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« [...] C'est la belle Ophélie. En tes oraisons, nymphe,
Souviens-toi de tous mes péchés.* »

Hamlet. Est-ce que ce professeur est réellement en train de lire du Shakespeare dans un amphithéâtre bondé de jeunes, presque tous endormis ?!

Mon regard se balade un peu partout dans la salle et s'arrête sur une feuille de bloc.
J'y vois un nombre incalculable de flèches, mots, phrases et gribouillis.
Son propriétaire, toujours en train d'écrire, se met à barrer certaines choses, en replace d'autres et ainsi de suite.
Il est assez perturbant.
Parmis tous les jeunes traînant dans la salle, il est certainement bien le seul à écouter et prendre des notes.

Sans réfléchir, je saisis mon stylo et le lui jette à la figure.

Lorsqu'il se tourne vers moi, le regard menaçant, je me mets inexpliquablement à lui sourire.

Il se retourne et fixe rapidement le stylo avant de le ranger dans son sac à dos.

Mon sourire s'efface alors d'un coup et je remarque que c'est le seul stylo que j'avais.
Je farfouille dans mes affaires et n'en trouve pas de nouveau.
Je me tourne vers la personne assise à côté de moi lorsque quelque chose heurte ma tête.

Je plisse des yeux et regarde le gars qui détient mon stylo.
La boulette de papier que je viens de recevoir trône juste devant moi, je l'ouvre.

«Chez moi ce soir, 20.00 ? Tu sais bien. ;)
-A.»

Avery. Sincèrement, j'ai l'impression que ma petite amie n'est autre qu'une catin. Bon, après, je mentirais si je disais que c'est déplaisant.
Or, je suis plutôt honnête donc je pense qu'il n'y a aucun malentendu. D'autant plus, qu'entre nous, il ne s'agit pas d'amour mais plutôt d'image. Il ne se passe rien.

Je lui fais finalement signe que c'est d'accord et lui demande de quoi écrire.
Elle cherche dans son petit sac à main hors de prix avant de me faire passer, par l'intermédiaire d'autres élèves endormis, un crayon à papier.

Je déchire ensuite une bande de papier sur laquelle je demande à ce fameux intello de me rendre mon stylo que j'ai acheté pour 0.75$ au petit magasin du coin.

Je froisse le morceau de feuille et le dépose devant moi avant de relancer son crayon à Avery.

Malheureusement, j'ai comme un petit problème.
Les deux boulettes de papier sont presque identiques et je ne sais pas identifier l'une de l'autre.

Au hasard, j'en saisis une et la lui lance.
Ce dernier pose ce qu'il tient en main et ouvre le morceau de papier.
Je le vois écarquiller les yeux et se tourner vers moi.
Je peux lire, sur ses lèvres, quelques mots qui me font immédiatement comprendre et regretter mon geste.

Sans le quitter des yeux, je tâte frénétiquement mon bureau à la recherche de la seconde boulette de papier.

Je finis par la trouver et la lis.

«C'est pas que je ne veux pas, mais si je pouvais récupérer mon stylo, ça serait juste super. Il est, comme qui dirait, le seul que j'aie pour les cours. (Et encore, je l'ai volé).»

Mais... Je cligne plusieurs fois des yeux avant de relire à quelques reprises le message.

Il semble que j'aie envoyé le mauvais message.

Je déglutis et sens le rouge me monter aux joues.
Ma gêne me pousse à rabattre ma casquette plus bas sur mon front et à me faire oublier le temps de cinq minutes.

PanthophobiaМесто, где живут истории. Откройте их для себя