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- ... je peux savoir ce que tu fabriques ?
Il sentit comme un picotement dans sa nuque. Il n'avait pas besoin de se retourner pour savoir que Harry Styles, l'un des trois fils d'Anne, était la, louchant allègrement sur son derrière.
- Salut, Harry, dit-t-il, priant pour qu'il ne remarque pas le léger tremblement dans sa voix.
Il rabaissa ses manches et se retourna. En effet, il ne s'était pas trompé, c'était bien lui.
- Alors, comment vas-tu? demanda Louis en plaquant un sourire sur ses lèvres.
Il paraissait plus vieux, bien sur. Ça, il s'y attendait. Mais ce à quoi il ne s'attendait pas, c'était sa propre réaction en le revoyant après toutes ses années... Un mélange de sensations contradictoires, agréable et désagréable. Il était si grand, si mince, si viril. Son visage semblait plus dur. Ses épaules paraissaient plus larges dans son T-shirt blanc trempé de sueur. Visiblement, il revenait de son jogging, et il ne devait pas avoir bien chaud comme ça, dans son short, avec les mollets a l'air. Il se força à ne pas baisser le regard vers ses jambes nues...
- Qu'est-ce tu fabriques ? répéta-t-il
- J'essayais de déplacer... ça, répondît-t-il en désignant le fauteuil. J'ai vu cette lanterne et..
- Et tu t'es dit que tu pourrais la prendre ?
Il pinça des lèvres. Insinuait-il qu'il était un voleur ?
- Oui. Pour m'en servir comme centre de table, s'empressa-t-il d'ajouter
Il jeta un œil sur les autres objets qu'il  avait rassemblés dans un coin du hangar.
- Ce genre de choses n'existe pas à Charleston ?
- Si surement. Mais il se trouve que je ne suis pas à Charleston.
- Ce qui me ramène à ma première question.
- Je venais voir le bâtiment, évalué ce que je pouvais en tirer.
Il fronça les sourcils.
- Tu veux bien être plus claire ? Que fais tu à Jewell ? Sur la propriété de mes parents.
Il avait l'air sincèrement étonné. Anne n'aurait quand même pas caché une nouvelle aussi importante à son fils. Enfin qui sait ? Dans cette famille, tout était si étrange, parfois.
- Ta mère ne t'as rien dit ?
- Dit quoi ?
- Qu'elle avait fait appel à mes services.
Il le fixa comme une entomologiste qui s'apprête à piqué un papillon sur une planche. Il lui sourit et remercia ses parents, Grâce à eux, il avait appris à présenter un visage lisse et neutre en toutes circonstances, à cacher sa nervosité, ses doutes.
- Pour travaillé ici, au Diamond Styles, précisa-t-il devant son silence.
- Ah, oui? Et en qualité de quoi, je peux savoir ?
Il se passa la langue sur ses lèvres sèches et tira nerveusement sur le bas de sa veste.
- J'organise des événements.
De nouveau Harry posa sur lui ce regard si... désagréable.
Et si sa mère avait raison ? Si revenir ici était une grossière erreur ? Peut-être n'aurait-il jamais dû penser, ni même espérer qu'Harry pouvait lui avoir pardonné.
- Tu organises des événements, répéta-t-il.
- Oui. Je suis spécialisé dans l'organisation des mariages.
- L'organisation des mariages... Ton diplôme de commerce te sert bien, à ce que je vois.
Touché... Il hocha la tête et poussa légèrement le fauteuil de façon à se dissimuler derrière, Protection ridicule. Il avait pourtant l'habitude de ce genre de réflexions déplaisantes venant de ses parents. Mais il avait toujours un peu de mal à s'y habitué.
- Eh bien oui, les projets professionnels changent parfois, mais ce n'est pas toi qui me diras le contraire, n'est-ce pas?
Ses motes à peine prononcés, il les regretta. Il n'était pas là pour se fâcher avec lui, il était la pour honorer un contrat professionnel. Il devait oublier le côté personnel de leurs relation.
Mais il ne sembla nullement gêné ou offusqué de l'entendre lui rappeler ses projets avortés. A vrai dit même, il semblait indifférent, Et il le regardait toujours de cet air qui l'énervait au plus haut point.
Il eut envie de lui lancer quelque chose à la tête, pour le faire réagir. Ou mieux, cette fichue lanterne ! Si toutefois il parvenait a l'atteindre.
- Tu semble étonné de découvrir que ta mère à fait appel à mes services, reprit-il en déplaçant quelques objets, histoire de lui faire comprendre qu'il travaillait. J'en de déduis que tu n'es donc pas au courant que je vais loger ici.
- Rassure-moi. Quand tu dis "ici", cela signifie "à Jewell".
- Non ici, au domaine. Dans le petit cottage. Ta mere me la gentiment proposé. Cela semblait plus pratique que de prendre une chambre en ville.
