Le voleur et le policier

Chapitre 2

« -Dis ? Grand-frère Osomatsu ? On restera toujours ensemble? »

Les deux enfants marchaient au crépuscule. Le bruit des cigales était si fort ce jour-là et la chaleur si lourde. Seule près des murs subsistait une ombre continue. Mais ça n'avait pas empêché les deux compères de jouer et de faire les quatre cents coups. Oui, ils avaient tant ri ce jour-là. Tant de joie. Ils allaient revenir et leur mère aurait fait un bon petit plat alors que les quatre autres frères auraient attendu la bave aux lèvres le retour des deux absents.

« -Pourquoi tu demandes ça, Choromatsu ? Bien sûr qu'on sera toujours ensemble ! »

Le bambin se tourna vers son frère pour lui sourire et lui faire promettre. Ses yeux s'écarquillèrent...Il n'arrivait pas à voir le visage de son frère. C'était comme s'il n'avait en face de lui qu'un écran de télé défaillant. Comme sur leur vieille télé...Grésillant jouant sur les nuances de blancs, de noirs et de gris...Il regarda longuement le visage de son frère...Il ne l'entendait plus si ce n'est ce son..Ce bruit irrégulier..Bip. Biiiiip. Sa respiration s'accélérait alors qu'il avait l'impression que le corps de son frère s'affaissait comme transpercer par quelque chose et par quelqu'un dans l'ombre.

Le jeune homme ouvra d'un coup les yeux. Il avait peur, il était affolé. Il regardait à droite et à gauche comme à la recherche de quelqu'un. Il se leva précipitamment bousculant les draps qui lui collaient à la peau. Il posa sa main sur sa poitrine, tentant de se calmer...Il essayait de se convaincre qu'il n'y avait rien. Ce n'était qu'un cauchemar...Rien qu'un mauvais rêve...Inspire. Expire. Respire. C'est ce qu'il se répétait alors que sa respiration retrouvait progressivement un rythme régulier vite suivi par son coeur.

Une fois cela fait, il scruta la pièce comme pour se rappeler où il était. Comme s'il en avait besoin. Il reconnaissait déjà cette petite table de nuit, ce lit une place, cette table basse, ce tapis mangé par les mites ou bien ce petit bureau noir rempli d'annales et de feuilles. Mais chercher où il était lui permettait de se rassurer. Il était dans son petit appartement de la banlieue de Tokyo. Il le savait bien mais...Il fallait qu'il se rassure.

Il se tourna ensuite vers la source d'un bruit qui n'avait de cesse de le déranger...Ce bip qu'il avait entendu, il ne provenait que d'une source. Son téléphone portable ou plus précisément de la fonction réveil de celui-ci. Il tendit la main et le fit taire. Il lui était redevable d'avoir interrompu son songe mais maintenant qu'il était réveillé et à l'abri...Il préférait le faire taire pour de bon.

Il sortit des draps devenus humide à cause de son cauchemar et de ces mouvements cette nuit, allant ouvrir les rideaux qui étaient déjà percés par la lumière matinale. Il laissa passer d'un coup les faisceaux donnant une toute nouvelle teinte à l'ensemble de la pièce. Du noir, elle devenait blanche, verte, crème et gris. Il ferma les yeux, ayant surestimé la force de l'astre matinal qu'était le soleil et éblouie par celui-ci. Bien que cela ne fût que de courte durée et qu'il s'éloigna très vite de la fenêtre dans le but de prendre son petit déjeuner.

On ne parlait pas de quelques choses d'incroyables ou de surprenants. Non, il était adepte des cafés serrés et des simples toasts. Ce fut son principal régime quand il était à l'école... C'était sans doute une des raisons pour lesquelles il avait pris l'habitude de peu manger le matin.

Il allait boire sa tasse quand son portable vibra et sonna d'un coup, une musique digne d'un vieux film des années 60. Sous la surprise, il avala de travers manquant de tout recracher. Ce fut donc en toussant qu'il décrocha. Il savait bien qui était à l'appareil, en sachant que chacun de ses frères avait une sonnerie particulière. Même s'il ne s'attendait pas à recevoir un appel à cet heure.

« -Hello ! Mon cher petit frère ! » Cette voix si clichée dans sa prononciation et dans ses intonations. La voix de son grand frère... Second frère de la famille : très confiant, encourageant et impulsif. Et, en même temps, un homme digne de la pire des dramaqueen.