Chapitre 15

19 4 0
                                    

Orion a grandement peiné à trouver un marchand acceptant de les emmener jusqu'à Naples. Il ne pensait pas que voyager avec une femme serai si dur. Il avait eu des refus, avec tout un appui sur le fait que les femmes portaient malheur et ceux qui voyaient cela comme une monnaie d'échange. La seule personne qui les fit monter fut un homme, un jeune, assez sûr de lui, qui voit la présence de la jeune femme comme un défit. La vente de leurs montures leur a bien rapporté, de quoi trouver un endroit où dormir en Italie. Les regards curieux s'attardent momentanément sur elle parfois, sans pour autant être indiscrets. Elle s'appuie contre le bois et observe le remous des flots contre la coque avec un soupir.

« On part quand déjà ?

-Demain, madame. » Lui répond le capitaine avec un sourire charmeur. Il s'incline légèrement pour se présenter :

« Capitaine Alvarez, pour vous servir, bienvenue à bord. » L'espagnol prend sa main pour la baiser mais elle l'arrête d'une simple phrase :

« Capitaine, je ne crois pas raisonnable de compter fleurette quand vos hommes attendent vous ordres.

-Madame sait bien parler. Bien mieux que son compagnon. » Il lui lâche la main, sans l'avoir porté à son visage.

« Azalaïs. La mer bouge-t-elle beaucoup ?

-Non, elle devrait-être assez calme. Vous n'êtes jamais montée sur un bateau ?

-Non. » Elle est distante, bien plus que lorsqu'elle avait rencontré Orion, mais d'un autre côté, avec lui, elle savait à quoi s'attendre. Avec ce nouvel étranger, elle ne peut pas en dire autant. Elle se retourne et le voit justement nettoyer son épée, tout en les fixant l'air grave. Lui non-plus n'a pas confiance, pas pour la même raison cependant.

Il ne les a pas quitté des yeux depuis qu'ils discutent ensembles. Cet homme est assez beau et raffiné, bien plus qu'il ne le sera jamais. Et cette seule pensée le met en colère. Cela a beau être un préjugé, il sait que sa compagne de voyage aime les belles choses, le confort, l'aventure. Malheureusement, il ne peut lui donner que le dernier, en supputant qu'elle y survive. Il pousse encore un soupir. Elle se tourne vers lui au cours de sa passionnante discussion et lui fait un léger sourire. Sourire qu'il ne parvient pas à lui rendre. Il voit son expression changer. Bien qu'elle a toujours ce sourire collé au visage, ses yeux semblent méfiants et inquiets. Il se lève, pour savoir ce qui la tracasse, quand il se rappelle de la présence de l'homme.

Elle n'écoute plus le capitaine qui lui déblatère toute sa vie. Elle s'accroche aux yeux d'Orion qui s'est levé. Elle lui demande mentalement de lui venir en aide, mais il range son épée et s'éloigne.

« C'est mon père qui m'a légué ce navire. Il vous plaît ?

-J'en ai déjà vu de bien plus impressionnants. » Laisse-t-elle échapper. L'espagnol bombe le torse.

« Plus impressionnants ? Madame doit être facilement impressionnée dans ce cas. » Elle reporte toute son attention vers lui. Se moque-t-il d'elle ? Elle a vu bien plus de navires qu'il n'en verra jamais dans toute sa vie de marchand.

« Les bateaux de Monsieur Colon étaient plus beaux, plus grands.

-Comment avez-vous put les voir ? Je n'étais pas encore né.

-J'ai rencontré la famille d'un peintre qui l'avait vu et avait fait une superbe toile. » Ment-elle rapidement. Son orgueil l'a mit en danger. Elle s'en sort cependant par les rires du capitaine.

« Ah les femmes ! Les peintres ne peignent que ce qu'ils veulent. Ils ne sont pas fidèles à la réalité. Je vous le dit. Le mien est le plus grand et le plus beau.

-Si vous le dites. » Finit-elle par soupirer.

« Excusez-moi, je dois aller voir mon ami pour quelques détails.

-Je vous en prie. » Elle incline légèrement la tête et s'éloigne à grandes enjambées. Elle s'approche d'Orion avec une rage sourde à faire peur. Elle l'assassine du regard tout en restant le plus discrète possible quant à leur discussion.

« Comment as-tu osé me laisser avec lui.

-Je croyais que tu appréciais sa présence. Tu semblais... heureuse de la discussion mondaine que je ne te donne pas.

-Tu te moque de moi ? J'ai l'air d'apprécier les discours mondains ? Cet homme est répugnant. Je ne le supporte pas et il semble être le genre prêt à tout pour parvenir à ses fins, je n'aime pas ça.

-Moi non-plus. Mais on lui a payé le passage, et je ne vois personne d'autre pour mous emmener à Naples. » Elle croise les bras, le regard perdu sur les quais.

« Je vais m'acheter une robe.

-Une robe ? Avec quoi ?

-De l'argent que tu vas me donner. J'ai envie d'une robe et on va passer deux semaines en mer, c'est l'occasion rêvée. Ce n'est pas une fois à cheval que je pourrais la porter.

-Je croyais que tu n'aimais pas les robes.

-Je croyais t'avoir demandé de l'argent. Ne m'oblige pas à tuer quelqu'un pour en avoir. » Il pousse un soupir.

« A une condition.

-J'écoute.

-Je t'accompagne.

-A ta guise. Mais allons-y maintenant. Je ne voudrais pas notre ami parte sans nous. Le temps qu'il charge, on ne risque rien.

-Il ne partira pas sans nous. » Elle tourne la tête vers lui, les sourcils froncés.

« Et qu'est-ce qui te fait dire ça ?

-La façon dont il te regarde. » Répond-il avec une grimace. Elle se tourne vers le capitaine qui les observe du coin de l'œil, un peu plus loin. Elle va à sa rencontre.

« Nous allons faire une course en ville. Nous serons vite de retour.

-Bien madame. » Il s'incline du plus bas qu'il le peut, un sourire accroché aux lèvres. Azalaïs rejoint son compagnon rapidement et ensemble, ils se rendent en ville, avec la ferme intention de trouver une robe à la jeune femme.

L'œuvre sans nomWhere stories live. Discover now