Chapitre 1

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J'entre dans l'autobus, la tête baissée. Je prend place sur un siège libre, et monte mon capuchon sur mes cheveux toujours aussi longs, qui cachent mon visage, me créant une barrière vis-à-vis des autres. Je me laisse bercer par cette symphonie de notes qui me fait rêver. Je reconnaît toutes les notes jouées, et je visualise mes mains sur mon piano, qui exécutent ce morceau à merveille.

Ce n'est pas pour me vanter. Loin de là. Mais j'ai toujours été différente. Quand j'étais petite, je me plaisais à croire qu'il s'agissait là d'un pouvoir magique qui me rendait spéciale. Mais j'avais faux. Le monde m'a simplement fait un cadeau: il m'a donné une ouïe unique, et un don musical. Mais peut de gens sont au courant. Certaines personnes avec ce don seraient devenues des stars, poussées par leurs parents à se dépasser depuis leur plus jeune âge. Mais dans mon cas, ce n'était pas tout à fait la même histoire. Mon père voulait me garder pour lui seul...

Un souvenir refait surface.


«Kali! Monte!»

Je n'aime pas quand papa veut me voir, et qu'il n'y a personne d'autre dans la maison. Mais j'ai peur de désobéir, alors je monte.

«Approche...»

Sa voix est pâteuse. Ses yeux sont rougit et il me paraît bizarre. Je déduis qu'il a bu. Encore. Il pu.

Face à ma réticence à lui obéir, il attrape mon poignet, et me jette sur son lit, moi, sa fille encore toute jeune, toute tremblante.

Alors, sans que je comprenne, il passe au dessus de moi, et...


NON.

Arrête, Kalia! Ce n'est pas le moment. Pas avant d'aller à l'école. Reprends-toi merde!

Je ferme les yeux fort, si fort pour retenir mes stupides larmes.

C'est fini Kalia. Tu avais promis de ne plus jamais pleurer.

J'inspire et tourne la tête vers la fenêtre, me concentrant fortement sur le ville qui défile devant moi, m'accrochant à tous les détails possible. Ne plus penser. Ne plus penser. Ne plus penser. Ne plus penser...

Voilà. Tout va bien.


***


Le cours d'histoire touche à sa fin, et la cloche annonçant l'heure du dîner retentit. Finalement.

Je me faufile dans le couloir grouillant d'adolescents parlant et riant fort, et j'atteint enfin mon casier. Je range mes cahiers et sors dehors en remettant mon capuchon et mes écouteurs sur mes oreilles. Sans même le faire exprès, j'avance au rythme de ma musique. J'avance à mesure que la mélodie progresse, je suis légère, et je m'imagine me promenant sur une portée.

Un mince sourire étire mes lèvres devant mon imagination ridicule.

Voilà au moins 5 minutes que je suis assise ici, seule sur ce banc, à profiter du chant des oiseaux autour de moi. Mais un bruit irrégulier parvient à mon oreille. Des pas. Des pas qui se rapprochent. À sa démarche, je déduis que c'est un jeune homme. Faisant mine de l'ignorer, je ne le regarde pas quand il s'assit à l'autre bout du banc. Je l'ignore encore quand je sens ses yeux me scruter.

«Salut.»

Je détourne mon regard de la branche où se tenait un magnifique merle quelques secondes auparavant.

Il semble se trouver dans ma tranche d'âge. Avec ses cheveux blonds et ses yeux bleus, il devait avoir une gueule d'ange, tout petit.

Je hoche timidement la tête, le saluant en retour, l'ombre d'un sourire sur mon visage.

«Je m'appelle Antoine. Toi?»

Je me fige, et je le fixe. Après quelques secondes d'hésitation, je sors mon téléphone et je vais sur l'application Note.

Kalia

Je lui tend mon téléphone, qu'il prend, un peu suspicieux. Et voilà. Lui aussi, maintenant, va me trouver bizarre, comme tous les autres. C'est la seule personne qui m'adresse la parole depuis le début de l'année, et il va maintenant partir en courant.

Sans même m'en rendre compte, me doigts pianotent silencieusement une douce mélodie que je suis seule à entendre. Une douce mélodie qui a pour but de me calmer.

Mais alors que je m'imagine mille et un scénarios, il me rend mon téléphone avec un grand sourire.

«Kalia. Original. J'aime beaucoup.»

Devant mon air ébahi, il éclate de rire, et à mon tour, je ris silencieusement, ne pouvant me contenir. Son rire est contagieux.

C'est la première fois qu'un sourire sincère illumine mon visage depuis cette nuit.

C'est la première fois que j'oublie d'un seul coup mes problèmes depuis qu'il m'a...

Ce garçon est spécial. Je ne peux le nier.

Comme une MélodieWhere stories live. Discover now