Chapitre 26

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- Tu avais raison, dis-je à demi-mot. Je n'aurais pas dû m'éloigner.

Assise sur l'îlot de la cuisine, j'observe Caleb désinfecter soigneusement ma blessure à la cuisse, les manches de sa chemise relevées, son nœud de papillon défait autour du cou. Ses gestes sont minutieux, d'une délicatesse désarçonnante. On dirait qu'il a soigné des plaies béantes toute sa vie.

Le calme règne dans l'immense maison aux airs de château. Ambroise est parti se coucher et Dahlia a filé à bord de sa décapotable pour s'amuser quelques heures avant que « le soleil ne se pointe. » De mon côté, le trajet en voiture m'a fait du bien. La pression est redescendue dans ma poitrine et je savoure le simple fait d'encore respirer. Quand on manque de la perdre, la vie a ensuite un goût si particulier...

Caleb lève ses yeux bleus vers les miens et lance d'un ton assuré :

- J'ai toujours raison. Pourtant tu ne m'écoutes jamais.

- Mais ce serait tellement ennuyant si c'était le cas, rétorqué-je.

Il fronce les sourcils. Malgré mon sourire timide, ma remarque n'a pas l'air de lui plaire. Le ton n'est visiblement pas à la blague ce soir.

- On dirait que tout ça t'amuse, dit-il en posant le désinfectant et la compresse imbibée de sang sur l'îlot. 

- Tu préférerais que je pleure ?

Son visage devient glacial. Presque terrifiant.

- Non, je préférais que ce ne soit jamais arrivé, crache-t-il. Tu ne réalises pas la gravité des événements ? Tu crois que tout ça est un jeu, Iris ?

Je peste en haussant les épaules :

- Qu'est-ce que tu attends de moi ? Désolée mais je ne suis pas faible et je ne vais pas me laisser terrasser par la peur ! 

- Dans un monde normal, tu ne devrais même pas avoir à me dire ça.

Il fixe ma blessure à l'épaule puis celle que j'ai maintenant à la cuisse et ses yeux deviennent plus sombres que jamais.

- Regarde-toi putain, pas un jour ne passe sans que ton sang coule et ça te fait rire ?

- Mais je vais bien !

Pour être honnête, en disant ça, j'essaye de me convaincre que l'aile de la mort ne m'a pas frôlée, que les dangers qui rôdent ne sont que des mirages. Parce que je ne veux pas sombrer de nouveau. Je veux avancer. J'ai déjà perdu trop de temps dans ma vie à cause de mauvais cauchemars. Et j'ai choisi d'être ici, alors j'assume.

- Je vais bien, répété-je plus calmement. On va trouver une solution. Je ne laisserai pas la crainte gagner ou... nous éloigner. 

- Non, tu ne vas pas bien, Iris.

- Ne parle pas à ma place, Caleb.

- Ta place, justement, n'est pas ici.

Je descends de l'îlot pour lui faire face, irritée par sa remarque cinglante.

- Tu ne penses pas ce que tu dis.

- Si et je le pensais sincèrement quand j'ai dit que j'avais fait une erreur en t'emmenant ici.

Ses mots me transpercent le cœur comme une lame aiguisée. Ils me procurent la même douleur que cette balle de plomb lorsqu'elle s'est enfoncée dans ma chair. Peut-être même plus mal encore. 

Je le dévisage avec des yeux humides, totalement perdue. Un jour c'est noir, un jour c'est blanc. Un pas en avant, dix en arrière. Son comportement ne connaît pas de régularité. C'est comme s'il se battait contre lui-même. Et contre moi.

Monomanie - Tome I - Rouge passionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant