Chapitre 5

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Mardi 19 juillet 2016

Il était plus de 13h et pour une fois je mangeais avec Lucas et Samuel sur un banc devant la Mairie. Il faisait bon, l'air était chaud et être dehors nous faisaient du bien après toute une matinée devant les écrans d'ordinateurs afin de sélectionner ce que nous avions déjà au sujet d'Antoine. Samuel et Lucas débattaient avec animosité du film qu'ils étaient allés voir la veille au moment où j'entendis quelqu'un m'interpeller. Les deux garçons s'arrêtèrent brusquement et tournèrent leur tête vers la voix en question. Antoine s'avançait vers nous, habiller d'un simple short, basket et tee-shirt sombre, ses yeux étaient cachés par une paire de lunette de soleil. Il affichait un grand sourire. Je sentis Samuel et Lucas s'animer à côté de moi, eux non plus n'étaient pas habitués à sa présence, et une bouffée de stress commença à naître dans mon ventre. Je ne savais absolument pas comment réagir par rapport à hier soir. Devais-je toujours me montrer professionnelle devant les autres en sa présence ? Il arriva à notre hauteur, serra les mains de Samuel et Lucas et lorsqu'il se planta devant moi il retira ses lunette, je me leva, il se pencha pour me faire la bise, toujours sa main sur mon bras gauche, puis il remit ses mains dans ses poches.

Tu es en avance !
Je me suis dit que nous pourrions commencer plus tôt autour d'un bon repas, Clara a approuvé l'idée, elle ne t'a pas prévenue ?

De toute évidence, non. Pourquoi ?!

Euh non du coup...

Il regarda notre repas : de simples sandwichs.

Du coup allons prendre le dessert tous ensemble non ?

Samuel et Lucas étaient déjà debout en train de ranger leurs affaires avant qu'Antoine n'intervienne :

Terminez votre repas, il n'y a aucun problème je peux attendre.

J'aurais aimé placer un « que de bonté », en référence à une phrase de la veille, mais la présence de Samuel et Lucas me gênait. Antoine allait me prendre pour quelqu'un de lunatique, c'était sûr.
Les deux jeunes hommes terminaient leurs repas en le dévorant, c'était bien le mot, et moi, j'avais bien du mal à manger avec cette boule au ventre. J'aimais beaucoup l'organisation, et lorsque quelque chose se modifiait au dernier moment, ça avait le don de m'angoisser. Antoine, évidemment, le remarqua.

Tu ne manges pas ?
Non, je... je n'ai plus faim.

Il me regarda avec scepticisme et Samuel en rajouta une couche :

Tu n'arrêtais pas de te plaindre que tu crevais la dalle toute à l'heure!
Oui et bien... peu importe non ?

Les minutes passèrent avec un grand silence. Samuel et Lucas n'étaient pas non plus de grands bavards et de toute façon Antoine écrivait vigoureusement sur son téléphone. Je les voyais bien se moquer de moi hier, mais finalement, ils sont pareils : eux non plus ne savaient pas comment agir devant lui.
Je vis Antoine ranger avec énervement son téléphone, soupirer, et se pincer l'arête du nez. Je profitais que Samuel et Lucas parlent entre eux pour lui chuchoter :

Un problème ? On peut annuler si tu... as un imprévu ?
Non, pas de problème. Répondit-il avec froideur.

Sa réponse sèche me colla un frisson. Finalement, lui aussi était peut être lunatique ! Il soupira une dernière fois, chercha mon regard. Il dû remarquer mon étonnement car il ajouta :

Désolé... c'est gentil de t'inquiéter.

Il avait dit ça avec un grand sourire qui ne sonnait pas faux. Il secoua la tête comme pour se remette les idées en place et lança un regard à Samuel et Lucas qui terminaient de ranger leurs affaires. Lucas déclara qu'ils étaient prêts et proposa de commencer à filmer dès maintenant, Antoine accepta. Mes deux collègues nous équipèrent de minuscules micros, Samuel tenait sa camera et Lucas s'occupait du son. Nous nous dirigeâmes vers le centre ville à la recherche d'un restaurant, tandis que les deux garçons faisaient des plans sur la ville, derrière nous, j'en profitais pour débuter la « mi-conversation mi-interview ».

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