XX ○ Merci pour tout.

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Claire referma la porte de la chambre de Louis, sourire aux lèvres. Leur promenade dans le parc semblait les avoir tous les deux mis de bonne humeur.

Elle arpentait lentement les couloirs climatisés à la recherche de quelque chose à faire. Elle frissonnait de temps à autre ; la différence de température entre intérieur et extérieur devait avoisiner les dix degrés, assez pour tomber malade.

Alors qu'elle approchait de la salle commune, une voix haut perchée résonna dans son dos.

- Excusez-moi !

Claire se retourna. Une petite femme ronde trottinait dans sa direction. Sa peau, de la couleur foncée de l'ébène, portait déjà quelques marques du temps au coin de ses yeux et contrastait avec le bleu clair de sa blouse d'urgentiste.
Claire fronça les sourcils. Une urgentiste ? Que venait faire une urgentiste dans le service psychiatrique ?

- Je peux vous aider ? hasarda-t-elle.

- Hum, sûrement, oui, répondit l'autre. Je cherche Claire Breton. Est-ce que vous savez si elle...

- C'est moi.

- Oh, parfait.

Un sourire éclatant fendit le visage fatigué de la quarantenaire. Claire le lui rendit poliment.

- Êtes-vous occupée ? Je peux toujours repasser plus tard...

- Non, non, la coupa Claire. Je n'ai rien à faire, justement. En quoi puis-je vous aider ?

- J'ai un patient qui vous demande, en bas.

- Pardon ?

La jeune femme sentit son rythme cardiaque s'emballer. L'un de ses proches avait été admis aux urgences ? Qui ? Pourquoi ? Que s'était-il passé ?

- Un jeune homme, oui, continua la médecin. Il n'arrête pas de me répéter qu'il veut vous voir, alors je viens vous chercher.

Silencieusement, Claire se laissa guider jusqu'au rez-de-chaussée. Les deux femmes traversèrent tout le bâtiment, de l'aile est - là où était installé le service psychiatrique - à l'aile ouest, entièrement dédiée aux urgences.
Le couloir qui menait de l'une à l'autre était désert et silencieux. Seul le claquement rapide de leurs pas en rompait la tranquillité.

Elles arrivèrent dans une pièce immense et incroyablement bruyante. Des hommes et des femmes en blouses bleues s'affairaient un peu partout. Il devait y avoir une cinquantaine de lits, tous séparés les uns des autres par des rideaux verts.
La médecin qui était venue la chercher amena Claire dans le fond de la pièce, la plantant devant un rideau tiré avant de s'en aller. L'aide-soignante hésitait à ouvrir. Elle avait déjà sa petite idée quant à l'identité de celui qu'elle allait retrouver sur ce lit d'hôpital, et elle espérait sincèrement se tromper. S'il avait été capable de se faire du mal simplement pour se rapprocher d'elle...

Avec une profonde inspiration, elle tira le bout de tissu vert sur le côté.

Yannis.

Comme elle s'y attendait. Elle soupira, et il ouvrit les yeux.

Il était dans un sale état. Ses cheveux étaient sales et emmêlés et son bras droit enfermé dans un énorme plâtre. Son visage, barré d'un pansement blanc au niveau du nez, s'éclaira d'un large sourire quand il vit à qui il avait affaire.

- Claire, tu es venue !

- Qu'est-ce qu'il t'est arrivé ?

Il haussa les épaules.

- Aucune idée. Je ne m'en souviens pas.

- Yannis...

- Je te dis la vérité, Claire.

Cette dernière leva les yeux au ciel. Ses blessures avaient forcément un lien avec elle, il ne pouvait en être autrement. Cela faisait des années qu'il ne vivait plus que pour elle, et il ne manquait pas de le lui rappeler régulièrement.

- Tout ce dont je me souviens, continua-t-il sans la lâcher des yeux, c'est d'avoir repensé à nous deux. Hier soir, je crois. Je sais que je n'aurais pas dû... J'ai ressorti nos photos, je les ai regardées, et... J'ai eu envie d'un verre. Juste un petit. Je me suis dit que ça m'aiderait peut-être à oublier, à t'oublier. Après l'avoir terminé, je m'en suis resservi un deuxième, un troisième... Et je me suis réveillé ici.

Claire pinça les lèvres. Il semblait si fragile, relié par intraveineuse à toutes ces machines autour de lui. Et c'était encore à cause d'elle...

Elle ne savait plus comment lui faire comprendre qu'il ne faisait que se pourrir la vie pour rien, en continuant d'espérer ainsi.

- Je n'y peux rien si je suis comme ça..., murmura Yannis, comme s'il lisait dans ses pensées. Je n'arrive pas à m'empêcher de penser à toi. Tu es partout, je te vois partout... Je... Je suis désolé...

- Arrête de t'excuser, le coupa Claire avec un soupir. Tu m'as déjà dit tout ça des milliards de fois.

Il baissa la tête, penaud. Claire s'approcha du lit et posa sa main sur la sienne.

Cela faisait plusieurs années qu'elle lui répétait de l'oublier, qu'elle faisait tout pour l'éviter. Mais, en le voyant ainsi, blessé, dans un état vraiment lamentable, elle comprit. En le repoussant, elle ne faisait que le faire souffrir davantage.

- Écoute Yannis, reprit-elle. Je n'aurais pas dû essayer de couper le contact, jamais. C'est moi qui suis désolée, pour tout ce que je te fais subir depuis que nous ne sommes plus ensemble. À partir d'aujourd'hui, je te promets d'être là pour toi si tu en as besoin.

- Merci, Claire, répondit l'autre avec un sourire. Savoir que tu es toujours présente m'aidera sûrement à passer au-dessus de... de tout ça.

Claire sourit à son tour. Peut-être qu'avec ce compromis, il arrêterait de se faire aussi mal. Du moins, c'est ce qu'elle espérait.

Ils continuèrent à discuter quelques minutes, riant de temps à autre. « Comme au bon vieux temps », pensa Claire. Sauf que désormais, elle retrouvait un ami. Plus aucun engagement ne les liait, et elle se sentait à nouveau libre de le retrouver. Oui, ce compromis leur ferait certainement du bien à tous les deux.

Quelqu'un se racla la gorge derrière eux. Claire se retourna. La petite femme qui était venue la chercher à l'autre bout de l'hôpital tenait le rideau entrouvert et les regardait avec un demi sourire. Elle posa ses yeux noirs sur Yannis.

- Monsieur Mals ? Nous allons vous garder encore quelques jours, le docteur Perez préfère garder un œil sur vous durant la cicatrisation de votre nez. Nous voulons éviter tout risque de saignement important qui pourrait venir compliquer la situation. On vous a attribué une chambre au premier étage, je vais vous monter tout de suite.

Claire recula d'un pas pour le laisser se lever, et elle posa une main rassurante sur son épaule.

- Je passerai te voir demain, annonça-t-elle avec un petit sourire. Je te le promets.

- Merci, Claire. Merci pour tout.

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Bonsoir bonsoir !
Je vous poste ce petit chapitre (un peu caca) en vitesse avant d'aller voir l'éclipse hehe.

Quelles sont vos petites impressions ? Cette réconciliation n'est-elle pas trop... impromptue ? Je vous avoue que je ne savais pas comment l'amener, et je ne suis pas du tout sûre de ce que j'en ai fait. Donnez moi toutes vos remarques, vos idées pour améliorer ce chapitre ! J'ai fort besoin de vous sur ce coup là haha.

Passez un bon weekend ! xx

AlogieWhere stories live. Discover now