4 - Excès de boisson

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Tu ne devrais pas porter cette robe, déclara Jason sur le ton du reproche, assis sur le lit de Karen.

Celle-ci baissa les yeux sur sa tenue. La robe d'un rouge discret retombait à mi-cuisse, le bustier était fait de façon à ce que sa poitrine soit mise en valeur et les manches larges s'évasaient autour de ses mains.

-Pas assez sexy ? demanda-t-elle, curieuse.

Elle l'avait acheté quelques mois plus tôt, dans l'idée de la porter lors d'un premier rendez-vous, persuadée qu'elle plairait. S'était-elle trompée ?

-Pas du tout, s'exclama Jason en se redressant. Au contraire, je dirais.

-Dans ce cas où est le problème ?

Il soupira, secouant la tête comme si elle était idiote.

-Tu es trop sexy, Karen. Avec un homme comme celui-ci...

-Tu seras là, de toute manière, le coupa Karen. Tu as réservé à la même heure, n'est-ce pas ?

-Oui, mais... je ne pourrais pas forcément tout voir, tu sais. Je ne serais peut-être pas toujours en mesure d'intervenir si jamais tu avais un problème.

Elle haussa les épaules.

-Tu t'inquiète trop. Renaud ne me fera pas de mal.

-S'il découvre ce que nous sommes en train de faire...

-Il ne le découvrira pas.

Elle en était sûre. Renaud était peut-être un homme intelligent – elle allait s'en assurer ce soir – mais il ne la percerait pas à jour. Au pire, il pourrait la prendre pour une escroc. Ce qu'elle était devenue, depuis peu...

*

**

Galamment, Renaud tira la chaise pour permettre à Karen de s'asseoir.

Il n'avait pas choisi un restaurant de luxe, même s'il était plutôt huppé. Karen était contente d'avoir choisi une tenue qui correspondait à cet environnement. Renaud également, d'ailleurs. Son costume bleu nuit était taillé dans un tissu luxueux, dont elle ne comprenait pas l'intérêt, sa chemise brillait comme de la soie.

Si factice que s'en était inintéressant.

Avec un sourire de remerciement, elle s'installa tandis qu'il repoussait la chaise derrière elle. Quand il contourna la table pour s'installer face à elle, Karen ne put s'empêcher de remarquer de remarquer l'agréable rondeur de ses fesses tendant le tissu de son pantalon taillé sur mesure.

Ce qui l'aurait émoustillée si elle ne l'avait pas autant méprisé.

-Vous êtes superbe, déclara-t-il comme s'il lui faisait le compliment du siècle.

Plutôt que de répondre à cette idiotie, elle conserva son sourire. Pour le garder figé sur son visage, elle pensait à ses choses agréables. Comme ce que Renaud ressentirait lorsque tout lui exploserait au visage.

Elle avait hâte d'y être.

Il avait retiré sa veste de costume pour la déposé sur le dossier de sa chaise. Sa chemise avait été choisie pour mettre en valeur son corps de la meilleure des manières. Si évident. Après tout, elle avait fait exactement la même chose.

Elle ne pouvait pas le supporter, mais elle devait au moins lui rendre une chose.

Elle appréciait de jouer avec un homme à sa hauteur.

*

**

-C'est tout de même incroyable, s'exclama Jason alors qu'elle entrait dans la voiture.

-Quoi donc ?

Elle posa son sac à ses pieds et se reposa sur l'appui-tête. Ça avait été le repas le plus épuisant de sa vie. Aussi exécrable qu'elle le trouve, elle ne pouvait nier que Renaud était un véritable charmeur. Si elle ne savait pas à quoi s'attendre, elle aurait pu tomber dans le piège.

-Que tu aille jusque-là pour Bastien.

-C'est normal, répondit-elle dans un haussement d'épaules. C'est un ami. Je ferais pareil pour toi.

Un bruit étrange échappa à Jason, un bruit qu'elle eut du mal à identifier. Un ricanement ?

-Ça m'étonnerait.

Il se tourna vers elle alors qu'il s'arrêtait à un feu rouge.

-Tu sais, il existe d'autres moyens de faire comprendre à Bastien que tu es amoureuse de lui.

Elle failli s'en étrangler.

-Je ne suis pas amoureuse de lui, répondit-elle le plus calmement possible.

Il ne dit rien de plus, mais le même son étrange lui échappa. Cette fois-ci, il était évident qu'il s'agissait d'un rire moqueur.

*

**

-A demain.

Elle claqua la porte de la voiture derrière elle en poussant un soupir soulagé. Il était temps que cette soirée s'achève.

Le regard rivé sur ses chaussures, Karen se demandait si ça en valait vraiment la peine. Elle réalisa au dernier moment ce qui l'attendait, assis devant sa maison.

-Bastien ?

Il leva la tête vers elle. Les joues rougies, le regard lumineux, les cheveux en bataille, la cravate dénouée, il n'avait jamais été aussi séduisant... jusqu'à ce qu'elle remarque la bouteille de bière vide qu'il tenait à la main. Soudain, ses couleurs prenaient un jour nouveau.

-Bonsoir, Karen.

Elle s'approcha de lui, ses talons claquant sur les dalles de l'allée.

-Qu'est-ce que tu fais là ? Pourquoi n'es-tu pas entré ?

Il se tourna vers la porte, dans un geste vague. Il ouvrit la bouche une fois, puis deux, comme un poisson hors de l'eau. Il se tourna vers elle, ouvrit la bouche une troisième fois et prononça avec difficultés :

-Je n'y ai pas pensé.

Il porta la bouteille vide à ses lèvres, puis la laissa tomber au sol.

Les sourcils froncés, elle vint s'asseoir à côté de lui. D'un geste autoritaire, elle lui retira la bouteille des mains et la posa au sol, hors de portée. Bastien ne fit rien pour l'en empêcher. Il la regarda faire d'un œil morne, balbutiant des phrases incompréhensibles dans sa barbe, jusqu'à ce qu'il pose sur elle son regard embrouillé :

-Pourquoi a-t-elle fait ça ? demanda-t-il d'une voix embrouillée. Pourquoi Sabine m'as-t-elle fait ça ? Qu'est-ce qui ne va pas chez moi ?

Karen ne savait pas vraiment quoi lui répondre. Elle-même n'avait pas encore compris, et pourtant, elle avait essayé...

Elle passa un bras autour de ses épaules pour l'attirer à elle. Il se laissa aller, les gestes affaiblis par l'alcool, la fatigue et la déprime.

-Si ça avait été moi, je ne t'aurais jamais trompé, dit-elle avec douceur.

Elle le sentit se raidir contre elle... et, au moment où elle réalisait ce qu'elle venait de dire, la porte de la maison s'écarta de leur dos. Elle tourna la tête vers l'ouverture, pour y trouver sa mère en pyjama, visiblement intriguée par ce qu'elle voyait. Bastien n'avait pas bougé. Du regard, Karen essaya de faire comprendre ce qu'il se passait à sa mère. Celle-ci s'accroupit, tendit une main pour la poser délicatement sur la tête de Bastien, qui réagit enfin. Il se redressa lentement.

-Madame ...

-Tu devrais rester ici ce soir, le coupa la mère de Karen.

En guise de réponse, il se releva en s'appuyant des mains sur le mur.

-Je vais vous laisser, marmonna-t-il.

-Bastien. Tu restes dormir ici.

Il n'avait d'autre choix que d'accepter, et ils le savaient tous les trois. La mère de Karen avait toujours eut une certaine autorité sur lui et là, il n'était certainement pas en mesure de tenter d'y résister.


Sensuelle vengeanceWhere stories live. Discover now