Chapitre 8

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Depuis que Jon et Sélênê étaient ensemble, le demi-dieu était sur un petit nuage. Ils restaient toujours avec leur groupe d'amis mais c'était comme s'ils étaient seuls au monde.

Quand ils se retrouvaient seuls, Jon lui posait beaucoup de questions sur elle.

— Tu es née en quelle année ?

— En 1701.

À chaque fois qu'elle répondait, il semblait surpris.

— Comment ça se fait que tu es immortelle alors que les demi-dieux ne le sont pas généralement ? J'ai lu dans les bouquins de ma mère que tu avais même un frère, le demi-dieu Énée, qui est mort.

— Oui je sais mais je ne l'ai pas connu. Et si je suis immortelle, c'est parce que ma mère m'a emmenée sur l'Olympe.

— Tu rigoles ?!

— Non. Quand j'ai eu dix-sept ans, Arès, le dieu de la guerre, a tué mon père par jalousie. Ma mère ne voulait pas que je reste seule sur Terre et encore moins que je meurs. Alors elle m'a emmenée y vivre. Là-haut, elle m'a fait manger un fruit qui s'appelle l'ambroisie. Ce fruit ne pousse que sur l'Olympe et quiconque en consomme devient immortel.

Il éclata de rire.

— J'en reviens pas ! Et tu connais tous les dieux ?

— Si on veut, oui.

— Tu connais Zeus ?

— Oui.

Tout cela amusait le jeune homme et le faisait sourire.

— Et ton frère, c'est Éros ?

— Oui, c'est mon frère. Mais ce n'est pas le seul. J'en ai eu plein d'autres. Mais je n'ai vraiment connu qu'Éros. Les autres ne m'appréciaient pas et je ne les appréciais pas non plus.

— Vous vous entendez bien ? Avec Éros, je veux dire.

— Hmm... oui même s'il aimait bien m'embêter et que je ne l'ai pas vu depuis vraiment longtemps.

— Pourquoi ? Tu étais où ces dernières années ?

— Euh... Je me baladais un peu partout. Je ne suis pas restée bien longtemps sur l'Olympe. Les dieux et toutes leurs lois... Beurk, c'est vraiment pas mon truc.

Il sourit et noua ses doigts à ceux de la jeune fille. Il lui lança un regard qui voulait dire "je te reconnais bien là".

— C'est qui le dieu le plus sympa ?

— Hmm... Mon frère est plutôt sympa. Apollon aussi par moment. Et ce n'est pas un dieu à proprement parler mais j'aime bien Perséphone aussi.

— Moi aussi. Surtout depuis que je sais qui elle est vraiment. Elle me fait rire... Au fait, tu n'es pas la première Sélênê.

— C'est vrai. La toute première est une déesse qui s'est transformée en la lune telle que tu la vois aujourd'hui. C'est elle, Sélênê.

— Incroyable.

— Puis il y a Artémis, la sœur jumelle d'Apollon. C'est une déesse de la lune même si elle est plus connue pour être celle de la chasse et de la nature sauvage. Moi je ne suis que la troisième en quelque sorte. Je ressemblais tellement à la véritable Sélênê que mon père m'a choisi ce prénom.

Il éclata de nouveau de rire. Tout cela semblait l'amuser. Il ne la prenait pas au sérieux même s'il y croyait. Elle trouvait cela adorable.

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Parfois, elle faisait des recherches sur les vampires et sur Faerieside sur Internet. Tout ce qu'elle trouvait lui semblait pathétique et ridicule. Des sataniques qui se prenaient pour des buveurs de sang échangeaient sur leurs expériences « de vampires ». Il lui suffisait de lire deux phrases pour comprendre qu'ils n'y connaissaient rien. Pour Faerieside, elle trouva dans les archives de la bibliothèque que la ville tirait son nom de fées qu'on avait aperçues dans la forêt au 18ème siècle.

Un soir, alors qu'il la raccompagnait chez elle après une de leur sorties, elle demanda à Jon ce qu'il savait sur la ville.

— Pas grand chose. Tu devrais peut-être demander à mademoiselle Hook, la taquina-t-il.

Un avion passa dans le ciel. Sélênê savait ce que c'était. À chaque fois que Perséphone était revenue aux enfers en automne, elle lui avait raconté tout ce qu'elle avait vu sur Terre. Elle lui avait décrit toutes ses découvertes et les avancées technologiques dont elle avait été témoin. Néanmoins, l'avion n'avait de cesse de la fasciner. Bien plus que l'ordinateur, la télévision ou le portable. L'avion défiait les lois de la gravité et permettait à l'homme de voler. Seuls les oiseaux, Hermès et Éros en étaient normalement capables. Pourtant, grâce à un engin bien plus lourd que lui, l'homme pouvait voler.

— Jon, regarde un avion !

— Oui, un avion Selena ! se moqua-t-il comme si elle était une enfant.

— Non mais franchement ! Tu ne trouves pas ça fantastique ?! L'homme a inventé des choses vraiment... incroyables ! Tu crois qu'on peut faire un vœu ? Comme avec les étoiles filantes ?

— Euh non... Ce ne sont que des avions.

— Les avions sont magiques pour moi. Je vais faire un vœu, conclut-elle en lui tirant la langue.

Elle ferma les yeux et fit le vœu de rester pour toujours avec Jon. Que plus rien ne puisse les séparer. Quand elle les rouvrit, elle vit que le jeune homme avait lui aussi fermé les yeux, concentré. Cela la fit rire et elle l'embrassa avant de rentrer chez elle. Elle était heureuse. Très heureuse. Juste le fait d'être avec Jon la rendait folle de joie. Ça y est : sa vie était parfaite.

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Le soir, alors qu'elle dormait paisiblement, Sélênê sentit une main froide lui caresser les cheveux et la joue. Elle sursauta et se leva d'un coup. Il n'y avait personne. Elle alluma la lumière.

— Perséphone ?

Pas de réponse. Sa fenêtre était ouverte. Elle se leva pour la fermer avant d'aller ensuite à la salle de bain pour se laver le visage. Elle sentait que quelque chose n'allait pas. Elle retourna à la fenêtre. Rien. Il faisait nuit noire et elle distinguait à peine la forêt. Le vent soufflait plutôt fort pour un printemps. Il n'y avait personne. Toute la ville devait être en train de dormir à cette heure-ci. Il était plus de trois heures du matin. Mais sans raison apparente, elle avait un mauvais pressentiment. Elle retourna quand même dormir. Demain, elle avait cours.

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Elle avait eu raison. Le lendemain, tout le monde parlait d'une nouvelle attaque d'animal. Tout près de chez elle, une bande de jeunes qui s'adonnaient à une sorte de rituel satanique, avaient tous été violemment tués hier soir vers trois heures du matin. Et c'était Sélênê qui avait fait la macabre découverte. Elle avait voulu savoir si son impression de cette nuit n'avait été qu'une impression. Après avoir pris sa douche et son petit-déjeuner, elle avait fait mine d'aller jeter les poubelles dehors. Elle en avait profité pour respirer l'air frais du matin. La sensation d'hier soir lui était revenue en mémoire et elle s'était dirigée vers l'arrière de la maison. Elle n'avait eu qu'à faire quelques pas dans la forêt pour découvrir l'horrible scène. Trois filles et trois garçons. Leurs yeux exorbités témoignaient de la rapidité de l'attaque. Ils avaient tous été rangés ensemble comme s'ils dormaient les uns à côté des autres. Un animal sauvage n'aurait pas pu faire ça...

Lorsque la police était arrivée, elle n'avait pu que constater leur mort. On avait demandé à Sélênê si elle s'était approchée des corps. Elle avait juré que non. Puis, on avait ressorti la thèse de l'animal sauvage. La police savait, pensa le demi-dieu. D'ailleurs, les médecins légistes n'avaient pas sourcillé lorsqu'ils s'étaient mis à examiner les corps. Ils étaient tous au courant et voulaient garder le secret. Sauf que Sélênê connaissait la vérité. Bien sûr qu'elle s'était approchée des corps et qu'elle les avait examinés avant d'aller prévenir Perséphone qui avait appelé la police. Ce qu'elle avait vu l'avait mortifiée. La trace au niveau du cou... on ne pouvait s'y méprendre : c'était l'œuvre d'un vampire. 

Sélênê - Tome 1, SombreWhere stories live. Discover now