30 - Anges déchus

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Les deux polarités se rencontrent d'un impact si étincelant qu'on contemple enfin où ils ont mis les pieds. La roche est façonnée en gravures, sculptures gigantesques qui recouvrent les parois d'Ouest en Est.

Ce sont des silhouettes ailées, tous recouvertes de racines d'arbres et de fleurs. Des escaliers craquelés montent sur un renfoncement bien plus loin, masqués par quelques lianes qui pendent comme des rideaux...

L'officier est incapable de suivre et de marcher sur les sentiers de leur puissance démentielle. Choqué, confus par l'incompréhensible, seuls les rats se mettent à l'action, sans étonnement.

- TOUT VA S'ECROULER, MES RATS ON Y VA. s'écrie le petit rat'mo. 

Les mâles dévoilent un drap sombre derrière lesquelles ils s'amassent. Tout se passe vite : leur corps se déforme, s'allonge jusqu'à prendre forme humaine, où ils ne gardent que leur oreilles ou leur queue. L'argenté leur fait face, prêt à bondir à l'assaut s'ils étaient ennemis, mais ceux-ci ne daignent le regarder, plongés de leur initiatives. 

Ils se hâtent. D'un sac ils déballent des tissus plus grand pour enfiler des vêtements plus à leur taille. Hélas le temps les rattrape. Des éclairs jaillissent de l'affrontement pour percer la pierre par éclat. Ils s'enfuient à pied joint entre un pantalon à moitié revêtis, attaqués par des forces qui les dépassent. 

Drystan face au ridicule, sourit. Il relativise assez la situation pour intervenir. Promptement. Ses câbles d'argents s'étirent, s'accrochent, se multiplient sur les murs pour les renforcer. Les fils se fragilisent mais il les tirent contre lui, c'est dur, c'est lourd, à tout moment ça s'effondre. Ses muscles raidis, il tremble, mais tient bon. Il retient les pierres de s'écrouler avec toute la rage dont il dispose encore. La rage de vivre, la rage de soutenir pour la première fois un enfant dont le destin semble être plus grand que lui, plus grand que tout. Il hurle de toutes ses forces vers le ciel pour prier qu'il soit utile, qu'il ne soit pas là en vain.

L'intensité des secousses augmente, ses genoux se plient, son visage rougit, la pression le tord de douleur mais il ne lâche rien. Le moindre nerf se crispe par la tension qu'il subit mais il n'abandonnera pas. 

Arwan est dans un autre monde, il est parti, gouverné par des pensées et des sensations nouvelles et anciennes à la fois, c'est une histoire de longue date. Un passé qui provient des gènes, c'est une guerre plus profonde que le seul bien contre le mal. Il avance avec le sourire car il se sent puissant, et c'est difficile à contenir. Mais il y a autre chose, une fierté qui se dissimule et qui grandit au fur et à mesure qu'il se fond dans cette énergie qui prend le pas sur lui. Un pas après l'autre, l'archange fait reculer les monstres, qui grognent, glissant sur la pierre qui se fend sous leur pied...

 Subitement, le jeune homme perçoit quelque chose d'étrange.  Les énergies s'entrechoquent puis s'illustrent d'une peinture vivante : ça bouge, ça vit. Des jeux d'ombres dans la lumière, des jeux de lumières dans l'ombre : une scène de théâtre qui jouent avec les sens.

Ils forment des personnages, qui se dessinent, dansent et expriment une histoire qui se ressent au plus profond de lui. Des sons et des images lui parviennent. Tout démarre d'un ange qui était au cœur d'un royaume de lumière et de nuage, très proche de tout-puissants, ces êtres qui maniaient l'origine de la création, des éléments si grands qu'ils pouvaient construire des mondes... Il était aimé, mais leurs attentions sont très vites tombés sur les civilisations des univers qu'ils avaient bâtis. Il était jaloux et s'opposaient, jusqu'à ce qu'il accepte leur requête '' Regarde-les de plus près.''. 

