De qui d'ailleurs ? J'arrache le drap du matelas, je m'enroule dedans et je le noue par-dessus mon épaule. Dans d'autres circonstances, j'aurais pu apprécier mon apparence. Je ressemble à une déesse grecque. Cette fois, je tremble d'être autant exposée. Toutefois, il y a quelque chose que je ne comprends pas... Je n'ai pas de vêtements pour m'habiller. Par contre, on me fournit du gel douche, du linge de lit et une multitude d'oreillers. Mon matelas était même bordé. Summum du confort. Au choix : soit mon geôlier est tordu et il aime donner les choses au compte-goutte. Il faut les mériter. Ce qui ne me rassure pas du tout. Soit il est sacrément débile. Mouais.... Dans les deux cas, il est complètement con.

Mon analyse m'arrache un sourire. Je fais ce que je peux pour refouler la terreur qui s'est installée en moi. Insulter l'homme responsable de ma situation est un bon moyen de retrouver un semblant de calme. Ça me fait du bien.

Mon répit est de courte durée. J'entends une clef tourner dans la serrure. Mon instinct de survie me pousse encore une fois à agir sans réfléchir. Je me poste devant la porte et me tiens prête à attaquer. Je ne sais pas qui va apparaître, mais je me débattrai jusqu'à en perdre la vie, s'il le faut. Et c'est certainement ce qui va se produire. La première altercation, dans la camionnette, n'a pas été une réussite.

Lumière et ténèbres - tome 2 - Emma (premier jet)Wo Geschichten leben. Entdecke jetzt