Géniteurs

Bonus 4 - Jude

J'attends patiemment sur le banc froid. Les mains dans les poches et la tête rentrée. Je n'ai aucune envie de voir Edan. Je ne sais même pas pourquoi il veut me voir.
Quand j'aperçois sa silhouette, je me redresse légèrement. Plus il s'approche, moins je me sens bien.

Il s'assoit à côté de moi sans me regarder. Il commence juste à parler.

- Ça y est, je l'ai perdu.

Je le regarde interloqué, puis choqué par ce qu'il vient de dire.

- J'espère que tu ne parles pas d'Aurore. Comment peux-tu parler d'elle comme si c'était un trousseau de clefs ?

Je me lève, soudain plein de dégoût pour Edan.
Il lève des yeux exaspéré vers moi et se lève aussi.

- Tu as ce que tu veux, tu devrais être content.

Je me détourne.

- Je ne suis pas dupe Jude. Je sais très bien ce qu'il se passe entre vous. Ne fais pas semblant d'être outré.

Je fais volte-face.

- Tu ne peux pas l'abandonner encore une fois, et de cette façon ! Je ne suis pas là pour réparer son cœur. Je veux son cœur, pas seulement des miettes.

- Alors vas la rejoindre ! Casses-toi ! Vas la réconforter ! Vas l'embrasser et lui faire l'amour !

- Je t'ai déjà dit de ne pas parler d'elle de cette façon ! Arrêtes de penser à sa place ! Tu ne sais pas ce qu'elle veut, alors ne décide pas pour elle. Laisses lui le choix au lieu de lui imposer le tien !

- Non tu ne comprends riens Jude, réplique-t-il. Je l'ai perdu. Elle est partie d'elle même. Le seul choix que j'aie fait est de l'avouer ! Elle s'en rendra compte toute seule !

Je me détourne de lui pour sortir du parc. Jamais je n'aurais cru qu'Edan allait abandonner aussi vite. Pas que c'était une guerre, mais je me voyais déjà ramasser le cœur d'Aurore dans mes mains pour lui remettre dans la poitrine. Je me voyais déjà la regarder courir dans les bras d'Edan pour lui pardonner.
Mais la réaction d'Edan me prend de court. Je me remémore les baisers que nous avons échangé avec Aurore. Le souvenir de ses lèvres et de sa langue brûlante hante mes nuits.

Jamais je ne pourrais l'abandonner de la même façon qu'Edan. Alors je me demande s'il la vraiment aimé.

Je me retourne et je découvre qu'Edan s'est assis sur le banc.
J'ai besoin de savoir. Je me retourne donc et je le dirige droit vers lui. Il lève la tête dans ma direction et se lève de nouveau. Son regard morne me tord presque le cœur.

- Est-ce que tu l'aimes ? Demandé-je brûle pour-point en pointant un doigt accusateur vers lui.

Il fronce les sourcils et fourre ses mains dans les poches de son manteau. Il hésite.
Au bout de plusieurs secondes de silence, je baisse mon doigt et me redresse.

- Alors nous en sommes au même problème ?

- Je me suis peut être trompé, avoue-t-il.

- Trompé sur quoi ? Je demande confusément.

- Sur toi. Tu n'es plus le petit connard d'autrefois.

Je serre les dents. Je ne veux pas entrer dans son jeu.

- Tu es venu ici dans quel but exactement ? Parce que je ne comprends pas bien.

- Je ne sais pas moi-même, dit-il.

J'inspire profondément. Il fait de même. Puis je m'assois et il m'imite aussi. Les mains dans nos poches et le regard au loin, on dirait deux amis qui parlent tranquillement du bon vieux temps.

- Qu'est-ce qu'il s'est passé entre vous quand j'étais chez les Sauvages ? Demande-t-il soudainement.

Je tourne la tête vers lui, et ses yeux éteints me persuadent de lui dire la vérité. Je le sens suffisamment démuni comme ça. Peut-être que finalement, ma colère envers lui pourra se dissiper.

- Rien, je réponds. J'ai passé mon temps à la consoler.

Il tourne la tête vers moi, visiblement surpris.

- Il ne s'est rien passé entre vous ?

Je secoue la tête et il cogne son poing contre le banc. Je sursaute. Il s'enfonce ensuite sur le dossier du banc.
Ses accès de colère ne me surprennent presque plus, je suis habitué à son comportement impulsif, même s'il arrive à cacher son jeu la plupart du temps.

- Mais elle a bel et bien voulu m'embrasser un jour. Je suis parti avant qu'elle ne le fasse.

Il réfléchit pendant plusieurs secondes, le regard rivé sur moi.

- Pourquoi ?

- Parce que c'est toi qu'elle voulait embrasser, pas moi.

Il souffle bruyamment et se lève. Il frappe dans un caillou et se retourne vers moi.

- Tu as bien réussit ton coup, je te félicite.

- Aucun de nous n'a gagné Edan. Ce n'est pas une stupide guerre entre deux grands cons. C'est une question de sentiments. Arrêtes de te lamenter et vas la retrouver. Tu l'aimes et elle t'aime, qu'est-ce que tu attends ?

Je ne pensais pas dire ça un jour non plus. À croire que ma sympathie envers Edan ne s'est pas vaporisé. Edan reste avant tout le type avec qui j'ai passé les meilleures années de ma vie, cela ne s'oublie pas facilement.

- Non elle ne m'aime pas. Pas comme je le voudrais.

- Alors tu abandonnes ?

- Non, j'ai déjà perdu.

Sur ces paroles, il s'éloigne pour finalement disparaître de mon champ de vision.
Je ne le comprends pas.

Mais il a raison, la seule chose que je veux est de retrouver Aurore. De la prendre dans mes bras, de toucher ses cheveux blonds. D'admirer ses iris bleu acier. De contempler la courbe de ses hanches.

Ce qui s'est passé ce matin au village Sauvage me ronge. La voir aussi faible me tue.
Peut-être que je n'aurais pas du l'embrasser l'autre jour. Mais pour être honnête, je ne regrette rien. Le goût de ses lèvres est encore sur les miennes

Je dois bouger.

Je le lève brusquement et je décide de prendre le chemin pour rentrer. La savoir dans le même bâtiment que moi me frustre au plus au point. L'éviter n'a pas été chose facile, elle m'attire tel un aimant.

Une fois dans l'ascenseur, mes doigts restent en suspend. Finalement, ma raison l'emporte et je monte à mon étage.

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Voici pour ce bonus !
J'espère qu'il vous a plu, dites moi ce que vous en pensez ;)
Bisous !