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Il était là. Les gens il était là. Mais pourquoi il était là ?! Il était 23 heure 43 et il venait quand même ! J'étais touchée. Même ma meilleure amie de Paris n'aurait pas fait ça. Même Syria n'aurait pas fait ça. Même ma mère n'aurait pas fait ça !!! Et lui il était là. Les autres m'auraient dit de rentrer chez moi, de dormir, de me calmer. Mais pas lui. C'était lui qui était venu.

- Orlan.

Il avança, je lui pris la main directement. Je le regardai, maintenant qu'il était là j'arrivais pas à trouver les mots.

- tu as mis un manteau, dis-je dans un sanglots.

Ça y est je commençais à pleurer.

- oui, j'y ai pensé.

- je suis ridicule maintenant... Je suis en tee-shirts.

- quoi ? Mais tu vas avoir froid ! Il fait -20 là. Faut que tu te couvre !

Je ris à travers mes larmes.

- tu parle comme moi.

Il me lâcha la main et enleva rapidement son manteau puis il le tendit approximativement vers moi.

- tiens, t'as de la chance que l'on fasse la même taille.

- mais et toi ?

- t'en fait pas pour moi.

J'étais glacé, je devais l'avouer. Alors je pris son manteau, aussi parce que je me voyais mal le refuser. Je l'enfilai.

- désolé de te faire venir si tard.

Il s'assit à côté de l'arbre. Et je me mis à côté de lui naturellement.

- je vais pas te laisser être triste toute seule quand même. C'est nul.

Je posai ma tête sur son épaule, je savais pas quoi lui dire, j'avais pas la force de lui expliquer. En fait avec le recul je ne me sentais pas d'expliquer ma peine à un orphelin. Ça allait le blesser c'est sur. Mais il n'est pas là pour rien...

On était glacé tout les deux. En plus lui était en simple tee-shirts a cause de moi. Sa main était aussi froide qu'un glaçon, je commençais à paniquer. Dans la ville l'horloge sonna minuit.

- mon père part à l'armée. Pendant 4 mois.

D'abord il replia l'une de ses jambes contre lui. Puis il répondit d'une voix légère.

- quatre mois c'est court. Je sais que tout le monde t'aurais dit ça mais...

Il se mit à réfléchir.

- On est le premier décembre.

- et ?

- on s'est rencontré le premier septembre, juste avant la rentrée. Ça fait 4 mois.

Maintenant que j'y pensais il n'avait pas tord. Cela avait été si court.

- quand on s'est rencontré tu m'avais paru prétentieux, dis-je.

- ah bon ? Moi j'avais peur de toi.

Je ris.

- bah pourquoi ?! Chuis pas une psychopathe !

- t'es sûr de ça ?

Je me collai un peu plus contre lui pour lutter contre le froid. Lui était complètement immobile comme une statue.

- tu étais la première personne qui m'a parlé normalement en 3 ans... j'avais pas l'habitude moi !

- tu étais tout timide au début. Pff heureusement que je suis venue te voir hein !

- c'est clair !

Je repensais au petit garçon qui me faisait pitié. Je n'avais jamais compris pourquoi il se faisait harcelé ni pourquoi ses parents sont morts.

- fait froid, chuchotai-je.

- on est en décembre. C'est normal.

- tes parents sont morts quand ?

Bon, ok il y avait mieux comme transition. Mais je suis pas subtile moi ! Pour le moment il paraissait simplement surprit. Et puis cette question me hantait depuis si longtemps. Je voulais savoir s'il avait été assez grand pour s'en rendre compte ou pas. Je priai que qu'il ne s'en souvienne pas.

- il y a quatre ans.

Quatre ans ? Alors il s'en souvient très bien. Mais ça veut dire que c'était au même moment qu'il est devenu aveugle.

- est ce que...

- Sigrid, je te le raconterai un jour. Mais pas ce soir.

Sans être en colère, j'étais déçu. J'avais vraiment envie de savoir. Puis je me dis que c'était dur pour lui d'en parler.

- merci.

Il se radoucie, c'est vrai que j'avais été trop brusque sur ce sujet.

- je t'ai réveillé tout à l'heure ?

- non, je dormais pas.

- si on avait échangé les rôles, je crois que je t'aurais raccroché au nez.

Il soupira.

- ça ne m'étonne même pas.

Je réfléchis quelques secondes.

- non, je serais allée te voir en fait. Oui j'aurais raccroché au nez de tout le monde sauf à toi Orla-chou.

Il sourit. Il voyait bien que même sur le ton de l'humour, ce que je disais était vrai.

- merci Sigrid.

Il était littéralement en train de geler sur place. Il grelottait et sa voix n'était pas normal. Je ne pouvais pas être égoïste aussi longtemps, je l'avais appelé à 23 heure 30 dans le froid et je lui avais même piqué son manteau. Même si je ne vais pas bien, là c'est lui qui souffre. Alors malgré mon envie de rester avec lui je me levai.

- je veux rentrer.

- d'accord, dit-il à moitié soulagé, à moitié inquiet.

J'enlevai le manteau et l'aida à le remettre sur lui. J'habite juste à côté alors que lui doit marcher au moins 20 minutes d'ici.

- merci Orlan, on se voit dem... Tout à l'heure du coup.

Il hocha la tête.

- tu es sur que ça va hein ? Si tu as besoin de moi je suis là.

- non, répondu-je fermement plus pour moi que pour lui, c'est bon. Ça va !

- d'accord. Dans ce cas à tout à l'heure.

AveugleWhere stories live. Discover now