- Oh, mais nous nous en voudrions de te compliqué la vie, laisse-t-il tomber sur un ton ironique
- J'ai proposé de payer un loyer, mais ta mère m'a dit que le logement faisait partie de mes émoluments et qu'il y avait de la place.
Il soutint son regard sans sourciller.
- Je ne voudrais surtout pas que tu croies que je profite honteusement de sa générosité, ajouta-t-il.
- S'il y a bien une chose qui ne m'inquiète pas dans cette histoire, c'est que quelqu'un profite de ma mère contre sa volonté.
Connaissant le caractère bien affirmé de Anne Cox, il aurait sans doute souri à cette remarque si Harry ne l'avait pas regardé d'un air aussi glacial.
- Non. Bien sûr que non, ne put-il s'empêcher de dire toutefois. Ta mère est tout à fait.. sensée.
Sensée, sûre d'elle, énergique et tellement intimidante. Presque autant que sa propre mère.
De nouveau, il tendit le bras pour attraper la lanterne. Ses doigts parvenaient à peine à toucher le socle en métal. Il se tourna légèrement pour regarder Harry par-dessus son épaule.
- Tu veux bien...?
- Non.
Son refus le surprit. Il ne lui avait jamais rien refusé. Du moins autrefois.
Bien décidé à y arriver avec ou sans son aide, il regarda autour de lui et aperçu une causse à outils bleue sous un banc. Il s'agenouilla pour l'attraper, puis la fit glisser jusqu'a lui.
- Est ce que tu vis ici ? demanda-t-il sur un ton qui se voulait détaché. Au Diamond Styles, je veux dire.
Harry croisa les bras sans répondre. Il ne faisait décidément rien pour le mettre à son aise. Là encore, ce genre d'attitude n'avait sans doute plus lieu d'être depuis longtemps.
- Non, lâcha-t-il après un long silence.
Décidément. A croire que "non" était devenu sa réponse favorite.
- Tu habite, donc toujours dans... la maison ?
Le petit cottage à l'autre bout du domaine, avec son plafond vouté, ses pièces claires et spacieuses.
Leur maison...
- Ce que je n'arrive pas a comprendre, affirma-t-il ignorant sa question, c'est ce qui peut vous faire croire, à toi ou à ma mère, que travaillé ici sera une bonne idée.
- Je ne peux pas parler au nom de ta mère...
Et même si il le pouvait, il n'aurait jamais osé.
- ... mais j'avais envie de changement. De le lancer un nouveau défi.
Et dieu sait si aménager ce hangar pour un mariage qui avait lieu dans un mois allait en être un !
- Ah, oui ? Tu étais fatiguée d'accueillir les hommes d'affaires et d'organiser des déjeuners au Country Club?
Ses doigts se crispèrent. Il l'avait toujours traité comme une petite fleur délicate, un homme jolie à son bras. Doux, charmant, conseillant, toujours d'accord. Et surtout, le laissant prendre toutes les décisions.
Comme ses parents lui avaient appris.
Et comme, hélas, il le lui avait fait croire aussi.
Mais il n'étais plus cet homme.
- En faite, j'ai changé d'employeur il y a cinq ans, dit-il. Je travaille pour World Class Weddings maintenant.
Au regard vide qu'il lui retourna, il comprit qu'il n'avait pas la moindre idée de ce dont il s'agissait.
- C'est une société qui organise des mariages à Charleston, precisa-t-il. Une des meilleures sur le marché. Elle organise aussi des événements, des réceptions pour les sociétés et les particuliers, toutes sorte de choses.
Un rayon de soleil pénétra par la poste restée ouverte et vint adoucir le visage d'Harry.
- Et tu a décidé de laisser tomber ce boulot pour venir travailler ici ?
- Je n'ai rien laissé tomber du tout.
Ce qui était d'ailleurs une des raisons pour lesquelles il avait accepté l'offre de Anne ; il n'avait pas été obligé de démissionner.
- Et puis je suis ravie d'être là, poursuivit-il De t'aider à développer ta société.
Ensuite il reprendrait son poste au World Class Weddings et retrouverait ses amis à Charleston. Si il ne devenait pas fou d'ici là !
Malheureusement..., commença Harry.
Ah, comme il pouvait détester ce petit ton sarcastique !
-... Je ne partage pas ton enthousiasme.
- Mon enthousiasme pour ?
- Pour tes projets. Qu'il s'agisse de l'organisation de mariages ou je ne sais quoi et plus encore, de ta présence ici, dans l'entreprise familiale.
Même si son avis n'avait plus d'importance pour lui, il ne put s'empêcher d'être déçu.
- Oh ! Peut être avec le temps...
- Le temps ne me fera pas changer d'avis, le coupa-t-il. Et meme s'il le pouvait, cela n'aurait pas d'importance parce que tu ne seras plus là pour le voir.
- Je ne comprends pas.
- Tu ne comprends pas ? Alors laisse-moi être plus clair avec toi. Tu es renvoyer.

Le défi de LouisWhere stories live. Discover now