Chapitre 59.

244 49 21
                                    

Luke se lève brusquement de son siège en s'étirant longuement, sentant absolument toutes ses vertèbres broyées par les quatre heures vingt-sept passées contre le même dossier. Ethan, quant à lui, se frotte les paupières encore alourdies par un sommeil profond. Il n'y a pas grand-monde dans la gare alors que la nuit est bien entamée ; plus exactement, la gare est presque déserte. Et, après Paris aux métros et cafés bondés, ça leur fait à tous les deux du bien, cette soudaine solitude.

-Dépêche-toi, marmonne le premier en sortant rapidement du wagon.

L'autre le suit en baillant, puis soupire profondément alors qu'un vent violent le frappe en plein visage. Ça fait du bien après plusieurs heures de train. Luke grogne un « j'suis sûr qu'il va pleuvoir avant qu'on arrive à l'hôtel » auquel Ethan répond par un simple et joyeux rire.

Ce qui déstabilise profondément le jeune homme. Jamais encore il n'a entendu de la véritable joie se dégager de l'être du garçon, à part la fois dans le parc, quand il pleuvait.

Le jeune homme déteste la pluie.

Mais il adore l'effet qu'elle a sur le garçon.

Le garçon qui l'entraîne sur six cents mètres, peut-être six cents deux, et, effectivement, la pluie les a pris par surprise à la moitié du chemin. Ils ont parcouru les onze derniers mètres en courant avant de parvenir à l'entrée de l'hôtel, et y entrer en trombes, essoufflés. Ils se dirigent vers le comptoir, d'où les observe une femme au regard amusé.

-J'ai réservé une chambre pour deux nuits, au nom de Legna.

La réceptionniste vérifie sur son ordinateur, hoche la tête et tend les clefs. Ils se dirigent rapidement vers l'ascenseur, après avoir poliment écouté les indications. Deuxième étage, cinquième porte à gauche. Ethan ouvre la porte et laisse passer Luke avec leurs valises ; ce dernier les pose sans grande délicatesse sur le sol, et s'affale sur l'unique lit en poussant un grognement de désespoir après avoir passé une main dans ses cheveux désormais bouclés.

-Râle pas, ça te va bien.

-Peut-être, mais j'aime pas.

Le garçon se contente de hausser les épaules en guise de réponse avant de chercher une prise pour brancher son téléphone, qui a fini par s'éteindre à cause du manque de batterie. Il regarde la petite horloge murale qui affiche vingt-deux heures quarante-trois. Puis se redresse.

-Bon, je sors fumer.

Le jeune homme hoche la tête d'un air distrait, avant de se redresser brusquement.

-J'ai vu qu'il y avait un petit supermarché au coin de la rue. Ça te dit une bouteille de whisky ?

-En quel honneur ?

Luke réfléchit pendant quatre secondes. Puis sourit.

-Le nôtre.

Ethan secoue la tête en riant légèrement.

-Pourquoi pas ?

Ils sortent de la chambre et redescendent ensemble dans un silence confortable ; puis le jeune homme poursuit son chemin alors que le garçon s'arrête sur le perron pour allumer sa cigarette. Il s'assied sur les marches et observe la pluie s'abattre sur la terre en une symphonie désordonnée. L'orage gronde au loin. Un jeune portier s'échappe à son tour de l'hôtel et s'appuie contre le mur à quelques pas de lui, sourit en sa direction et sort un paquet de clopes. Le portier ne lui parle pas, mais le garçon sent parfois son regard sur lui, ce qui ne le rend pas vraiment à l'aise. Alors il l'ignore et se concentre sur la lueur rouge qui brille à l'extrémité de sa cigarette quand il inspire une longue bouffée, et sur la fumée qui s'envole dans l'air frais de Bretagne quand il soupire.

L'Ouragan d'Étoiles Où les histoires vivent. Découvrez maintenant