Chapitre 1

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Un bruit. J'ouvre les yeux, la vision brumeuse à cause du manque de sommeil. Ma chambre est plongée dans le noir, et dehors, je n'entends que le grondement du tonnerre, et la pluie battante sur ma fenêtre. Pourtant, je suis certaine d'avoir entendu mon prénom. Pour en être sûre, je repousse la couverture, et me dirige doucement vers la fenêtre. Je pose ma main sur la surface en verre pour enlever la fine couche de buée et je pose ma tête contre le carreau. Dehors, je perçois à peine les pavés de la rue tant le rideau de pluie est opaque. Personne ne songerait à sortir par ce temps. Je soupire, et regagne mon lit. Au moment où mes yeux se ferment à nouveau, la même voix, juvénile, retentit dans mes oreilles.

« - Lexi. »

Agacée, je me redresse et je siffle :

« - Quoi ? Qui me parle ? »

Personne ne me répond, et même en me concentrant sur mes perceptions, je ne sens personne dans la pièce. Je pose à nouveau ma tête sur l'oreiller et cette fois, personne ne me dérange.




Le soleil me force à ouvrir les yeux. Je prends appui sur mon matelas et je m'assois. Mon regard parcourt ma chambre, et se pose sur mon arc, sur mon bureau. Je me lève, jette ma chemise de nuit sur mon lit, et enfile ma tenue, une tunique bleue et un pantalon noir. Je jette un coup d'œil par la fenêtre, et décide de chausser mes bottes en cuir. Je prends mon carquois sur mon épaule, mon arc dans la main, et je quitte mon repaire.
En passant dans le salon, je constate que mes parents sont déjà partis. Mon père a du se faire convoquer tôt pour l'entraînement, et j'ai entendu dire que notre voisine allait donner naissance à son premier fils aujourd'hui. Ma mère a du aller aider. Je récupère la clé de la maison, posée à côté d'un dessin jauni qui trône ici depuis de nombreuses années. Je n'ai jamais demandé à mes parents pourquoi ils gardaient cette image sur ce meuble depuis si longtemps.

Je sors dans la rue, et ferme la porte derrière moi, avant de fixer le trousseau à ma ceinture, telle une gardienne de prison qui protège les clés des cellules. Je dois marcher rapidement, Shay doit déjà m'attendre. J'accélère le pas. Il ne vaut mieux pas être en retard avec ma cousine. Elle n'a pas ce qu'on pourrait appeler une patience d'ange. Mes bottes claquent contre les pavés de la rue, et je dois de temps en temps sauter pour éviter les flaques dues à la pluie de la nuit dernière. Finalement, j'arrive au bord de la ville, et je rejoins notre terrain d'entraînement favori. Une clairière, assez grande, à l'abri des regards, où l'on peut s'entraîner à tirer sur les arbres, que ce soit à pied ou à cheval. J'écarte les buissons, laissant derrière moi les dernières maisons du village, quand quelque chose me tombe dessus, et me cloue au sol. J'essaye de me dégager mais mon adversaire m'a plaquée au sol en me tenant fermement les poignets, m'empêchant de me libérer. Je suis face contre terre, impuissante. Soudain, j'entends un éclat de rire, et on me retourne sur le dos. Le soleil m'éblouit un instant, mais je reconnais rapidement la silhouette de mon agresseur. Des cheveux bruns au carré encadrent un visage hilare.

« - Shay ! je m'écrie, fâchée.
- Tu mérites bien ça pour m'avoir fais attendre aussi longtemps, réplique t'elle.
- Je ne suis pas si en retard que ça, je m'offusque.
- Non, c'est vrai... il est 10 heures, bon, ça te fais juste une heure de retard.
- Ok, je m'excuse, c'est bon... »

Elle me lance un regard amusé, puis se redresse, et me tends la main pour m'aider à me relever. Je récupère mon arc et mon carquois qui ont glissé de mon épaule, et je me dirige vers le centre de la clairière. Sans rien ajouter, je cale mon arc, prends une flèche, la place et ferme un œil. Je me concentre uniquement sur ma cible, un chêne à une vingtaine de mètres de moi. Tout le reste du monde s'évanouit, et j'empêche ma main de trembler. Et d'un coup, je lâche la flèche, qui va se ficher dans le tronc de l'arbre, bien droite. Je baisse mon arc et relâche ma respiration, avant de me tourner vers Shay, qui m'a observé, son éternel sourire narquois étirant ses lèvres. Elle me regarde, regarde l'arbre, regarde la flèche et me regarde à nouveau.

« - Pas mal ! s'écrie-t-elle, visiblement admirative. »

Son compliment me réchauffe le cœur. J'ai toujours été moins douée qu'elle au tir à l'arc, et j'essaye de m'entraîner aussi souvent que possible pour pouvoir un jour avoir son adresse et sa précision.
Alors qu'elle se place pour atteindre un arbre qui se trouve à une quinzaine de mètres d'elle, j'entends à nouveau un murmure à mon oreille. Je me retourne, mais la clairière est déserte. Aucun mouvement dans les buissons, personne n'est là à part Shay et moi. Je me retourne à nouveau pour concentrer toute mon attention sur ma cousine, afin d'observer sa position, mais l'impression d'être épiée ne me quitte pas.



