CHAPITRE 30 - Isadora

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Oui, John.

Plonge en moi comme dans un océan d'étoiles, comme dans un désert scintillant, ou comme dans un ciel aux nuées charnelles.

Adore-moi comme tu me l'as demandé hier soir. Adore-moi comme Renoir a adoré Aline. Embrasse-moi comme l'âme de Roméo a embrassé celle de Juliette pour l'accompagner dans son dernier soupir.

Fais-moi tout découvrir.

Fais-moi vivre.

Fais-moi survivre.

— Non.

Je tombe des nues. Mes mains relâchent ses joues, comme emportées par un vent violent, kidnappées par une tornade qui arrache les moindres parcelles de ma demeure intérieure, qui part en lambeaux. La voix de John est encore plus grave que jadis, résonnant dans mes tympans comme un hurlement d'effroi.

— Comment ça, non...? Bredouillé-je, confuse.

John s'humecte les lèvres et secoue le visage de gauche à droite en fermant les yeux.

— C'est au-dessus de mes forces, Isadora.

Encore une fois, mes larmes deviennent de simples coulées d'encre. Aussi noires que le corbeau. Aussi cuisantes que la braise. Mais tout aussi inertes que mon âme.

John se détache de moi, et passe une main sur sa nuque en faisant les cent pas dans l'immense cuisine. Quant à moi, je suis forcée de me maintenir au plan de travail à l'aide de mes mains moites et tremblantes, trop faible pour tenir sur mes jambes.

— Ose me dire que tu n'en as pas envie, Pinocchio... Le provoqué-je avec un demi-sourire, pensant toujours à une plaisanterie.

Tu te joues de moi, John, c'est ça, hein ?

Non, je ne veux pas admettre que John puisse se refuser à moi. Pas après ce qu'il s'est passé la veille. C'est tout bonnement impossible de changer autant en quelques heures. J'étais persuadée d'avoir perçu de l'amour dans ses prunelles glaciales.

C'en était...

Hein, John ?

— Ose me dire que tu n'es pas terrifiée au fond de toi, Pocahontas ! Me répond enfin le principal concerné, avec un air on ne peut plus sérieux.

— Aucun rapport.

— C'est vrai. J'ai rien trouvé d'autre.

J'ai envie de pouffer de rire, mais la situation me l'interdit. Tout ce qu'il se passe est beaucoup trop grave pour laisser place à une quelconque plaisanterie.

Revois tes classiques, John.

Nous restons silencieux un moment. Je ne peux priver mes yeux u paysage que mon beau-père m'offre. Le corps de John m'est quasiment entièrement exposé. Il est si beau, si bien proportionné, qu'aucun autre homme ne fera jamais le poids. Personne ne lui arrivera jamais à la cheville.

Je baisse la tête et m'avoue vaincue. Je ne sais pas ce que j'ai cru, mais visiblement, c'était une illusion. De longues minutes passent, et plus aucun son ne sort de nos bouches respectives. Je ne perçois même plus la respiration de John, à quelques mètres, accoudé sur l'îlot central, en direction de la porte-fenêtre qui donne une vue imprenable sur le ciel marine et ses reflets étoilés sur les ondulations de l'eau nacrée qui recouvre une partie du jardin. Puis, enfin, il se décide à tourner la tête dans ma direction sans se rapprocher pour autant :

— Alors... C'est vraiment ce que tu veux... Tu ne dis pas ça à la légère ? Ose-t-il.

Je n'ai même pas besoin de répondre par la parole. Je relève les yeux vers lui, en prenant le temps de remonter le long de ses courbes et de suivre le chemin qui me mène à son visage. Une fois que j'atteins ses yeux, j'y vois un éclat ardent qui est certainement le reflet du mien.

DADDY'S GIRL - TOME 1 - The DaddyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant