Chapitre 9: Si Seul

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Salut mes p'tits kinders, j'espère que vous allez bien!

Ce week end m'a donné pas mal d'inspiration, donc ça va, je commence (enfin) à rattraper mon retard x)

Alerte mini-spoil: là, je vais pas mal développer sur la vie des sans-abris, dans ce chapitre, car c'est l'une des dernières fois que Cyril est à la rue, donc j'en profite pour le faire tant que j'en ai encore l'occasion.

Voilà, c'est tout, sinon je voulais vous remercier pour les 1,5K vues sur cette fiction, ça me fait vraiment chaud au cœur de voir que vous êtes super nombreux à suivre cette fiction, ça m'encourage à écrire ^^ <3

Bref, je vous souhaite une très bonne lecture, en espérant que ça vous plaise, et on se retrouve vendredi pour les deux autres chapitres ;)


P.S: Merci @Ritsuyo pour m'avoir fait découvrir cette chanson, maintenant je l'écoute super souvent ;)


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(Point de vue de Cyril)


"Tu devais pas repartir c'matin, Cyril?

-Hmm ouais mais... J'ai trop bu hier... J'vais attendre demain, l'temps qu'ça aille mieux, tu vois?

-Ouais, j'vois. Bon, j'te laisse, j'vais travailler.

-D'ac... J'espère qu'les affaires vont marcher.

-J'espère aussi... Surtout qu'les beaux jours commencent à arriver, donc ils sont un peu plus cools. Bon, j'y vais, j'vais être en retard, sinon. A ce soir, mec!

-A ce soir, Didier..."


J'le regarde s'éloigner en boitant vers sa rue habituelle, un gobelet en carton à la main. Ouais, "travailler", c'est faire la manche. C'est toujours moins dégradant de dire ça que c'qu'on doit vraiment faire. Et après tout, c'est parfois aussi fatiguant qu'un vrai boulot: si tu restes assis, ça va, mais si tu t'lèves, ça devient vite crevant.

J'me recroqueville sur mon matelas d'fortune. Ouais, bon, "matelas", c'est pas trop l'mot approprié pour des cartons, mais j'fais comme je peux. J'trimballe mes cartons partout où j'vais. Ça m'permet d'avoir moins froid quand j'dors. J'aimerais bien m'trouver un duvet comme l'autre gars qu'j'ai croisé, hier. Pour l'moment, dans les poubelles, y a qu'des trucs à manger. J'y vais surtout l'midi, quand les gens ont fini leur pause déjeuner, et qu'y a moins d'monde dans les rues. J'veux pas les déranger, et j'me sens pas encore vraiment à l'aise quand j'fouille dans les poubelles le jour. La nuit, j'm'en fous.

J'ai trouvé un rythme, au bout de ces trois semaines. J'dors à partir du moment où l'soleil se lève, et j'me réveille vers midi. J'essaie d'trouver un endroit où pisser tranquille, avant d'marcher dans la rue, en regardant les poubelles. Si y a des trucs intéressants, je prends. Des fois, faut qu'j'attende, le temps qu'les gens jettent les restes de leur repas, et des fois faut qu'j'marche longtemps, surtout si j'suis dans une p'tite ville. Quand j'ai trouvé d'quoi bouffer, j'm'installe dans un coin un peu reculé, histoire d'être tranquille. Après l'repas, s'il pleut pas, j'fais une p'tite sieste sur l'trottoir, sur mes cartons, en m'recouvrant la tête. J'veux pas être vu, j'veux pas qu'on m'reconnaisse, alors j'me fais aussi discret qu'possible. En général, quand j'me réveille, j'ai quelques pièces, mais c'est rare. De toute façon, j'vais dans les magasins qu'pour m'acheter à boire, maintenant. La bouffe, j'peux la trouver dehors, et pour l'eau, j'bois un jour sur deux d'l'eau non potable. Pas tous les jours, car sinon, j'pourrais tomber malade. Et puis l'alcool, ça occupe. Tu attends qu'le temps passe, alors penser à autre chose quelques heures, c'est agréable. Y a des fois, comme hier, où j'bois trop. C'est pas ma faute, c'est juste que j'repense à ma vie d'avant. A Valentin. A quel point j'ai foiré.

La nuit, j'marche. J'essaie d'm'éloigner le plus possible d'Angers. J'suis les routes éclairées, histoire de pas trop m'paumer, et j'fais en sorte de trouver un endroit où m'poser le lendemain. Si j'marche la nuit, c'est pour pas être reconnu, et surtout parce que j'me sens pas en sécurité si j'dors seul. Du coup, j'marche plusieurs heures, faisant des pauses dès que j'le peux, et j'm'endors une fois qu'mes jambes ne peuvent plus m'porter. Avant de dormir, j'retire mes baskets pour pas avoir les pieds gonflés, et j'les place sous ma tête pour pas m'les faire voler. Déjà qu'j'ai plus grand-chose, j'aurais l'air d'un con avec une chaussure en moins.

J'regarde mon portable. 13h07. Va falloir qu'j'aille trouver à manger. J'ai l'ventre vide, encore une fois. J'me lève péniblement, et glisse mes cartons sous mon bras, avant d'marcher vers la poubelle la plus proche. J'repose mes cartons entre mes jambes pour pouvoir fouiller tranquillement. J'en sors un journal et un bout d'baguette. Pas mal. On a connu pire. J'reviens vers l'endroit où j'étais juste avant, et pose mes cartons sous mes fesses.

J'mâche mon bout d'pain en feuilletant l'journal.

J'aime bien les journaux.

Avant, j'regardais les infos sur internet ou à la télé. Maintenant, j'apprends c'qui s'passe comme ça. Et puis quand j'ai fini d'lire, j'peux toujours m'en servir d'oreiller par-dessus mes chaussures, ou d'couverture. En plus, même s'ils sont souvent sont sales, il ont cette odeur de papier qu'j'adore, et ils sont super doux au toucher. Ouais, on cherche la sensualité où on peut, même dans l'papier. C'est pas ici que j'pourrai tirer un coup, et puis t'façon, j'ai plus de désir pour moi-même, alors comment j'pourrais en avoir pour les autres..? J'suis trop dégueulasse pour ça. J'rêve de prendre une douche. Une bonne douche brûlante, avec plein d'savon et d'shampoing. Une douche avec Val, tant qu'à faire. Fin bon, c'est pas près d'arriver, maintenant. La seule douche que j'prends, c'est quand il pleut. Et encore, l'eau dégouline sur mes vêtements, pas sur ma peau. En plus, j'peux pas rester trop longtemps sous la pluie, sinon j'vais attraper la crève.

La misère, ça tient à pas grand-chose. A des détails qui prennent rapidement de l'importance. La barbe pas rasée. Les cheveux gras. Les ongles noirs. L'odeur. Tout c'qui distingue de la vie "civilisée". On est conduits à s'laisser aller, à être considérés parfois comme des sauvages. Quand les gens passent devant moi, les regards qui m'lancent m'donnent l'impression qu'on appartient pas à la même espèce. Y a des fois où j'aimerais aller les voir, discuter avec eux, parce qu'on a personne avec qui parler, mais je sais que j'les ferai fuir, si j'faisais ça. Surtout quand j'ressemble à un ivrogne. Alors j'reste sagement dans mon coin, à espérer que quelqu'un voudra bien m'parler, ne serait-ce qu'une minute.

C'est l'paradoxe de la rue: tu croises plein d'gens, mais tu t'sens seul malgré tout. Quand la solitude devient trop rude, j'appelle le 115, et écoute le répondeur me parler. Parfois, j'appelle personne. J'me contente de porter l'portable à mon oreille, et d'lui parler. J'parle dans l'vide, j'le sais, mais j'ai l'air moins fou comme ça.


J'attends pas grand-chose de spécial
Les jours passent et se ressemblent un peu
Tout le temps, la tête dans les étoiles
Des tonnes de personnes défilent sous mes yeux
Pourtant je me sens si seul, hey, hey, hey, hey
Pourtant je me sens si seul, nanana, na nanana
Pourtant je me sens si seul, hey, hey, hey, hey
Pourtant je me sens si seul, nanana, na nanana

𝐋𝐢𝐤𝐞 𝐚 𝐇𝐨𝐛𝐨 - 𝐒𝐮𝐩𝐞𝐫𝐯𝐨𝐝𝐤Where stories live. Discover now