Chapitre 9

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Matt courait depuis maintenant une vingtaine de minutes à travers le bois.
Zigzagant entre les arbres, il ne pensait plus à rien, ne voulait plus penser à rien.

Sautant par dessus une racine, le garçon se demanda tout de même si il réussirait à retrouver son chemin au retour.

Mais qui a dit qu'il y aurait un retour ?
Il pourrait fuguer, fuir éternellement ses problèmes et partir vivre une vie de vagabond sur les routes...

- Fuir tes problèmes ? Mais quels problèmes ? Ne te fais pas plus pitoyable que tu ne l'es déjà, ce n'est pas comme si ta vie était vraiment compliquée, lui dit une voix dans sa tête.
- Ah non ? Des élèves ont disparus, ma soeur jumelle est dans une sorte de coma bizarre et mes amis ne me parlent plus.
- Ça pourrait être pire, non ? Ça peut toujours être pire. Ta soeur pourrait être... morte, et tes amis pourraient se transformer en zombies mangeurs de cerveaux. Ça, ce serait pire, non ?
- Mais pourquoi on en revient toujours aux zombies, bon sang ?
- Je pense que ton imagination part toujours trop loin...
- Je suis bien d'accord.
- Mais récapitulons. Qu'est ce qu'on a vu, au lycée ?
- Je ne sais pas ce que c'était. Ça avait les yeux rouges, ça se déplaçait très vite, trop vite pour un humain. J'arrivais à peine à le suivre des yeux.
- J'ai lu quelque part que pour se familiariser avec l'inconnu, il fallait commencer par lui donner un nom.
- Tu crois que j'ai envie de me familiariser avec ça ?
- Fais un effort, Matt.
- On pourrait appeler ça... Voyons... Une goule ?
- Une goule ?
- Dans les contes arabes, les goules étaient des sortes de monstres,
loups-garous-vampire-ogre du désert qui dévoraient les voyageurs égarés et pillaient les cimetières...
- Décidément, avec toi, on en revient toujours aux surnaturel. Sérieux, Matt, arrête de lire du fantastique et concentre toi plutôt sur Flaubert.

Mais avec qui je parle, moi ? Se demanda le jeune homme.

Se rendant compte qu'il parlait tout seul depuis cinq minutes et que ça commençait à devenir étrange, Matt ralentit sa course, jusqu'à s'arrêter complètement. Le garçon tourna sur lui même, observant les environs du coin de l'œil.
Les arbres, longs est crochus, paraissaient vouloir faire fuir tout intrus ou visiteur curieux.
Une mousse verte courait sur les troncs, recouvrant presque intégralement les corps des feuillus.
L'astre nocturne se reflétait dans une sorte de petite mare.
L'eau, piégée par une muraille de pierres de tailles variées, stagnait, comme figée dans son lit.

Pleine lune, ce soir, se dit le jeune homme.

-Tu crois aux loups garous ? Lui demanda son esprit.
- Il ne manquerait plus que ça, tient.
-Tu a bien décidé de croire aux goules, alors pourquoi pas ? Lui rappela la voix dans sa tête.

Il s'assit au bord de l'eau et se dit que, s'il avait été dans un film, c'est à ce moment précis qu'un loup (une goule ?), un troll, ou un dragon surgirait du buisson derrière lui pour lui annoncer que sa destinée l'attend, et qu'il doit de toute urgence aller sauver le monde.

Sauver le monde, hein ?
Mais certaines personnes de son entourage semblaient penser le contraire, se dit il amèrement.

En repensant à sa discution avec Alyss, les sourcils de Matt se froncèrent.
Qu'est ce qui lui avait pris ?
Non mais on n'a pas idée de s'introduire comme ça chez les gens, et de les accuser de kidnapper des adolescentes pour ensuite se barrer en courant !

Les joues de Matt s'empourprèrent et il serra les dents. C'était toujours lui que l'on accusait.
Déjà avec Ellen, lorsqu'ils étaient petits.
Parce qu'il était plus en retrait que sa soeur, les adultes ne cessaient de supposer que l'enfant préparait un mauvais coup.

• • •

- Fait un effort, Matt, lui avait dit Ellen alors qu'il venait de se faire réprimander par sa maîtresse parce qu'il refusait de sourire, fais au moins semblant d'être mignon, les grands te laisseront tranquille.
- Comment tu sais ça, toi ?
- C'est ce que je fais toujours, lui avait elle répondu en souriant.

Matt SalemUnde poveștirile trăiesc. Descoperă acum