La journée passe, les flèches se fichent dans les arbres, le soleil disparaît petit à petit derrière la végétation, mes bras commencent à fatiguer, mes muscles à protester. Je finis par lâcher mon arc et me laisser tomber dans l'herbe. Shay m'imite rapidement, s'allongeant à côté de moi pour regarder les nuages.

« - Ça t'arrive parfois de penser à ce que nos vies auraient pu être si un seul événement ne s'était pas produit comme c'est arrivé ? »

Je hausse un sourcil, interpellée.

« - Depuis quand es-tu aussi philosophique ?
- Inspiration du moment, en regardant les nuages, répond t'elle simplement.
- Et bien... parfois oui, je lui réponds. Que ce serait-il passé si mes parents ne s'étaient pas rencontrés, si je n'avais pas habité dans la forêt de Juano, si je n'avais pas avalé le jus d'un houx Gelyé quand j'avais 3 ans...

- Tu aurais sûrement gardé quelques neurones supplémentaires, s'esclaffe-t-elle.

- Je ne te permets pas ! je crie en faisant claquer ma main contre sa joue en guise de punition.
- Ok ok.. ! Sinon, je voulais dire qu'avec autant de « si je n'avais pas », on pourrait réécrire l'histoire. Et si jamais tout cela avait été différent, il y aurait encore eu une autre alternative à la vie qui aurait pu être la nôtre.
- Trop compliqué tout ça,
je l'interromps. De toute façon, nos vies sont comme elles sont, on ne saura jamais ce qu'on aurait pu être, mais on peut choisir ce qu'on peut devenir. Attends, comment on en est venues à parler comme ça ?
- Ta langue s'est déliée toute seule on dirait. Tu es restée muette toute la journée,
me fait-elle remarquer. »


Je reste silencieuse, et m'allonge à mon tour. En vérité, j'ai essayé toute la journée d'ignorer cette sensation au fond de moi, et cette impression d'oppression. Je soupire.

« - Depuis hier soir, j'ai l'impression que quelque chose va arriver alors que tout va bien... »

Elle me regarde, d'abord étonnée, puis toute lueur moqueuse disparaît soudain de son regard. Ses prunelles noisette deviennent très sérieuses.

« - Je comprend. Ca m'arrive aussi des fois, mais ça ne veut souvent rien dire. Il se passe beaucoup de choses alors parfois on ressent l'énergie d'un évènement sans y être mêlé. »

Elle n'ajoute rien, et replonge dans son mutisme. J'essaye de me concentrer, mais ses pensées me sont fermées, et je n'arrive pas à identifier ses émotions. Je l'imite, soudain persuadée que c'est dû à la fatigue accumulée ces derniers jours et que ça va passer. Nous restons comme ça une dizaine de minutes, puis elle se relève, récupère sa sacoche de cuir, et m'aide à me lever à mon tour. Nous nous dirigeons sans rien dire vers les buissons pour quitter la clairière. Elle écarte les branches, se glisse sous la verdure, et je la suis. De l'autre côté, elle finit par briser le silence :

« - Je voulais pas jeter un froid comme ça... je sais pas ce qui m'a pris de répondre aussi sèchement, je savais juste pas quoi te dire... s'excuse t'elle.
- C'est correct, ne t'inquiète pas, je lui souris.
- Heureusement, lance-t-elle, sa malice retrouvée. »

Elle me serre dans ses bras, et pars vers la gauche, avec un dernier signe de la main avant de tourner vers le chemin qui mène à la périphérie du village, où elle habite. Je reste quelques secondes là, seule, sans rien penser, sans esquisser le moindre mouvement. Puis je secoue la tête, et je me dirige vers la route pavée qui me ramène dans le centre. Je marche, sans savoir vers quoi diriger mes pensées. Alors je ne pense rien, je marche simplement, comme une coquille avec une forme humaine, qui est en fait vide à l'intérieur. Puis je me dis que si je ne réfléchis à rien, c'est peut-être parce qu'il y a trop de choses sur lesquelles je pourrais m'attarder. Alors je me dis que je préfère être vide pour le moment. 

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Hello :D 

Voilà enfin le premier chapitre de cette fiction que je prépare depuis juillet ! J'espère qu'elle vous plaira. Ça sera un vrai roman, donc assez long, et je ne garantis pas que le rythme de publication sera très régulier, même si je vais faire mon maximum. 

Je vous invite aussi (si vous êtes fan de K-Pop), à passer sur @SLAIWAE,mon compte de fan-fiction commun avec une amie. 

Je vous fais des bisous :*

Passez de bonnes fêtes <3

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⏰ Last updated: Dec 27, 2017 ⏰

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