Curieux puis fasciné de voir ce qu'ils avaient de si beau,  il a pris leur forme et s'est manifesté auprès d'eux, dans ces lieux à leur image, d'une beauté à coupée le souffle par ces clairières, ces jardins et natures qu'il aimait tant. Ils vivaient tous en paix, comme eux, et l'exaltation de découvrir un nouveau peuple était telle qu'il ne pouvait pas s'empêcher d'y vivre un temps. 

Plongé dans son exploration, il a découvert l'existence de deux arbres : celui de la connaissance du bien et du mal, et celui de la vie. C'est comme ça que ces peuples les nommaient, mais ils étaient formels là-dessus : personne ne devait les approcher, et il ne fallait surtout pas manger leur fruits.

Mais cet homme ne pouvait pas obéir, il fallait qu'il comprenne pourquoi parmi toute cette beauté, il y avait un endroit de rêve qui leur était interdit. Il a pris audience avec les dieux, mais ils ne voulaient pas l'écouter, à la place :  ils lui ont ordonné d'être le gardien des lieux. Voilà la punition qu'ils avaient réservés pour avoir voulu connaître l'interdit. Il était rejeté, incompris, personne ne l'entendait, ne le considérait. Personne, sauf elle. Une existence simple et contrainte, une damoiselle du peuple esclave, qui pensait librement, l'écoutait et partageait ses points de vue. C'était quelque chose qu'il n'aurait jamais pensé connaître, et dont il est tombé amoureux. 

 Le véritable fruit interdit, la liaison entre les hommes et les anges ont mis les dieux en colère. Sa dulcinée a disparu, enlevée par leur volonté. La rage qui en suivit a mené l'ange qui était aimé des dieux, à les détester. Mais il n'a rien pu faire, nombres sont ceux qui l'ont suivi dans les flammes d'un monde qu'ils avaient réservés à ceux qui les désobéiraient...

- ARWAN ! s'écorche la voix Drystan d'un cri strident. 

Le petit revient à lui, le choc d'énergie se brise d'un souffle qui propulse les ennemis contre un mur qui s'effondre. Tout commence à se briser. Le petit fuit, fonce pour attraper la main que l'ancien officier lui tend : 

- MONSIEUR ! crie-t-il en se jetant près de lui. 

L'auréole brille toujours, il s'oriente jusqu'à s'approcher de l'argenté. Ce dernier se décroche, prend le petit sur le dos et fonce en direction de l'escalier,  pousse les lianes puis tombe sur une petite pièce qu'il ignore pour s'approcher de la porte de sortie. Ce n'est pas le cas d'Arwan, les yeux rivés sur la pyramide miniature qui lévite au centre d'une stèle. Il s'apprête à se jeter dans une falaise mais le petit en fait qu'à sa tête. Il saute pour attraper l'objet qui flotte. C'est juste, à peine l'a-t-il en main qu'il le soulève par le col pour le reprendre. Drystan glisse sur une pente, court aux abords d'une falaise, puis se jette dans le vide avec Arwan qui a une sensation de déjà vu. Quelque chose flotte à côté d'eux : les rats-humains aux muscles saillants sont à leur hauteur. Rat'mo se confie avec humour :

- On est peut-être parti en froid, mais on a eu chaud non ? 

Sa personnalité semble avoir changé, et étrangement, le petit ne tient plus aucune rancœur envers lui. D'un sourire nerveux en vol, il lui dit :

-  T'es qui ? !

Son corps tournedans tous les sens. Les fils d'argent les balancent comme des lianes, de looping en acrobaties légendaires pour éviter les pics qui se présent. Les rats suivent la cadence, l'un d'eux s'impose devant les autres par son pouvoir de déplacement. Il disparaît et réapparaît avec son ombre comme il le souhaite. Les autres suivent difficilement, l'un d'eux court sur les murs de la falaise, d'autres s'accrochent à leur chef pour qu'ils soient eux aussi transportés. 

En bas : un gouffre tracé en cercle, une bataille fait rage : Jack esquive comme il peut les coups de ses adversaires. 

Arwan & JackOù les histoires vivent. Découvrez maintenant