22. Courage

1.1K 220 179
                                    

ϳϵησ 

Je m'embrase.

Mes yeux brûlent et je peux sentir chacune des flammes destructrices qui en coulent, lécher, immoler et détruire mon visage douloureux. Je les essuie. Sans cesse. Mais l'incendie ne s'éteint jamais. L'incendie reprend. Se gonfle et abat tout sur son passage. Il écrase mon cœur étouffé dans ma poitrine et noue mes entrailles.

Mon poing clos frotte. Cogne. Ronge et s'affaiblit contre mes paupières dont le brasier n'est plus que peau irritée.

Je ne souris plus. Je ne le regarde plus. Je fuis, sans bouger. Paralysé, à un ou deux mètres ridicules de son corps, assis doucement dans l'herbe noire.

Tu sais, maintenant.

Tu sais tout.

Je sens son regard sur moi. Son regard doux dont la lumière n'a pas changé. J'ai parlé. Trop parlé. Je lui ai tout avoué, perdu dans un récit trop grand pour moi. Le récit de ma vie. Ou peut-être de ma chute en Enfer. J'ai parlé, et il n'a cessé de m'écouter, attentif, supportant ma présence contre lui, lorsque je sentais ma hargne s'emparer de mon sang. J'ai parlé, et il a répondu à ma question. Il a répondu, et donné la seule bonne réponse à ce mystère que je ne résoudrais jamais.

Tu savais déjà.

Tu avais compris.

Et les étoiles de ses yeux n'ont jamais changé. Elles sont les mêmes. Brillantes. Calmes et touchées. Elles m'observent dans les ténèbres qui nous oppressent et luisent du même éclat pur et sincère.

Mais ça ne suffit pas. Ça ne suffit jamais à appaiser l'animal qui gronde au fond. Qui me protège. Qui m'entrave.

Fou, les doigts tremblants, je cherche, je fouille et j'étripe mes poches à la recherche d'une cigarette qui calmerait ce foutu feu qui s'empare de mon corps et serre ma machoire. Je cherche et tombe sur un paquet vide que ma paume broie par inadvertence.

Je tremble. Je tremble trop. Je me lève, retournant les moindres petites cachettes de mon pantalon, dont je ne tire qu'un briquet inutile que je tourne et retourne, incapable de regarder de nouveau Jaemin, muet.

Une bouffée soudaine de rage m'arrache un cri, et j'ai honte. J'ai peur. De moi. De lui. Et de ce putain de sentiment qui me consume.

Mon briquet s'écrase dans l'herbe après m'avoir brûlé, jeté au bas de la colline dans laquelle nous sommes noyés sous le silence.

Je n'ai plus de cigarettes.

Je n'ai plus de cigarettes.

Putain de merde, je grogne, mes ongles s'enfonçant dans mes bras à nouveau, alors que je revois les rayons d'un soleil sanglant s'étaler sur le bitume, assombrit d'éclats de crâne et de cervelles éparpillés. J'ai plus de cigare-

Eh.. souffle soudainement une voix qui s'envole en cascades d'essence sur mon coeur en feu. Le réduisant en cendres dont je ne peux renaître. Jeno.. calme-toi. Ça va aller.

N-Non !

Brusquement, je tourne mon visage vers lui, glacé par son toucher tendre sur mes phalanges entaillées. Je frémis, respirant bien trop fort pour mes côtes qui s'écartent et se resserrent douloureusement.

Lentement, hésitant, je sens ses doigts caresser ma peau. Comme il l'a déjà fait tant de fois, berçant mes poings clos d'une vague d'émotions que le petit garçon ne comprend pas.

Une vague d'émotions que le petit garçon perdu n'a jamais appris à dompter. Des émotions trop fortes. Trop soudaines, et qui pourtant l'appaisent, aussi brutalement qu'elles l'achèvent.

「 Hargne - Nomin 」Where stories live. Discover now