Une ombre au tableau

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Le repas se passe dans une joyeuse euphorie. Tous les petits posent des multitudes de questions à Hèlia même les plus grands qui commencent à contester l'autorité de la Matrone ne peuvent dissimuler leur enthousiasme pour son histoire.
Celui ci raconte son Devoir d'une manière sublime. En effet pour ses dix huit ans chaque habitant de la Communauté, riche ou bien même orphelin comme moi, doit pendant trois mois servir la Communauté. Hèlia a été transféré dans une province voisine à la notre nous n'avons donc eu aucunes nouvelles durant ces trois longs mois. Il explique les grands camps, les petites missions d'ordre.
Mais petit à petit sa voix se fait moins sûre d'elle et il semble même éviter certaines périodes de son Devoir. Je me demandes si je ne m'inquiètes pas trop mais un léger coup d'œil à Ludi me fait comprendre qu'il se passe quelque chose. Elle a froncé les sourcils et arrêté de manger. La Matrone quant à elle affiche un sourire crispé. Le reste du repas passe très vite. Les enfants rouspètent pour la forme lorsque la Matrone leur rappelle qu'il est l'heure pour eux d'aller se coucher. Je me dépêche d'aider Ludi à débarrasser car c'est sa tâche de corvée de cette semaine. Lorsque nous avons fini nous nous dépêchons d'aller dans le salon pour écouter la véritable histoire d'Hèlia. Celui ci a pris place sur le canapé rouge. Ludi se place à sa droite et moi sur l'accoudoir à sa gauche.

"Allez raconte nous la vérité Hèlia. On gobe pas des histoires s'exclame Ludi."
Hèlia laisse échapper un long soupir d'exaspération. En le voyant de plus près il semble avoir pris plus de cinq ans d'un coup. Il a une barbe naissante sur les joues et son sourire semble éteint comme la lueur dans ses yeux. Le garçon joueur de mon enfance semble disparu. Celui qui après la lecture du conte de Cendrillon avait appelé sa mère La Matrone subtile mélange du mot marâtre et patronne. Il avait dès le départ tout partager avec nous les petites orphelines jusqu'à sa propre mère.
Il entrouvre la bouche pour parler mais lorsque il veut commencer à s'exprimer sa voix se brise et il commence à sangloter. Il cache précipitamment son visage dans ses mains pour nous empêcher de voir ses larmes couler sur ses joues. Ludi se penche vers lui et le prend dans ses bras. Moi je ne bouges pas, ne sachant que faire. Je ne comprends jamais les gens et encore moins leur réactions. Je ne sais jamais quoi faire avec eux, comment les aider, leur faire comprendre que je suis avec eux.

Nous restons comme cela pendant un moment. Ludi en train de bercer tendrement Hèlia et moi les regardant ne pouvant briser un tel moment. Un murmure de voix se fait d'un coup entendre. Je m'approche doucement d'Hèlia car j'ai compris qu'il est la source de ces mots.

"Là bas c'est l'horreur. Dans les provinces montagneuses c'est l'horreur. Les petits villages essuient des attaques sanglantes de la part de pays insurgeants. C'est un véritable massacre. On est censé les aider, les défendre mais on n'est que des gamins nous !!!"

Au moment où il prononce ces mots je vois défiler devant mes yeux des villages entiers décimés, des maisons brûlées, des cadavres d'hommes et de femmes dans les rues, des gamins orphelins qui pleurent ne sachant où sont leurs parents.

Des larmes roulent sur mes joues. Je me dépêches de les essuyer mais je vois bien que Ludi et Hèlia me regardent. Je ne comprends pas pourquoi eux ne sont pas effondrés comme moi, pourquoi ne sont-ils pas aussi attristés que moi !! Je suis complètement révoltée contre ses pays insurgeants mais soudain une question s'imprime dans ma conscience. Comment se fait-il que la Communauté nous cache-t-elle ces massacres?

The REWARDOù les histoires vivent. Découvrez maintenant